Saga autarcie : l’union autour du Roi !
L’étude suivante se compose de 18 articles se suivant, à paraître à rythme hedomadaire. Articles précédents
Article 1 de la saga: L’autarcie au Japon ou le Sakoku 鎖国, première approche
Article 2 de la saga: Les origines de l’autarcie nipponne
Article 3 de la saga: Les origines du mot d’ « autarcie » au Japon
Article 4 de la saga : Autarcie, question de point de vue
Article 5 de la saga : L’autarcie, politique pratique pour la protection du pays, tout simplement
Article 6 de la saga : De l’autarcie à l’ouverture du pays – toujours pour la protection du pays et pour le service du divin
Article 7 de la saga : L’influence de la pensée autarcique en Europe : Fichte contre la pensée kantienne
Article 8 de la saga : Chauvinisme et pensée du Joi à la fin de l’ère Edo
Article 9 de la saga : L’autarcie comme prolongement du chauvinisme légitimiste, réflexion sur la souveraineté
Article 10 de la saga : Au centre et à la source, le Roi, autarcie et chauvinisme n’étant que des politiques pratiques.
Article 11 de la saga : La pression extérieure et la non-évidence de l’ouverture du pays : la signature des traités
Cette époque donne la vision d’une union nationale réelle autour de l’essentiel – le roi, la vérité, la paix et la conservation de sa culture, le chauvinisme – qui peut malgré tout donner lieu à des oppositions sur l’accessoire – le degré de chauvinisme, les moyens d’atteindre les objectifs, etc :
« L’acmé de la crise du Bakumatsu se situe durant l’ère Bunkyu (1861-1864), où s’opposent le partie de la vénération du Roi et de l’expulsion des étrangers, qui vise à renverser le Bakufu, et le partie pour la fusion de la Noblesse et de la Chevalerie, qui cherche à procéder à une restauration du gouvernement royal. Mais comme nous l’avons vu jusque-là tous les Japonais de l’époque étaient joi, et vénéraient le Roi, tout en acceptant de plus que le Bakufu continua d’exister, la différence ne se faisant que dans le degré de l’ardeur dans tous ces éléments. Le point d’achoppement surgit à l’occasion de la crise extérieure, sur le sujet de l’acceptation ou non du traité de commerce, et sur la place de la cour dans le gouvernement. »[1]
L’intensification de la pression extérieure fait élever de plus en plus de voix pour la fin de l’autarcie, dans un but complétement chauvin, dont voici quelques exemples :
« L’avis de Kachi fut demandé par l’Ancien Ogasawara Nagayuki suite à l’incident de Namamugi (celui où des chevaliers du clan de Satsuma assassinèrent des Anglais qui avaient traversé à cheval une procession du Seigneur du clan, Tsugaru Hisamitsu) suite auquel l’Ancien avait du payer à l’Angleterre une compensation de 100 mille livres. Kachi émit l’idée que pour permettre une véritable union nationale du pays, il fallait condamner les agissements de l’Angleterre et rompre fermement le traité commercial, et, si l’Angleterre ne coopérait pas, ouvrir les hostilités aussi sec face aux bateaux anglais qui ne respecteraient pas l’interdiction. La défaite inévitable du Japon permettrait alors de faire prendre conscience au peuple que dans l’état actuel des choses le Japon n’avait aucune chance de vaincre les puissances étrangères.
L’intention est claire : quitte à perdre, il est nécessaire de mobiliser tout le pays face à l’extérieur, et peu importe l’ouverture ou la fermeture du pays, tant que l’on parvient à cette union nationale, avis qui démontre en plein la pensée joi de Kachi. » [2]
En bref, l’union face aux barbares pour protéger son pays passe par la prise de conscience générale qui désactivera les conflits de clochers – entendez de clans, dans cette loi bien humaine où c’est toujours avec les gens de qui on est les plus proches avec qui on se chamaille le plus.
