Social et économie

Les limites du « devoir d’état » au XXIe siècle

Le devoir d’état est un concept catholique de morale simple à comprendre : il désigne les charges spécifiques incombant à chaque « état » de vie : enfance, état adulte, paternité ou maternité, état marital, sacerdoce, vocation, profession, etc. Nous remarquons immédiatement que le concept a quelque chose de souple et d’adaptable. Jusque-là tout va bien.

Mais certains se seront peut-être aperçus que ce concept, en pratique, est souvent utilisé pour exhorter les travailleurs à remplir des devoirs professionnels ou les « citoyens » à se soumettre aux volontés de l’État — en particulier depuis le XXe siècle lorsque, pour les hommes, verser leur sang pour la République anti-française a pu être présenté comme le « devoir d’état » suprême du citoyen… Première limite !

Par ailleurs, nous l’avons vu, les « métiers » divers sont assimilés à des états et les devoirs sont spécifiques à chaque métier. C’est une bonne chose, mais plusieurs problèmes se posent en 2021.

Une jeune génération bloquée entre plusieurs « états »

Le premier problème concerne la génération perdue, née dans les années 1990 et 2000, qui, au fond, ne connait plus aucun « état de vie » clair. Expliquons-nous : beaucoup sont maintenus dans une enfance qui n’en finit pas en raison d’études inutiles qui durent outre mesure et allongent indéfiniment un « état » d’étudiant, souvent ni vraiment choisi, ni vraiment voulu (et de plus en plus vicié par des systèmes scolaires et universitaires décadents).

Pour les mêmes raisons, d’autres cumulent les « états ». Un exemple caricatural, mais tout à fait véridique : je connais un père de famille catholique, analyste dans une grande structure et journaliste bénévole. Il est triplement diplômé de master (pour trois spécialités : l’histoire, les mathématiques et le commerce) et aujourd’hui doctorant en histoire du droit… C’est ridicule ! Ce que je dis là n’est pas contre lui, au contraire, car il fait tout de front et s’en sort, sans être pourtant un surhomme. Autrefois, il aurait été impossible de mener tout cela à bien et en même temps ! Ne disait-on pas : qui trop embrasse mal étreint ?

Tout cela démontre à quel point les « états » sont vidés de leur substance et à quel point le « niveau » a dégringolé.

La disparition des métiers

Dans un second temps, il faut noter la disparition des métiers. Les « grands groupes » sans visage et sans plus de nationalité pullulent. Ils offrent des postes en pléthore, très bien, mais à quel prix ? Le salarié — qu’il soit un manuel ou un intellectuel — ne sert plus le bien commun et se voit traité comme un robot, dont les tâches (le plus souvent effectuées à la chaîne) ne constituent malheureusement pas un métier — en cause, la spécialisation extrême, le taylorisme intellectuel, la déresponsabilisation, l’endormissement par l’excitation de l’ambition ou encore le faux confort qui endort les consciences…

Avec la « digitalisation » et la massification du travail à la maison, nous avons la preuve que les métiers disparaissent, et qu’une grande partie des « travailleurs » font de faux métiers — d’une pénibilité morale d’autant plus terrible qu’elle se trouve voilée par le confort matériel et la satisfaction des petits besoins primaires et d’amour-propre qui endorment les âmes et confortent les victimes dans le consentement volontaire — : en effet, si tant de « métiers » peuvent être faits en ligne, cela ne démontre en aucun cas un progrès mais, au contraire, à quel point les relations de travail et les contenus des « emplois » sont devenus inconsistants, irréels, virtuels… Le boulanger qui fait le pain que vous mangez ne pourra jamais faire cela !

Obéir à des organismes foncièrement amoraux et injustes ?

Certes, il est possible d’être fidèle et obéissant à un chef que l’on côtoie chaque jour et à qui l’on doit des choses, mais dans les « grandes entreprises », les chaises musicales sont la règle et le bougisme fait que les chefs, quand ils existent encore (ce qui est rare), sont évacués régulièrement. De plus, une bonne partie des injonctions professionnelles d’aujourd’hui n’ont plus rien à voir avec le métier d’origine, mais plutôt avec les dernières idéologies à la mode !

En outre, très souvent, on ne choisit pas, ou pas totalement sa profession (concurrence extrême, fort taux de chômage, etc.). Pourtant, on fait semblant de croire que tout est consenti, accentuant ainsi l’asservissement des esclaves 3.0 du nouveau monde païen…

Alors, quel est le devoir d’état pour tous ceux que nous avons décrits ou évoqués ? Obéir à tous les diktats d’entreprise ? Aux injonctions pseudo-morales données par « personne », puisqu’il n’existe plus ni chef, ni direction ? Se comporter en esclave ou en robot au service de « tâches » saucissonnées et inutiles à la société ? Demain, aller se faire trucider sur injonction de la République ?

Conclusion

Il nous faut revenir à l’essence du devoir d’état, c’est-à-dire à nos états primordiaux, si l’on peut s’exprimer ainsi. Dieu, le Roi et la famille, puis la corporation ! Le Roi n’est pas l’État, exit l’état, et, bien sûr et plus encore, exit la République ! Notre premier état, c’est d’être catholiques et fils de Dieu : cela conduit tout le reste. Avant tout et en tout, catholiques toujours ! Notre second état est celui de sujet du roi de France, seule autorité légitime et incarnée, d’où peuvent venir les devoirs issus de notre condition de sujet, comme le combat ou la guerre. Notre troisième état est celui qui vient de notre condition de vie : célibataire, marié, vocation religieuse. Là se trouvent aussi, pour certains, les devoirs incombant au statut d’héritier d’une tradition familiale : noblesse oblige ! Notre quatrième état est enfin constitué par notre « métier », notre « corporation ». En cas de conflits, il s’agit de prioriser en fonction des devoirs d’état supérieurs (1, 2 et 3).

Nos enfants auront peut-être la chance d’avoir des états de vie clairs, avec des chefs et des bergers sûrs. Prions pour cela ! Mais ce n’est malheureusement pas notre lot, alors il nous faut nous adapter à cette situation inconfortable bien qu’autorisée par la divine Providence… Agissons pour la restauration d’une société ordonnée, où les divers ordres et états simplifiaient la vie de tous et la réalisation du devoir moral chrétien !

Paul-Raymond du Lac

Pour Dieu, pour le Roi, pour la France !

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