Lettre d’un émigré. La Prière des Francs
« O Dieu tout-puissant et éternel, qui avez établi l’empire des Francs pour être par le monde, l’instrument de votre très divine volonté et le glaive et le rempart de votre sainte Eglise, nous vous en prions, prévenez toujours et en tous lieux, par votre céleste lumière, les fils suppliants des Francs, afin qu’ils voient clairement ce qu’il faut faire pour établir votre règne en ce monde, et que, pour réaliser ce qu’ils auront vu, ils deviennent toujours plus puissants, par la charité et la bravoure. Par le Christ notre Seigneur. Ainsi soit-il.»[1]
Cette ancienne prière qui se trouve toujours dans la plupart des missels traditionnels, caché au sein d’autres prières, illustre avec éclat le caractère particulier de la Royauté en nos contrés, catholique dans son essence, qui perdure jusqu’à aujourd’hui.
Rien de protestant ici, ni de révolutionnaire, d’idéologique ou de gnostique. Le Royaume de Dieu a vocation à se trouver réalisé en se monde, dans le règne céleste accompli sur terre. Rien d’éthérique, pas de monothéisme monoïque qui s’élève dans le désert aride de type sémite, avec un Dieu hors-du-monde, loin, si loin, dont les œuvres sont difficilement visibles pour ces peuples du désert confrontés à l’aridité, la rareté des êtres, la dureté de la nature. En la Chrétienté pourtant la Présence réelle du Seigneur actualise à chaque instant son sacrifice et réalise dans le monde d’ici-bas chaque instant son existence à travers l’Esprit-Saint. La réalité déborde littéralement de divinité partout et à tout instant. Le Salut de l’âme se fait d’abord pendant cette vie, dans l’union de fait de la chair et de l’esprit, du corps et de l’âme, dont la distinction que nous faisons dans les paroles n’est que purement formel d’un point de vue humain : en réalité nous sommes les deux. La réalité divine d’après la mort est évidemment là, et il est bon d’en parler. Là-bas pourtant aussi la chair est là, puisque nous croyons à la résurrection de la chair. La religion catholique est belle par sa vérité révélée, au fond limpide comme de l’eau de source.
Ce fond d’union, d’accomplissement dans ce monde, ce fond charnel en bref est consubstantiel à la royauté franque que l’on retrouve dans la prière précédente.
Un autre point mérite attention. À y penser, Nietzsche n’a rien compris à la religion catholique quand il y voit une apologie de la faiblesse, de la souffrance, et de la médiocrité. La charité n’est pas la faiblesse, pas plus que le martyr n’est un vice de souffreteux victimaire, ni le pêché une façon de s’apitoyer sur son sort.
Jésus est Dieu, tout en étant distinct, mais Dieu quand même ; il est donc tout puissant, et c’est là que tout change. Donner sa joue gauche lorsqu’on est tout puissant est d’une charité infinie, car en un claquement de doigt il pourrait pulvériser le mauvais. La force et la puissance sont ainsi absolument catholiques, et ce n’est pas pour rien que la chevalerie fut si catholique, ainsi que le peuple franc, guerrier et religieux dans l’âme. Dans le monde d’ici-bas, la force et la puissance sont nécessaires au juste pour que la justice brille et illumine. La royauté française l’a prouvé à de nombreuses reprises. La force et la puissance n’ont rien à voir avec la violence, qui est un viol, un acte contre le divin et, dans le domaine physique, une force usée pour des fins injustes.
Le règne du Christ fut établi – même s’il n’est jamais parfaitement établi, que l’établissement est infini et toujours à renouveler ; du moins les fondements étaient sains, voire saints, et non inversés comme aujourd’hui – par notre race royale, les aïeux héroïques de notre Bon Roy. Joignons-nous au cri ancestral de nos parents qui nous couvent de leur protection depuis plus d’un millénaire pour que cette prière bonne s’élève, que nous gardions toujours l’esprit clair et restions droit sur le chemin de la Justice, le chemin divin de notre Seigneur, incarné et manifesté nécessairement et par nature dans le règne de notre bon Roi Louis XX, dans la Maison de France et la race sainte par excellence.
L’Église transmet la parole agissante, le Roi, partie intégrante de l’Église, l’accomplit et protège le Verbe agissant à travers ses ministres. Dans la bravoure et la charité. Deux mamelles qui nous sont aujourd’hui plus encore indispensables pour restaurer la France dans sa Mission d’accomplissement du règne du Seigneur sur cette terre. La Race de nos Rois fut élue depuis longtemps, qui sait, avant même peut-être que le Fils de l’Homme n’apparaisse, comme si cette royauté franque préchrétienne avait été faite pour l’enseignement chrétien, et la Vérité enfin révélée.
Le temps de la Restauration vient dans cette Royauté qui est présente dès maintenant dans l’incarnation de la Maison de France. Dans la confiance douce à la Providence, soyons brave et entreprenant. Le rétablissement de la chevalerie brave et charitable franque sera le fer de lance et le bouclier de notre bon Lieu-tenant de Dieu sur Terre.
Paul de Beaulias
Pour Dieu, Pour le Roy, Pour la France
[1] Tiré d’un missel carolingien, traduction du latin tirée de http://www.christ-roi.net/index.php/Pri%C3%A8re_des_francs. Une version différente existe dans le Missel noir rituel et vespéral aux éditions DFT.