Drame de Grasse, faux débat
Chers amis,
La semaine dernière un jeune lycéen faisait irruption dans son lycée, à Grasse, muni d’une arme de poing, et ouvrait le feu contre les élèves et le personnel de l’établissement, faisant plusieurs blessés.
Depuis cet affreux fait divers, les interrogations principales des commentateurs vont bon train sur la manière dont cette arme est arrivée dans la famille puis entre les mains du garçon, avec ses munitions. Derrière ces interrogations il faut évidemment voir l’éternel débat occidental sur la détention d’armes à feu par des particuliers, que certains voudraient interdire ou à tout le moins strictement contrôler.
Il m’apparaît que ce débat est déplacé. La question n’est pas de savoir comment ce garçon a pu se procurer une arme ou comment celle-ci a pu arriver dans sa famille. En effet, il aurait aussi pu commettre son forfait avec des couteaux de cuisine ou les chaises à armatures de métal de sa salle de classe qui, après tout, peuvent fort bien tuer un homme si elles sont manipulées avec rage et technicité.
La question est plutôt de se demander comment ce garçon a pu en arriver à ce geste désespéré et destructeur ? Etait-il si isolé, si rejeté, si détesté ou méprisé qu’il n’ait plus eu d’autre moyen d’expression que la violence assassine ? Notre société devrait alors plutôt se pencher sur la violence ordinaire à l’école, ses causes et ses moyens d’expression. Le harcèlement scolaire fat partie de cette violence. Il en est la forme la plus insidieuse et la plus perverse, car difficile à déceler et pourtant pouvant détruire psychologiquement un homme, le conduisant à l’acte irréparable du meurtre ou du suicide.
Nos écoles ne sont plus des lieux de paix, mais des espaces de violence et d’injustice dans des cas bien trop nombreux. C’est là qu’il faut porter nos efforts, et non sur la détention d’armes par les particuliers. C’est à la racine du mal qu’il faut frapper.
Si nous supprimons leurs armes aux Français, seuls les voyous continueront de s’en procurer, sans peine, par des voies parallèles. Et dans les écoles ou dans les entreprises et même dans les familles, ces faits divers horribles continueront de se commettre, sans armes à feu, par d’autres moyens.
Dans des Etats comme le Canada ou la Suisse, la détention d’armes est très largement répandue et la législation en la matière fort libérale. Le taux d’homicides par armes à feu y est parmi les plus faibles du monde occidental. Aux Etats-Unis où la législation est également libérale, le taux est l’un des plus élevés du monde occidental. Pour prendre le cas du Royaume-Uni, voisin, où la réglementation est plus restrictive qu’en France, la situation n’est guère meilleure. C’est pourquoi je suis porté à penser que le problème qui se pose à nous est d’ordre moral et culturel, et que des solutions techniques en matière d’armement ou de désarmement n’y changeront rien.
En somme, fichons la paix aux Français en matière d’armes et concentrons-nous sur le fond du mal : comment faire en sorte que nos établissements scolaires redeviennent des lieux de paix et d’instruction où chacun puisse trouver sa place ?
Charles