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Qui aime bien châtie bien !, par Paul-Raymond du Lac

Notre époque a perdu de vue la pratique juste de la charité : elle aurait tendance à croire que charité signifie tout donner, n’importe comment, de façon désordonnée, et de façon matérielle. Elle oublie systématiquement la charité qui consiste à donner la vérité, et à permettre la réforme, à notre mesure.

Cette charité dégénérée, qui équivaut au niveau politique au socialisme, au communisme, au rousseauisme béat, et au libéralisme – chacun sous un aspect différent, exagérant un aspect d’une œuvre corporelle de miséricorde, en oubliant Dieu, évidemment, mais aussi le bon sens commun.

Non, nous savons, et c’est toujours une grande épreuve, qu’il faut parfois être ferme, et sévère, mais sans être dur ni rude.

Nous pouvons être charitable dans la fermeté d’autant plus que nous-mêmes nous avons eu la chance d’avoir de bons instructeurs, de bons parents, de bons directeurs fermes et sévères :

«La meurtrissure qui déchire la chair guérit le mal ; de même les coups qui atteignent au fond des entrailles.  » (Pv, 20, 30)

Ah, combien les coups qui atteignent nos entrailles, et font si mal, sont ceux qui sont le plus purificateurs de nos souillures intimes, qui sont le scalpel qui coupe les nœuds les plus profonds que nous en voulons pas voir.


Et tellement pas voir, qu’il nous faut l’aide charitable de nos chefs de tout ordre, de nos amis, pour nous aider à trancher ce lien, et parfois, il faut savoir dire la vérité et donner les possibilités de la faire entendre et comprendre, tout en sachant que cela sera mal accepté.

Quand Jésus dit « Arrière Satan! » à Pierre qui veut le détourner de la Croix, Pierre fur certainement blessé, mais son amour, tout de suite, lui permit de surmonter cette blessure, faite pour son bien : cette vérité dite ne fut-elle pas pour lui, bien plus tard, au moment de sa chute, la corde de salut, avec le regard doux de son maître, pour sortir de son trou de péché ?

Plus notre autorité est grande, comme des parents sur de petits enfants, plus notre prochain et proche et encore malléable, comme un enfant, plus notre responsabilité charitable dans le châtiment est grande. Salomon disait déjà, à une époque païenne où tuer un enfant n’était pas chose exceptionnelle – quoique peut-être plus exceptionnelle que notre époque contemporaine de meurtres de masse par l’avortement – et la sagesse préparant l’arrivée du Christ dit ainsi à tous les pères :

« Châtie ton fils, car il y a encore de l’espérance ; mais ne va pas jusqu’à le faire mourir. » (Pv, 19, 18).

Notre temps moderne est en ce sens affreux : il ne cesse de tuer des enfants, en les oubliant, et sans les châtier, c’est l’avortement.

Et pire encore peut-être, il ne cesse de tuer ses enfants, par mollesse et paresse, en ne châtiant pas un enfant-roi à la Rousseau, en le pourrissant-gâtant, en en faisant de petits monstres, et en gâchant toute l’espérance que porte toute petite âme encore juvénile…

Si cette âme est de plus lavée dans les eaux du baptême, c’est encore plus monstrueux : c’est comme bloquer, par faiblesse, les torrents de la grâce sur une âme toute salie de mauvaises habitudes provoquées par la défection des parents…

Pour le Roi, c’est aussi, et encore plus, une question de charité que de faire justice. A commencer par les vrais méchants :

« Quand on châtie le méchant, le simple devient sage, et quand on instruit le sage, il devient plus sage. » (Pv, 21, 11)

Une justice équitable édifie les simples et les font progresser dans la vertu. Le Christ viendra compléter encore ce bourgeon, et la pratique de la justice chrétienne le démontrera : la justice vient encore réformer le méchant, et lui donner la possibilité, comme le bon larron sur la croix, de trouver la vie éternelle.

