Loi de mystification énergétique pour la croissance verte
Après un examen en procédure accélérée et en temps programmé, l’Assemblée Nationale votera le 3 mars prochain la loi sur la transition énergétique.
De quoi s’agit-il ? Selon l’article premier du projet de loi, il s’agit de :
- Réduire notre consommation énergétique finale de 50% en 2050 par rapport à 2012.
- Réduire la part du nucléaire dans la production d’électricité à 50 % à horizon 2025,
- Porter la part des énergies renouvelables à 32% de la consommation finale d’énergie en 2030[1],
Pour bien comprendre, cela signifie qu’à horizon 2050 (personnellement, j’aurai 89 ans), il faudra consommer 2 fois moins d’énergie qu’aujourd’hui et que cette énergie soit au maximum à 50% d’origine nucléaire et au minimum à 32% issue des énergies durables (hydraulique, éolien, photovoltaïque, biomasse… soit grosso modo une multiplication par 10 !), et que de plus chacun prenne toutes les mesures (comportementales, travaux d’isolation, voiture électrique…) pour faire des économies d’énergie.
Ces objectifs sont-ils réalistes ?
Réduire la consommation finale de moitié, quand bien même en 2050, a de quoi laisser dubitatif :
- Aucun pays au monde n’a connu une croissance économique sans augmentation de la consommation d’énergies,
- Aucun pays au monde n’a connu de croissance démographique (et de solde migratoire positif…) sans augmentation de la consommation d’énergies,
Il faudrait donc que toute l’activité liée à la diminution de la consommation d’énergie soit :
- Suffisamment efficiente pour atteindre une performance énergétique telle que la consommation finale puisse baisser effectivement de 50 % ;
- Productrice de suffisamment de richesse (autrement dit de croissance du PIB) pour garantir un niveau de chômage acceptable (il faut 1.5% de croissance pour inverser la courbe du chômage).
Ce dernier point traduirait un basculement culturel cocasse : Il faudra croire que la croissance économique du pays ne dépend plus de l’augmentation de la consommation d’énergie (et donc de la production d’électricité nucléaire) mais, à l’inverse, de leur baisse !
Il est intéressant de relever que le projet de loi fait mention, pour atteindre cet objectif, de la nécessité de porter le rythme annuel de baisse de l’intensité énergétique finale à 2,5 % d’ici à 2030.
Qu’est-ce que « l’intensité énergétique » ?
L’intensité énergétique d’un pays est le ratio entre la consommation d’énergie et le produit intérieur brut (PIB). Cette grandeur s’exprime en tonnes équivalent pétrole par million d’euros (tep / M€) et elle a sensiblement décru en 40 ans grâce à nos gains d’efficacité énergétique notamment pour atteindre environ 90 tep / M€ de PIB en 2014. Cependant, elle commence à se stabiliser, notamment depuis 2007, ce qui signifie qu’il sera de plus en plus cher et difficile de produire de la richesse en consommant moins d’énergie[2].
La loi sur la transition énergétique vise pourtant bien une division par deux de la consommation d’énergie d’ici 2050, soit une réduction d’environ… 2% par an.
Ayez confiance, chers électeurs, à horizon 2050 vous vivrez d’eau fraîche, de vent et de soleil grâce à… une « bonne récession » : En effet, cette variable d’ajustement permet beaucoup plus facilement d’atteindre l’objectif !
Alleeeez leeeees verts !
Arnaud de Lamberticourt
[1] Notons que les éoliennes et les panneaux solaires sont des énergies renouvelables « intermittente ». Comment satisfaire la demande un jour de pluie sans vent ? Avec une centrale à charbon, bien sûr !
[2] La loi prévoit par exemple la réhabilitation de 500 000 logements par an (dont 130000 de logements sociaux) à partir de 2017 (soit le début de la prochaine mandature : bonjour la patate chaude !). Aujourd’hui, par un évident manque de moyen, on arrive péniblement à 150 000 en tout…