Jean-Paul Besse, Dom Besse. Un dominicain monarchiste
L’on nous rappelle souvent, à juste titre, que l’Occident civilisé doit beaucoup au monachisme et, entre autres, à l’Ordre de saint Benoît. Quoi de plus évident ? Les monastères ont été tout au long de nos siècles chrétiens des nids de sainteté et de lumières intellectuelles ou culturelles en tous genres. Ils dominaient, par leur aura, leurs environnements respectifs.
Récemment encore, aux XIXe et XXe siècles, de grandes figures monacales ont impressionné leurs contemporains, parmi lesquelles nous pouvons citer Dom Guéranger ou Dom Paul Delatte. Mais, pour l’heure, attardons-nous un peu sur l’atypique Dom Besse, encore bien connu des Limousins, des Corréziens et des Poitevins. Prenons, pour cela, l’opus de Jean-Paul Besse[1] consacré à ce « bénédictin monarchiste ».
Fils d’aubergiste, né en 1861, rappelé à Dieu en 1920, le Corrézien Dom Besse nous est principalement connu par son activité scripturaire et par ses amitiés hors du commun. Il fut l’ami de Charles Maurras et le directeur spirituel du second Joris-Karl Huysmans qui, converti au catholicisme et avide de vie monastique, se dote d’une demeure en face d’une église conventuelle. Le moine bénédictin fut l’une de ses sources d’inspiration, visible en certains personnages d’En route, Là-bas, Oblat, La Cathédrale. Des romans intensément chrétiens, à lire absolument.
Il peut paraître curieux qu’un moine puisse être si impliqué dans la vie culturelle et politique d’un pays donné[2] sans contrevenir à ses vœux. Pourtant, Dom Besse a réussi, parallèlement à ce zèle temporel, des fondations spirituelles pérennes et merveilleuses, et des études d’histoire de l’Église pour le moins précises, sur des sujets tout sauf généraux.
Avant d’en arriver là, retraçons rapidement son parcours. C’est en 1881 qu’il entre au noviciat de l’abbaye Saint-Pierre de Solesmes, alors âgé de vingt années. Sa profession a lieu le 11 juillet 1883 : il y choisit le prénom de Martial, évangélisateur du Limousin. Enfin, il est ordonné à Tulle en 1886. L’exemple du cardinal Pie semble avoir beaucoup compté dans sa formation, à tel point qu’il lui consacra au début du siècle dernier une biographie élogieuse. C’est d’ailleurs à Ligugé, près de Poitiers, que se déroule une bonne partie de sa vie recluse, de 1885 à 1894. À cette date, Dom Besse est envoyé à Saint-Wandrille de Fontenelle, en Normandie, afin d’y refonder un monastère. Accompagné de Huysmans, il aurait voulu faire de ce lieu un centre pour les écrivains et artistes catholiques. Malheureusement, ses supérieurs ne lui permirent pas de réaliser ce projet, le destinant à rejoindre l’abbaye Saint-Dominique de Silos, en Espagne, durant trois années, avant de rentrer définitivement à Ligugé en 1897. Il y connut les affres de l’exil imposé par les mesures anticléricales de la IIIe république, lançant avec confiance (p. 33) : « Les moines ont dans les veines quelque chose d’éternel. Abattus, leurs monastères repoussent. Ce sont les chênes de Dieu. Confiance ! nous reviendrons plus nombreux, épurés par l’exil, mûris par l’épreuve. Puissions-nous être plus vaillants et plus saints ! Et l’Église aura le dernier mot. » Il fait ainsi la connaissance de Chevetogne, en Belgique, où il est d’ailleurs enterré…
Cette vie, exigeante et édifiante, nous permettra de nous rappeler en quoi nos rois seraient plus capables qu’une république, en France, de restaurer la Chrétienté et de protéger les droits des chrétiens. Ces figures nous manquent, mais continuent de nous montrer un chemin : la voie étroite.
[1] BESSE (Jean-Paul), Dom Besse. Un bénédictin monarchiste, Versailles, Éditions de Paris, 2005, 100 p., 14 €.
[2] Il écrivait (p. 10) : « Chez nous, le nationalisme et le catholicisme convergent à cette fin : rendre la France chrétienne à elle-même. »