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Le livre de raison : reconstruisons nos familles !

Une restauration durable et solide ne peut se faire qu’à travers la restauration de la société en profondeur en commençant par sa base. S’il faut activement se préparer à une restauration par le haut, sachant réagir aux évènements comme il faut et agir avec vélocité et efficacité, il s’agit surtout de restaurer nos familles, gage de la victoire finale pour le pays et le bien commun. Car la famille est bien la société fondamentale, et le Roi protecteur des familles, père de toutes les familles.

Pour cela, citons un auteur bien oublié aujourd’hui, mais pourtant d’une grande érudition et d’un esprit vivifiant : Monseigneur Delassus, docteur en théologie et protonotaire apostolique.

« Tout homme qui veut fonder une « famille vertueuse » doit d’abord se persuader que son devoir ne se borne point, comme le veut J.-J. Rousseau, à pourvoir aux besoins physiques de son enfant, si longtemps que celui-ci est dans l’impuissance d’entretenir par lui-même sa vie corporelle. Il lui doit l’éducation intellectuelle, morale et religieuse. L’animal a la force par laquelle il subvient aux besoins corporels de ses petits, et cela leur suffit. L’enfant, être moral, a d’autres besoins et c’est pourquoi, outre la force, Dieu a donné au père de famille l’autorité pour dresser la volonté de ses enfants, les faire entrer dans la voie du bien, les y maintenir et les y faire  progresser. Cette autorité, Dieu l’a voulue permanente, parce que le progrès moral est l’œuvre de toute la vie. Et comme, selon les intentions de la Providence, le progrès doit se développer et croître d’âge en âge, il est nécessaire que la famille humaine ne s’éteigne point à chaque génération : le lien familial doit subsister entre morts et vivants, nouer les unes aux autres toutes les filiations d’une même descendance, et cela, chez les races vigoureuses durant des siècles.

La pensée de l’homme de bien ne doit donc point s’arrêter à ses propres enfants, elle doit se porter au-delà, sur les générations qui suivront et faire que ce qui est vertu devienne tradition chez elles.

À cela, le livre de raison peut contribuer grandement. Commencer ce livre, ordonner à l’aîné de le continuer et de faire la même injonction à son propre fils, est le moyen le plus facile et le plus sûr d’introduire dans une famille des traditions ; à une condition cependant, c’est que l’on aura pour règle inviolable de ne prendre d’alliances que dans les familles où règnent les vertus que l’on veut soi-même transmettre à ses propres enfants[1]. »

Un modèle de méthode : après avoir dénoncé l’erreur moderne sur l’éducation, essentiellement rousseauiste, il réaffirme ce qu’est l’éducation véritable, évidemment morale, avec ce qu’elle nécessite en ce qui est le plus attaqué par la modernité, et donc que nous devons particulièrement conserver et cultiver : l’autorité du père, attaquée par la révolution et complétement niée aujourd’hui, et la continuité de la chaîne des temps entre les générations pour la transmission des vertus et l’accomplissement toujours plus avancé d’hommes vertueux produits par la famille. Cela nécessite l’assurance de la transmission des biens matériels, bases d’une indépendance sur laquelle se construit l’éducation morale, et la transmission des biens spirituels familiaux, à travers entre autres un outil : le livre de raison.

À l’aune du XXIe siècle, le monde que nous décrit Mgr Delassus semble bien lointain : cela nous rappelle cruellement toute notre déchéance.

C’est en même temps une grande grâce dans le malheur que Dieu nous fait : nous n’avons plus grand-chose à perdre et tout à reconstruire, nous pouvons mériter beaucoup assez facilement, sans fauter mortellement par la perte de ce que nous n’avons plus. Le bonheur des pauvres en bref. Nous ne pouvons que difficilement reconstituer une assise matérielle encore que, dans une campagne bien choisie, cela est tout à fait faisable mais nous pouvons reconstituer une assise morale et spirituelle invincible, qui vaincra à terme, pour le service du Roi et celui du Roi des Rois, Jésus-Christ, Dieu incarné.

Le livre de raison nous paraît un outil tout à fait intéressant et fructueux. La pratique existe d’ailleurs dans d’autres cultures et civilisations, comme dans le Japon médiéval.

Peut-être déjà pouvons-nous nous inspirer de ce qui a existé comme livre de famille dans le passé :

« M. Charles de Ribbe a employé le meilleur de sa vie à remettre en honneur les livres de raison. Après avoir édité les manuscrits de plusieurs anciennes familles, il a publié divers ouvrages pour mettre en pleine lumière les enseignements qui s’y trouvent, et enfin il a rédigé, d’après les modèles qu’il avait sous les yeux, Le Livre de Famille, pour servir d’exemplaire et aider ainsi les pères qui voudraient mettre en pratique chez eux ce qui a été pratiqué par nos ancêtres. Nous ne saurions trop recommander l’acquisition, la lecture et la méditation de ce livre ; il en est peu qui puissent autant contribuer à imprimer à notre société dégénérée une nouvelle impulsion vers le bien[2]. »

Concrètement, comment se compose le livre de famille ?

« Le Livre de raison est ainsi appelé, parce que l’on y rend raison à ses enfants et aux enfants de ses enfants, dans les générations à venir, de la position de la famille, de ses antécédents, de ses travaux, des idées et des sentiments qui l’ont guidée dans le chemin de la vie, et des coutumes qui doivent assurer la transmission des mêmes sentiments et des mêmes vertus. Il est le lien moral entre les générations, dont les anneaux, grâce à lui, se lient étroitement dans une communauté d’idées et de sentiments. Il doit être divisé en trois parties, répondant aux trois phases de l’existence de la famille. Le passé, c’est la généalogie et l’histoire de la souche domestique. Le présent, c’est le ménage actuel. L’avenir, ce sont les enseignements laissés par les parents et les ancêtres à leurs enfants et petits-enfants. Le Livre de raison bien tenu contient ainsi en résumé tout ce qui moralement et matériellement constitue la famille[3]. »

Pour la restauration, que faire ? Voir l’éternité et assurer son propre salut. Voir la fin des temps, et assurer l’éternité terrestre à sa famille. Voir l’instant qui suit pour vivre avec vertu, tout le temps, à chaque instant.

Toutes les techniques sont bonnes à prendre : il existe une tradition qui a fait ses preuves, le livre de raison, pourquoi se gêner ?

Paul-Raymond du Lac

Pour Dieu, pour le Roi, pour la France


[1] Mgr Henri Delassus, L’Esprit familial dans la maison, dans la cité et dans l’État, Lille, Société Saint-Augustin, 1911, p. 149-150.

[2] Ibid., p. 151 ; cf. Charles de Ribbe, Le Livre de Famille, Tours, éd. Mame, 1879, 283 p. (lire en ligne).

[3] Ibid., p. 152.

2 réflexions sur “Le livre de raison : reconstruisons nos familles !

  • PELLIER Dominique

    Quelle bonne idée que ce livre de raison. Il est des préceptes qui sont à transmettre, comme on dit souvent, aux générations futures, ainsi comme dans la Bible : “Aux fils de mes fils”.

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