Les morts pour la France, acteurs de notre présent
Chers amis,
Ce mois de novembre, je pense, comme tout le monde, aux morts de la première guerre mondiale. Ils ont eu leur petite place d’honneur dans le discours présidentiel du 11, encadrés par les résistants de la seconde guerre mondiale et les déportés. En somme, même au jour qui leur est consacré, les soldats sont mis au rencart.
Alors c’est aux soldats que je pense d’abord. Je pense à eux parce que la mémoire de cette guerre est toujours vive en nous, matérialisée par les monuments aux morts de nos communes, par les photos des disparus dans les albums familiaux, par les terribles découvertes que l’on fait encore sur les champs de batailles, de restes humains, français, anglais, américains ou allemands. Ces hommes, oubliés sur le terrain, toujours là, ont enduré toutes les privations pour l’honneur de leur camp. On peut avoir des conceptions différentes, mais il faut respecter ce sacrifice et laisser la première place à ces morts glorieux, le jour qui leur est dédié, au lieu de la minorer par l’évocation d’autres causes, comme la reconnaissance des coloniaux, des fusillés ou l’imminence du combat économique.
Le 11 novembre est le jour des soldats tombés pour la France, non pas seulement en 14-18, mais durant toutes ses guerres. Mon regard se tourne ainsi vers le passé de la patrie, et je songe à ceux qui, humbles ou grands, ont versé le sang, à Vouillé, à Roncevaux, à Poitiers, à Azincourt, à Marignan, à Rocroi, à Denain, à Fontenoy, à Valmy, à Austerlitz, à Waterloo, à Magenta, à Sedan, sur la Marne, à Verdun, à Dunkerque, en Indochine, en Algérie, au Liban et en Afghanistan. Je pense à ceux que la mort a laissé de côté et que les Français ont oublié, les grands invalides de guerre, qui mériteraient bien, eux aussi, sur leur tombe, la mention “mort pour la France”. Je pense à ceux qui ont lié leur destin à ces soldats, leurs épouses et leurs enfants, mais aussi les parents qui donnèrent leurs fils, les simples Français qui donnèrent leur or, ces femmes courageuses qui se firent infirmières dans les hôpitaux de campagne.
Mon coeur et mon intelligence se tournent vers eux et leurs descendants.
Je suis dans la peine et l’énervement lorsque j’entends le Président de la République et les membres de son gouvernement nous parler de ces morts glorieux, nous parler de patriotisme, et notamment ces dernières années de patriotisme économique, alors qu’ils n’ont jamais cessé de minorer le courage des combattants, de dévaloriser les notions de patrie et de nation, de ridiculiser ceux qui les défendaient, de traîner dans la boue les hommes de courage et de passer sous silence l’histoire de la France non plus seulement avant 1789, mais avant 1945. Je refuse à de tels personnages le droit de me parler de la patrie et encore plus de m’appeler au patriotisme, alors qu’ils en sont eux-mêmes les fossoyeurs.
Ils invoquent la nation quand elle leur est utile, après l’avoir déchirée. Ils se trouvent bien sots devant l’inutilité de leur appel. Alors je pense à Bossuet, qui écrivait : “Dieu se rit des hommes qui se lamentent des maux dont ils sont la cause”.
Mais laissons ces tristes sires de côté et retrouvons-nous ensemble pour penser à ceux qui donnèrent tout pour que nous vivions dans la paix et la prospérité. Notre douceur de vivre est le témoignage de l’utilité et de l’efficacité toujours actuelle de leur sacrifice.
A eux je dis : merci ! A nous je dis : soyons dignes !
Charles