J’ai fait un rêve…
Le 24 mars dernier, dans la foule venue manifester contre Hollande, Taubira et leurs œuvres, à quelque deux cents mètres du podium barrant l’avenue de la Grande-Armée juste à l’entrée de la place de l’Étoile, tout près de deux drapeaux tourangeaux venus du Lochois comme moi, tout proche de deux drapeaux bourguignons, presque à l’angle de l’avenue Anatole de La Forge, immobilisé, voire résistant aux courants qui se produisaient de temps à autres au rythme des slogans, des discours, du tintamarre de la sonorisation omniprésente, de l’impatience des uns, de l’enthousiasme des autres, je rêvais…
Les discoureurs encartés, les orateurs professionnels, les témoins de leur histoire personnelle, les organisateurs (forcément gentils…) se succédaient au micro, alternant leurs propos, leurs argumentations, leurs consignes… Sans écran géant à proximité, je ne voyais pas au-delà des quelques personnes qui m’entouraient, je crus pourtant entendre alors :
[…] Le 8 janvier dernier,j’ai appelé, hors de toute position politique, tous les Français à défendre les valeurs si chèrement défendues pendant des siècles par nos aînés et à faire connaître leur soutien aux défenseurs de la Famille et les droits de l’Enfant. Il en va de notre avenir. Les Français doivent montrer l’exemple aux autres nations. […] Le monde politique s’est saisi d’un sujet remettant en cause l’institution universelle et intemporelle qu’est la Famille, ce qui constitue une menace pour les fondements mêmes de notre société. L’humanité tout entière et, en particulier, notre histoire commune, celle de la France, s’est bâtie sur le seul socle familial. Mille ans de notre histoire reposent sur une famille dont je suis l’héritier, le fils aîné, et que j’ai l’immense charge de représenter auprès de vous. Or, certains souhaitent que l’institution du mariage, sur laquelle repose toute la structure familiale, soit banalisée au point de l’étendre aux personnes du même sexe et, par voie de conséquence, de permettre l’adoption et donc la filiation d’enfants résultant de cette union. Je vois que vous m’avez entendu, que vous avez répondu à mon appel, vous êtes là, regroupés et unis pour défendre les principes naturels qui nous ont fait naître, vous êtes là, sans doute plus d’un million, presque deux peut-être, ne vous laissez pas attirer par les sirènes habituelles. Nos hommes politiques ne peuvent prendre la responsabilité de redéfinir les lois immémoriales de la nature humaine. Certes, nous devons nous adapter continuellement aux évolutions de notre société mais certains principes immuables, tels que l’union d’un homme et d’une femme pour fonder une famille et éduquer des enfants, ne peuvent être remis en cause1.
Comment obtenir le silence pour écouter dans cette atmosphère bon enfant, pas encore dénigrée par les médias et les politiciens en place, mais la voix un peu rocailleuse, calme, posée finissait pas s’imposer… Et pour ceux qui disposaient d’un de ces écrans immenses, jalonnant l’avenue et transmettant ce qui se passait, cette tête inconnue retint l’attention et peu à peu, de proche en proche, le calme se fit. Permettez-moi de vous dire mon émotion face à cette manifestation ; mon émotion de vous voir tous, mères, pères, grands-parents, avec vos enfants, venus de tous les coins de France et réunis dans cet immense espace vers ailleurs… J’ai reçu comme chef de la Maison de Bourbon un héritage bien particulier : être le successeur des rois qui ont fait la France… Je ne peux donc pas rester insensible à ce projet de loi qui vous choque, je vous l’affirme et je vous comprends. […] J’ai reçu un héritage, que j’assume, mais je ne suis pas seul à le porter. Oui, vous, chers amis, vous le peuple de France, vous aussi c’est votre héritage, notre mémoire commune, nos fondations, nos racines. Autant que moi, vous y attachez cette importance particulière qui n’échappe à personne aujourd’hui. […] Aujourd’hui la France se souvient, la France s’anime, la France respire2. N’ayez pas peur ! En dépit de ce qu’il y a, au-delà de ce lieu, sur l’avenue des Champs-Élysées, ou juste derrière ces barrières, là, derrière moi, devant vous, des injustes et stupides réactions des forces de l’ordre, manifestement ébahies, trompées par leur hiérarchie, issue d’événements anciens et dépassés… Sachez que je ne me déroberai pas si vous m’appelez ; je suis prêt3…
