Histoire

Il y a 70 ans, rien n’a changé pour le roi sacré nippon

Ce papier répond et complète l’article de notre respectable aîné Daniel de Montplaisir. Il y a 70 ans, Hirohito “renonçait” à son ascendance divine

Les Paroles du roi sacré font historiquement au Japon offices de lois, et donc chacune de ses déclarations, rares, sont essentielles et clefs. La dite « déclaration d’humanité » en fait partie, mais ce qui en fut dit et ce qui en est dit au Japon en partie et de façon écrasante ailleurs est essentiellement faux. Le Roi sacré reste sacré, puisque cela est sa nature, et une parole ne saurait changer la nature. Il suffit pour s’en rendre compte de revenir au texte de l’édit Royal, qui n’est pas allé contre cette nature.

Avant d’aller plus avant, il est nécessaire de rétablir l’exactitude face à plusieurs imprécisions, qui font accroire que le Roi sacré aurait « abandonné » son ascendance divine, comme si cela était possible d’ailleurs, de façon volontaire et dans la résolution de fonder un nouveau Japon en rupture avec le précédent, autant de présupposés faux dans le fond, et répandu tant par l’occupation américaine que les médias de l’époque forcés de collaborer, puis par une majeure partie des intellectuels post-guerre, souvent bien marxisés, et ne pouvant vivre et manger qu’en restant dans le cadre idéologique imposé par l’étranger, sans compter le plaisir malsain de vengeance que certains portaient.

À notre connaissance, il n’existe presque pas en langue non japonaise d’études vraiment fiables sur le sujet, et à par aller voir les originaux, on est condamné à répéter la doxa admise et essentiellement fausse.

Il faut d’abord corriger trois points, qui incitent à se méprendre sur cet édit.

Premièrement le verbe « abandonner » ne se trouve pas dans l’original, chose que, sans même vérifier dans le texte, nous pouvons deviner puisque l’expression « mi-   », à la forme de politesse respectueuse, ne s’emploie qu’envers plus respectable que soit, et il n’est pas possible que le Roi utilise cette expression pour parler de lui-même.

Deuxièmement, l’appellation « déclaration d’humanité » est anachronique puisque inventée telle par les médias et les chroniqueurs, sans fondements réels, et dans la claire attention de faire dire ce que l’on voulait lui faire dire, en faisant croire que la partie incriminée constituée l’essentiel de l’édit. Il existe deux titres officiels en réalité, un qui se trouve dans les annales gouvernementales (Sur la promesse réalisation du grand dessein de renouveler le destin de notre pays dans lequel Nous et le peuple ne faisons qu’un) et l’autre dans le livre des lois (A propos de la construction du Japon nouveau en ce premier de l’an, en se fondant sur les cinq serments du Tennô Meiji, avec l’effort de tous les sujets, peuple et fonctionnaires, en respectant le pacifisme)[1]. Dans les deux cas, nous notons que le sujet principal ne concerne absolument pas un « abandon de l’ascendance divine », mais avant tout la reconstruction du Japon au sortir de la guerre, sur tous les plans.

Troisièmement, la partie incriminée, que nous traduisons un peu plus bas, ne consiste que pour un sixième environ de l’édit complet, preuve supplémentaire que cet édit ne concerne pas principalement le seul point qui a été retenu par la suite.

Une fois cela précisé, attardons-nous un instant sur la chose qui serait nié, la fameuse notion d’arahitogami. Une traduction adéquate de ce mot serait « lieutenant de dieu sur terre », c’est-à-dire tenant lieu de dieu sur terre. Le Roi sacré nippon, s’il fut sacré de tout temps, ne fut jamais un dieu lui-même, mais tenait lieu de dieu sur terre, et, de plus, reliait la monde d’ici-bas avec le monde divin, dont l’ascendance divine ne correspond d’ailleurs pas à une simple ascendance humaine telle qu’on l’entend : dans les mythes nippons, le passage générationnelle du monde divin (la déesse solaire) à l’ancêtre humain du premier Roi (Jinmu) ne se fait pas par engendrement, mais pas création, si l’on se réfère aux textes, et laisse ainsi une possibilité à une interprétation qui serait chrétienne de la dynastie, entre avant et après la chute, entre le passage de l’immortalité à la mortalité, et donc au cycle des générations, des naissances et des morts.

