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La lâcheté du chef et son parangon, Pilate. par Paul-Raymond du Lac

Pilate occupe une place particulière dans notre Foi catholique : il est après tout le seul homme cité au Credo qui ne soit ni Jésus ni Marie, et il est surtout le seul réprouvé présent. On aurait pu imaginer y voir mentionner Judas, qui mérite bien une damnatio memoris lui aussi, mais non, c’est bien Pilate qui se trouve ici.

Ce n’est pas seulement pour situer chronologiquement les événements de la Passion, mais bien pour rappeler la responsabilité insigne et profonde de ce Pilate dans toute cette affaire.

C’était lui le chef, c’était lui le juge, c’était lui la force qui aurait pu faire justice, c’était lui l’autorité devant laquelle les juifs eux-mêmes ne pouvaient pas passer outre.

Judas est coupable de trahison, mais si Pilate avait fait sont travail, le péché de Judas n’aurait pas eu autant d’effet.

Caïphe, Anne et les autres juifs étaient coupables d’un complot sordide, mais si Pilate avait fait son travail, leurs péchés n’auraient pas eu d’effet.

Hérode est aussi coupable de meurtre, adultère et d’esprit mondain, mais si Pilate avait fait son travail, Jésus n’aurait même pas paru pendant la Passion.

Pilate est ainsi horriblement responsable de la mort de Dieu… Pourquoi sa responsabilité est encore bien plus engagée que ce que l’on peut croire ? Car non seulement il pouvait faire justice, mais il le devait ; mieux, il savait que Jésus était innocent. Le sachant, il ne peut pas évoquer l’excuse de l’ignorance, ou des apparences trompeuses : tout indique que Jésus est innocent. Les témoignages sont contradictoires, et Jésus montre bien à Pilate qu’il n’a aucune velléité de rébellion politique. La cabale des juifs lui est manifeste, lui habitué à ces Juifs querelleurs et ombrageux, qui n’aiment pas qu’un de leurs coreligionnaires souligne leurs défauts.

Pilate est ainsi un contre-exemple parfait de l’anti-chef, de l’anti-roi, du mauvais dirigeant, du mauvais justicier.

Il sait que Jésus est innocent, et il a le pouvoir de faire justice… Au lieu de cela, il cède à la faiblesse… Mais il fait pire : il ne fait pas que se désintéresser de Jésus, et de laisser les Juifs le massacrer. Ces derniers le refusent d’ailleurs : ils ne veulent justement pas prendre cette responsabilité, et veulent absolument condamner Jésus selon les règles légales. La sentence de mort ne peut être dite que par Pilate, alors ils veulent lui forcer la main.

Pilate fait pire : au lieu de se désengager, convaincu de l’innocence de Jésus, il va essayer de le sauver…en vexant encore plus la justice, par lâcheté, esprit mondain et faiblesse de caractère – lui cet officier romain qui, dans son histoire, n’a certainement pas hésité à ordonner le massacre de peuplades entières, l’assassinat politique, et le pillage, quand cela faisait plaisir à l’empereur, ou allait dans son intérêt et l’intérêt de Rome et de ses soldats. Mais pour sauver un pauvre innocent visiblement inoffensif, et selon toute vraisemblance un homme de Dieu, favorisé du Dieu des Juifs, alors  il n’est plus qu’une veule femmelette… Il ne craint même pas le courroux du Dieu, vengeur des Juifs, ni de maltraiter, et tuer, son Christ, malgré les protestations de son épouse à qui le bon Dieu a envoyé des avertissements par des rêves…

Non, Pilate fait la pire chose qui soit, pire que même l’indifférence froide du salaud consommé, de celui qui n’a plus de cœur.

Il va essayer de sauver Jésus, non pas, tout simplement, en exerçant ses prérogatives et son pouvoir, mais en mentant et trichant.

Il va d’abord le faire fouetter, soi disant pour amadouer les juifs ! Cet acte est pourtant terrible, et dès ce moment-là, la Passion est bouclée, on peut le dire, Pilate s’est pris dans un engrenage infernal dont il ne reviendra plus. L’engrenage avait certes commencé auparavant : il avait déjà commis lâcheté sur lâcheté, en le renvoyant chez Hérode, pour se débarrasser du problème, puis en étant négligeant en le laissant à la garde de soldats absolument iniques, qui le maltraitait comme un bouc émissaire.

Mais il aurait pu encore se rattraper, il avait fauté, mais il n’avait pas encore blesser la justice, ni la vérité.

Quand il ordonne de faire fouetter Jésus, c’est fini : il fait comme si Jésus était coupable, puisqu’il le condamne au fouet. Certes, c’est pour tenter de lui sauver la vie, mais il se place quand même du côté des juifs : alors qu’il sait que Jésus est innocent, il se met du côté du mensonge et fait comme s’il était coupable. Et dans ce mensonge premier, il va ensuite tenter de tricher et tricher pour forcer la libération de Jésus, contre toute justice et vérité.

Après l’avoir fouetté, et voyant que cela ne marche pas, il fait encore pire : il le met à la même enseigne que l’horrible criminel Barabas. C’est la même chose : Pilate sait que Jésus est innocent, et pourtant il use de la coutume de libérer un criminel à Pâques, qui n’est en usage que pour les coupables. Il annonce encore que Jésus est coupable alors qu’il connaît son innocence.

Et tout cela ne sauve pas Jésus.

Au lieu de se rattraper in extremis, de faire enfin justice, d’affirmer l’innocence de Jésus, de le protéger et le panser – pour se racheter de ses affreuses actions de mauvais juges – il se lave les mains, voulant faire croire qu’il se dédie de la responsabilité. Mais non, il ne se dédie de rien, c’est lui et personne d’autre qui a ordonné la mort d’un Dieu, c’est lui qui le responsable de l’exécution du Christ. Cela se voit d’ailleurs quand les juifs ne peuvent pas retirer le titulum où est écrit, Jésus Roi des juifs, et qu’ils demandent à Pilate, qui refuse. Cela se voit encore quand Nicodème demande l’autorisation d’inhumer le corps de Jésus : c’est bien à Pilate qu’il va demander l’autorisation, et qui lui octroie. L’homme tombe du côté où il penche, malheureusement.

Donc c’est lui le responsable.

Il était chef.

Il pouvait avoir toute la bonne volonté qu’il voulait, avoir essayer de sauver la peau d’un innocent, mais il reste le plus coupable de tous car justement il avait le pouvoir et le devoir d’arrêter l’injustice, et de sauver Jésus, sans mentir et sans jouer le jeu des mauvais.

Nous voyons combien le chef a une responsabilité grande, et combien le chef doit prendre sur lui les péchés de ses subordonnés, quand il ne fait pas bien son travail.

Pour Dieu, pour le Roi, pour la France

Paul-Raymond du Lac

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