Cette idée chauvine, au départ purement défensive, commence à montrer des développements différents, rappelant qu’elle ne signifie pas nécessairement une autarcie, mais aussi comme une expansion du système de vassalité :
« Ensuite, il [Kondo Chojiro] énonce sans hésitation que la constitution du Japon ne consiste pas simplement dans la « fermeture des ports » mais que, à l’instar des vastes sorties outre-mer existant depuis l’antiquité, dont le sakoku des Shogouns de Tokugawa ne fut qu’une pause nécessaire face à la situation du temps, Ieyasu lui-même aurait sans aucun doute, s’il avait vécu un peu plus longtemps, « fait flotter le drapeau du soleil levant sur les cinq continents, et il aurait été inéluctable que même ce royaume d’Angleterre enverrait des présents à notre Cour à l’heure qu’il est ». Il explique ensuite que la décision de suivre de la voie du Sakoku provient du trouble des âmes provoqué par l’enseignement chrétien, et la crainte de devoir faire face à une situation incontrôlable et imprévisible. »[3]
L’idée trouve sa source dans la vision barbare/civilisation asiatique, qui pourrait avoir des connivences avec la conception de civilisation des antiques grecs ou romains, avec cette particularité que, loin d’impérialisme du pur rapport de force, l’expansion se fait dans le cadre souple de relations vassaliques, avec déjà une distinction entre une grande Asie, la civilisation, et le reste, barbare envahissant :
« Ce genre d’opinion de Kondo, qui a pour toile de fond l’autorité croissante du Tennô, vise, par l’acceptation du traité de commerce, à renforcer la force militaire du pays et sa richesse, développer sa puissance navale, dans ce qu’on pourrait appeler un grand joi, afin en dernière instance pouvoir soumettre la Corée puis la Chine des Quing, afin de constituer un grand empire est-asiatique dans la tradition vassalique asiatique, où le Japon serait hégémonique. Il inclut dans son raisonnement la menaçante Russie, et développe une expulsion des étrangers au niveau de l’Asie de l’est dans son ensemble. »[4]
[1] Ibid, p.75 « 幕末の激動は、分久期(一八六一~一八六四)が沸点であるが、倒幕をめざす尊王攘夷派と王政復古を図る公式合体派の抗争とされてきた。しかし、いままでも見てきた通りに、実際には当時のほぼすべての日本人は攘夷思想であり、尊王であり、濃淡の差はあっても幕府の存続を肯定していた。その違いは、対外的危機にあたって、当面の通商条約を容認する可否なか、朝廷の位置づけをどうするかにあったのだ。 »
[2] Ibid, p.77/78 1863 « ところで、勝はこの年の三月、前年の生麦事件(薩摩藩士が、国父・津軽久光の行列を騎馬で横切ったイギリス人を殺傷した事件)の賠償金十万ポンドを五月にイギリスに支払うことになる老中・小笠原長行に意見を求められた。このとき勝は、挙国一致を実現するために、イギリスの暴挙を咎めて断然と通商条約を破棄し、イギリスが応じない場合は戦端を開き、天下の人民に勝算がないことを悟らせることを主張する。その真意は、たとえ日本が負けたとしても国内の真の奮発の契機となり、それによって攘夷だの開国だのとの対立もなく、挙国一致を成し遂げられる―と。勝自身が暴言と認めているこの意見は、挙国一致をめさずためとはいえ、勝の攘夷思想を裏付けるものだ。 »
[3] Ibid, p.98 近藤長次郎 lettre à 島津久光« つぎに、日本の国体は「攘夷鎖港」ではなく、古来より広く海外と従来しており、鎖国は徳川将軍家によってやむをえず祖法化されたもので、家康がもう少し長生きしていれば、「今日朝日旗を五大州ニ翻し、今の英国なども来貢せしむる事必定也」と言い切る。また鎖国に踏み切ったのは、キリスト教の布教によって人心が擾乱させられ、不測の事態が生じることを恐れたためであると説明する。 »
[4] Ibid, p.100 « このように、近藤の主張は、天皇の権威向上を背景に、通商条約容認とともに富国強兵・海軍振興に名を借りた大攘夷主義であり、まずは朝鮮、その後の清の征服によって、東アジアに覇を唱える華夷帝国の形成にあった。しかも、その先にはロシアとの対決も視野に入れており、東アジア的規模での攘夷論だ。 »