Il est ainsi faux de dire que le Roi nippon était un dieu, de tout temps, et en particulier avant-guerre. Il n’y avait donc rien à nier sur ce plan. Il est toutefois vrai que certains zélés doctrinaux, en particulier dans l’éducation scolaire, et une influence chrétienne de la conception de Dieu le Père, d’un dieu Transcendant, tout puissant et assez éloignée de la conception animiste de la divinité nipponne ont eu tendance à entretenir un flou grandissant, et parfois volontaire, à partir de la fin des années 30, ce qui rend compréhensible aussi l’émergence de ces accusations fausses sur le fond.

Enfin, le texte incriminé lui-même ne se traduit pas aussi simplement par une simple négation de le caractère de lieutenant de dieu sur terre du Roi, et la structure même de la phrase, s’il n’est pas impossible de la comprendre dans ce sens-là, peut tout aussi bien se traduire de la façon suivante, la négation ne portant alors que sur la soumission du monde au Japon, et non pas sur toutes les autres subordonnés qui sont éloignés de l’élément négateur et le plus vraisemblablement dans un rôle explicatif, là simplement pour expliquer les raisons de cette croyance de cette mission divine de soumettre le monde, mais sans les nier formellement:

 « Le lien entre Nous et le peuple n’existe pas simplement par les histoires divines et les mythes mais aussi par une confiance et une tendresse respectueuse complètes et mutuelles. Il est tout aussi faux et illusoire de dire que le destin de notre pays est de soumettre le monde, du fait que le Roi est le lieutenant de Dieu sur terre, et que la nation nipponne est supérieur aux autres nations. »[2]

Il est donc faux d’interpréter unilatéralement ce passage comme la négation des histoires divines, du caractère sacré du Roi, la phrase étant en elle-même ambiguë, mais selon toute vraisemblance devant se traduire par notre proposition, considérant le rythme habituel de la phrase japonaise, et la culture royale. Il ne fait aucun doute que le Roi Shôwa (qu’il ne faut d’ailleurs pas appeler par son prénom, qui marque en soit tout une conception moderniste et irrespectueuse de la fonction royale au Japon, le prénom se dit d’ailleurs historiquement aussi nom tabou) devait subir des pressions américaines pour nier ce que les occupants considéraient comme les vecteurs de la ténacité et du courage nippon, il employa donc un langage royal, toujours difficile d’interprétation, à double entente, pour éviter le courroux de l’occupant sans blesser la nature et la mystique royales, dans un exemple éclatant d’agilité toute nippone qui sait s’adapter sur les formes, sans transiger sur le fond. Les américains purent récupérer et tordre l’édit pour leur propagande, mais, au fond, cela s’oubliera, et en revenant au fond, on se rend compte que cet édit ne dit rien de nouveau sur la doctrine royale du Japon.

Cet exemple nous apprend l’intransigeance et la souplesse, et nous donne un exemple parfait de manipulation médiatique que nous connaissons par cœur chez nous.

Un dernier point, enfin, le Japon d’avant-guerre se trompa lourdement dans son alliance germaine, certes, au point que ce soi-disant allié fit parvenir des armes à ses ennemis chinois, et ne fournit aucune aide durant la guerre. Il reste néanmoins faux d’assimiler le Japon d’avant-guerre et l’Allemagne nazie, aussi éloignée qu’un athée et qu’un croyant, et il n’y avait rien d’idéologique dans cette alliance, mais cela est une autre histoire, à conter en une autre occasion.

Paul de Beaulias

Pour Dieu, Pour le Roi, Pour la France



[1]題名に準ずる「件名」は「新年ニ当リ誓ヲ新ニシテ国運ヲ開カント欲ス国民ハ朕ト心ヲ一ニシテ此ノ大業ヲ成就センコトヲ庶幾フ」(官報目録)及び「新年ヲ迎フルニ際シ明治天皇ノ五箇条ノ御誓文ノ御趣旨ニ則リ官民挙ゲテ平和主義ニ徹シ、新日本ノ建設方」(法令全書)

[2]朕ト爾等国民トノ間ノ紐帯ハ、終始相互ノ信頼ト敬愛トニ依リテ結バレ、単ナル神話ト伝説トニ依リテ生ゼルモノニ非ズ。天皇ヲ以テ現御神トシ、且日本国民ヲ以テ他ノ民族ニ優越セル民族ニシテ、延テ世界ヲ支配スベキ運命ヲ有ストノ架空ナル観念ニ基クモノニモ非ズ— 新日本建設に関する詔書より抜粋

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