Mais, bousculé par une espèce de matrone au bonnet phrygien, qui aussitôt, me rappelant à la réalité, me fit penser à une de ces tricoteuses des temps révolutionnaires, et ma rêvasserie cessa, le froid revint. Heureusement, pour la vue, elle était suivie d’une jeune fille au minois plus charmant, mais gâté, lui-aussi, par un autre de ces bonnets sanglants… Une Marseillaise retentit… Je décidai d’aller voir plus loin ce qu’il advenait, histoire de bouger, de me réchauffer et d’y échapper. L’avenue Carnot toute proche était barrée elle-aussi par des gendarmes et il était encore facile d’y circuler… Plus difficile de regagner mon point de départ. Mon rêve était passé, impossible. Dommage. Ah, Monseigneur si vous vous étiez présenté au micro du podium, peut-être qu’aurait retenti cet appel des Français… Vous aviez quand même deux cousins présents… Mais c’est vous le chef de Maison, et comme les gentils organisateurs, il va bien falloir parler politique, envisager la solution royale…
Pour lors, l’Armée est menacée de voir ses ressources en hommes et matériels drastiquement diminuées, les artistes privés de leur caisse d’entraide et d’assurance maladie pour cause de professionnalisme : la République n’aime pas les soldats, n’aime pas les artistes, elle n’en a pas besoin, comme avant elle n’avait pas besoin de savants. En fin de compte la République n’aime pas le peuple, elle le veut modifier pour qu’il soit conforme à ses caprices électoraux. Elle n’apprécie ni les riches, ni les pauvres, à moins qu’ils votent pour elle… Elle n’a des larmes de crocodile que pour ceux qui veulent détruire l’âme de la France ; celle dont vous assumez, Monseigneur, l’héritage. L’on évoque désormais un printemps politique. On dit même qu’il ne s’agit pas d’une alternance entre les pourris d’hier et les corrompus d’aujourd’hui, ni du remplacement d’un arrivisme brouillon par une ambition sans talent, mais véritablement d’un changement de système et une mise en congé de ceux qui y prospèrent. La dénaturation du mariage aura conduit à un divorce entre le Peuple et ceux qui le dirigent. […] Devant cette situation désastreuse, l’Italie a peut-être montré le chemin, et pour nos dirigeants, ceux d’avant, et ceux de maintenant, ce devrait être celui de la sortie ! C’est cette direction que la clameur de dimanche a clairement indiquée !4
Cela fait longtemps maintenant que la République va, de plus en plus vite, d’échecs en échecs, de dénis démocratiques en dénis de tous genres, niant les résultats contraires à ses vœux : référendums comme pétitions à l’image du non à la Constitution européenne ou du refus des 700 000 signatures adressées au Conseil économique, social et environnemental, à la botte des services du Premier ministre, pour qu’il se saisisse de la dénaturation du mariage et de ses conséquences sur lesquelles, vous, vous êtes prononcé justement. Elle nie encore ses devoirs régaliens pour assurer Justice et Sécurité aux Français. Vous seul, en arbitre suprême, en Roi, pouvez infléchir l’avenir.
Gérard de Villèle
1. Manifeste du 8 janvier 2013, voir sur le site et le numéro 49.
2. Déclaration de Reims, mai 2011. Voir nº 45 du Lien légitimiste
3. Entretien de Paris-Match, juin 2010. Voir nº 34 du Lien légitimiste
4. www.lesobservateurs.ch/2013/03/29/peupk-le-et-politique-le-divorce-du-printemps-français — Tribune de Christian Vanneste, député UMP, viré comme un malpropre avant les législatives de 2012.
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