La réputation, par Paul de Beaulias
Les sociétés d’honneurs (et d’honneur) se fondaient sur une réalité de notre nature : l’homme étant politique et social, il ne peut pas ne pas se soucier du regard des autres.
La réputation devient ainsi un bien objectivement précieux, se révélant un puissant moteur pour maintenir civilité et harmonie, et contenir la criminalité.
Le moteur est certes moins noble que la pure vertu chrétienne du sacrifice et du détachement du monde, mais n’oublions pas que le monde survit toujours même dans les sociétés les plus chrétiennes, et que le vieil homme n’est jamais loin. Il faut savoir le canaliser et l’amener à une conversion plus parfaite, en vue de lui faire accomplir sa mue dans le nouvel homme, le chrétien, celui qui suit le Christ, et l’imite.
Une société révolutionnaire et apostate, en phase aigüe d’apostasie, vire à l’individualisme et nie frontalement cette nature sociale de l’homme : elle veut détruire la réputation et l’honneur comme critère de valeur.
Le résultat est une décadence rapide vers un désordre violent et ouvert à tous les crimes : à son paroxysme, quand tout est inversé (comme lors de la Terreur) il n’y a plus d’inhibiteur social. On se fiche du regard des autres, peu importe la réputation : le tyran du moment approuve tout les yeux fermés et encourage activement au massacre, il suffit de se faire plaisir et de se servir ; puis tout ensuite sera oublié, forcément, vue les horreurs… ou pas – mais c’est une autre histoire.
Néanmoins, une fois la phase aiguë passée, et un semblant d’ordre de retour, la société d’honneur n’existe peut-être plus, mais la société des honneurs, elle, revient en force. Sauf qu’ici, à la différence d’une société saine, ces « honneurs » n’ont plus de lien avec la justice, c’est-à-dire avec la réalité des œuvres et de leur qualité.
Normalement, un diplôme vient sanctionner un certain accomplissement dans une discipline : aujourd’hui avoir le bac ne signifie plus rien, et la plupart des diplômes non plus.
Normalement, la « légion d’honneur » et autres distinctions sanctionnaient un service rendu au bien commun, aujourd’hui il semble que c’est l’inverse : la seule conformité à la religion révolutionnaire décide de l’octroi de ces honneurs, sans compter l’entregent (souvent maçonnique).
Normalement, une réussite « économique » signifie un talent et service rendu dans son domaine : aujourd’hui la plupart des succès économiques sont des illusions financières, starts-ups et autres nuées, complétement déconnectées de la réalité et dont le succès est conditionné à la conformité aux buts de la religion révolutionnaire (montez une entreprise verte, digitale ou transhumaine et tout ira bien).
Etc, etc.
Au mieux, nous revenons ainsi aux « sépulcres blanchis » des pharisiens : plus de parole donnée et tenue, plus de vérité, la réputation devient vide de sens et ne correspond plus à la réalité des œuvres et des êtres, mais simplement à la capacité de « donner le change », de paraître « pas trop mauvais », à l’aulne de critères faussés.
Aujourd’hui la réputation ne traduit plus rien dans l’opinion : c’est même l’inverse qui est constaté. Un type encensé par les médias et autres canaux officiels est certainement un corrompu de première classe. Un homme traîné dans la boue, comme un Didier Raoult, certainement quelqu’un de talentueux…
Exemple parfait de subversion révolutionnaire…
L’ancien ordre chrétien présentait un univers tout à fait différent : la réputation avait un sens, on y tenait, et elle se fondait sur une réalité.
Une « mauvaise réputation » suffisait à indiquer qu’effectivement la personne était à problèmes. A tel point que dans les décisions de justice, la « mauvaise réputation » était considérée comme un indice susceptible d’infléchir l’opinion des juges – car en pratique il était plus que rare qu’une mauvaise réputation existe sans bonne raison. Pourquoi ? Car le respect de l’autorité, la discrétion chrétienne, et la piété envers les fonctions faisaient, qu’a priori, on évitait de parler et de filer sur les défauts d’autrui. Donc si une mauvaise réputation, c’est-à-dire une certaine unanimité sur la valeur d’une personne par les personnes qui le côtoient – village, paroisse, etc – c’est qu’il avait fallu se mettre beaucoup de gens à dos, en dépit d’un environnement favorable aux valeurs chrétiennes de pardon et d’encouragement à la vertu.
Donc là aussi restaurons l’honneur et la réputation !
Non pas fondée sur l’opinion publique et les injonctions révolutionnaires, mais sur la vertu, l’imitation du Christ et les devoirs qui incombent à tout sujet du roi chrétien !
La gloire du roi et la gloire du Roi des rois n’autorisent pas à laisser bafouer leur honneur !
Ne nous battons pas pour notre honneur mais pour le leur.
Le véritable honneur est là : sacrifice et service de nos maîtres, dont la gloire retombe sur nous – sans que cela soit de notre fait.
Tout pour l’honneur !
Rien pour les honneurs !
Pour Dieu, pour le Roi, pour la France
Paul de Beaulias