Nommer son enfant : lui rappeler d’où il vient, où il doit aller et sa mission, par Paul de Beaulias
Nommer est un attribut du divin.
Les contemporains semblent avoir oublié l’importance de nommer ce qui nous entoure ; certainement une conséquence indirecte d’un relativisme ambiant qui veut faire croire que rien n’existe hors du discours, et que donc nommer, au fond, n’est pas une chose importante, puisqu’un même mot peut signifier n’importe quoi, dans un subjectivisme effréné.
Cela est évidemment faux. Il est une constante au contraire dans l’histoire de l’humanité que les « mots » ont une importance insigne, et le « Verbe de Dieu », Jésus-Christ le signifie bien au plus haut point.
La logorrhée contemporaine ne fait qu’illustrer, au fond, par l’absurde, cette constance de la nature du langage, qui doit désigner des réalités, mais aussi possèdent une puissance divine : nommer est un attribut divin, et nommer c’est déjà s’approprier la chose nommée.
Cela est tellement vrai que de nombreuses cultures, comme au Japon avec l’imina (諱), gardaient le prénom caché, car on pensait que connaître le vrai nom donnait une emprise sur la personne en question (malédiction, pouvoir, etc).
Joseph de Maistre développe avec brio ces thématiques, nous vous le recommandons.
Bref, l’objet de cet article est de raconter une petite anecdote au consulat de France, lors de l’enregistrement à l’état civil de ma troisième fille.
Traditions familiales et volonté politique font que je donne plus de quatre prénoms à mes enfants, et depuis le quatrième, le consul se permet de faire un commentaire, « recommandant de limiter le nombre de prénoms à quatre » (pourquoi à partir du quatrième enfant seulement ? aller savoir, nouvelles règles en vigueur depuis peu certainement, ou alors parce que j’avais donné comme premier prénom à mon fils mon propre prénom, ce qui a peut-être fait tilter Madame le consul à l’époque – car ils changent vite).
Cette fois-ci, pour le cinquième, le consul en personne se déplace, avec sa circulaire administrative, et son masque, ainsi que sa tonsure républicaine – la même tête que mon oncle franc-maçon… – et me fait le commentaire sur le « conseil » pour le nombre de prénoms.
Vous allez voir, bientôt il sera « conseillé » de ne pas avoir plus de trois enfants ! Cela nous guette…
Le fait même qu’on se permette un commentaire sur le nombre de prénoms est symptomatique : on nous prend pour des gosses, et il ne serait pas étonnant que cette non-limitation des prénoms à l’état-civil soit interdite dans un avenir proche (comme l’école à la maison, qui était soi-disant intouchable).
Je réponds bien sûr que je garde les prénoms que j’ai choisi, passant outre le « conseil ». Monsieur le consul hausse alors les sourcils de façon frénétique, au-dessus de son masque, visiblement agacé que je ne prenne même pas la recommandation au sérieux, ne serait-ce qu’une demi-seconde.
Je lui dis alors qu’il n’est pas nécessaire de hausser les sourcils.
Il s’agace un peu plus, et se permet, le monsieur de la République, d’insister sur les « difficultés administratives que peuvent donner le fait d’avoir trop de noms, et que certains viennent s’en faire supprimer à l’âge adulte », etc. Une menace ? Volonté de faire peur ? Qui sait…
Je réponds que je ne donne pas des prénoms en fonction des difficultés administratives « promises » (oh, ils sauront bien nous « emmerder » un maximum s’ils le décident).
Cela ne lui plaît visiblement pas, mais il est bien obligé, en bon « agent » de la République d’enregistrer robotiquement la demande.
Il n’aura certainement pas ignoré qu’un nom de ma fille est Marie-Immaculée, et que mes quatre autres enfants portent aussi le nom de Marie.
Soit il est idiot, soit il sait bien ce qu’il en retourne.
Je n’ai pas eu le sens de la répartie, car il est reparti trop vite, mais je lui aurai bien répondu :
« En espérant que les instants perdus par mes enfants lors des diverses procédures administratives à l’avenir leur soit une occasion de méditer d’où ils viennent, où ils doivent aller (le paradis) et leur mission sur cette terre (restaurer la royauté et faire honneur à leur nom). »
Ou encore : « Les descendants de Caïn savent pourtant aussi bien que moi à quel point les noms sont symboliques, non ? »
Et même : « Sachez qu’avant l’état civil, que vous avez volé à l’Eglise, elle a été portée sur les fonts baptismaux pour entrer dans la société parfaite de Notre Seigneur ! Puis avant la République, elle a été d’abord déclaré dans le Royaume du Japon ».
J’aurais aimé voir sa tête. Mais cela aurait été peut-être contre la prudence…
Une autre fois peut-être…
Alors, juste pour embêter la République, et donner un peu plus de saints patrons à nos enfants, qui en auront besoin, si on donnait au moins cinq prénoms ?
Pour Dieu, pour le Roi, pour la France
Paul de Beaulias