Et il faut toujours instruire, et instruire, et donc apprendre et apprendre les voies du Seigneur (et non pas toutes les choses inutiles de ce monde).

Comme disait le curé d’Ars, ceux qui ne veulent pas donner l’aumône en prétextant que l’on ne sait pas ce qu’il va en faire sont des égoïstes peccamineux. Il a raison : il parlait à ses ouailles, qui cherchaient des excuses pour ne pas donner, dans une société encore tout à fait chrétienne, mais déjà contaminée par l’esprit bourgeois (et protestant) détestant la pauvreté, vue comme uns souillure – ce qui est l’esprit peu ou prou de tout monde païen.

Le curé d’ars, dans ce prétexte général a raison : quand vous rencontrer un vrai mendiant qui a l’air en détresse (ce qui était le cas en général à son époque), et qu’on ne connaît pas, il ne faut pas trouver des excuses.

Néanmoins cela veut-il dire, par exemple, qu’il faut toujours donner ?

Non, la morale, et parfois l’expérience, nous l’enseigne.

Pour reprendre l’exemple précédent, surtout dans le contexte actuel, il faut savoir distinguer entre vrai mendiant en détresse, et petit faux mendiant bien gras qui vit de l’extorsion sur les passants (et c’est assez facile à distinguer en fait). Encore, il faut évidemment privilégier le don en nature (un repas par exemple) sur le don en argent, ce qui permet au passage de s’assurer de l’usage du don, et de pourvoir à une urgence réelle – la faim par exemple. Aussi, bien sûr, il faut prendre en compte son « bien commun » : s’il faut donne à une personne de temps en temps des sommes raisonnables, certes, mais s’il s’agit de donner dix fois par jours des sommes plus ou moins conséquentes, alors les finances de la famille ou de la maison peuvent être mis en danger, ce qui n’est pas non plus ordonnés.

Il y a encore un autre cas, certes plus rare, mais réel, et bien plus douloureux : ces gens, que l’on retrouve souvent dans la littérature, et qui vivent sur le dos des autres, en trouvant des « expédients », en empruntant toujours ici et là, sans que les uns et les autres le sachent, sans jamais pouvoir rembourser évidemment : plus on leur prête, plus ils cherchent à emprunter, moins ils cherchent à réformer leur vie et ce qui ne va pas…

Dans ce cas, justement parce qu’on connaît la personne, souvent un bon ami, il ne faut pas prêter, car c’est l’enfoncer, et la charité amicale exige de l’aider à se sortir de ce cercle vicieux… C’est douloureux, et cela peut créer des réactions violentes… Mais cela nous rapproche de notre Seigneur : quand il refuse de se taire sur les vérités, qu’il refuse de cesser de faire du bien, on lui tombe dessus, car l’orgueil piqué au vif des pharisiens, ou la présomption de ses apôtres, sont comme attaqués par ces bonnes œuvres et la vérité. La purification par la Croix assumé !

Dans ce genre de cas, il faut évidemment garder la porte ouverte, donner de quoi manger, voire un toit ou le vêtement quand il fait froid ou par intempéries, mais pour le prochain, et le bien commun des diverses sociétés impliquées, il faut savoir par charité, rester ferme.

C’est la prudence casuelle, au cas par cas.

Sachons être charitable avec force, et ne pas nous laisser aller à la mollesse du temps présent, qui fait tout pour nos détourner de toute velléité de fermeté et de sévérité.

Sans rudesse, sans colère, sans dureté et avec douceur et humilité, en confiant nos décisions à Dieu.

Et, dans la mesure de nos moyens, sachons utiliser avec mansuétude une verge souple et une discipline rédemptrice, et d’abord envers nous-mêmes, nous qui sommes de grands enfants, et dont le péché originel nous rend toujours fou :

« La folie est attachée au cœur de l’enfant ; la verge de la discipline l’éloignera de lui. » (Pv, 22, 15).

Pour Dieu, pour le Roi, pour la France

Paul-Raymond du Lac

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