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Aux Missions étrangères de Paris, une belle exposition sur l’épopée chrétienne au Japon

Du 15 mars au 13 juillet 2024, une très belle exposition sur « L’épopée chrétienne au Japon » se tient au 128, rue du Bac. Organisée par les MEP (Missions Étrangères de Paris), elle a la particularité de présenter des œuvres inédites et diverses, qui ont pu être rassemblées grâce au chef d’orchestre de l’exposition, M. Jacques Charles-Gaffiot, et grâce la belle collaboration qui existe entre les MEP et les Jésuites, qui furent les grands acteurs de la mission au Japon aux XVIe et XVIIe siècles, les MEP ayant repris le flambeau pour la fin du XIXe siècle. Saluons tous les organisateurs et les collaborateurs pour cette belle exposition, qui fait notre plaisir.

Le catalogue de l’exposition est aussi très beau et bien documenté : il permet de se plonger dans le contexte de l’époque et de la belle épopée chrétienne au Japon, nous le recommandons vivement.

Le Japon a en effet aussi son histoire chrétienne, et ses nombreux martyrs. L’histoire chrétienne du Japon est essentielle pour comprendre le Japon moderne. Sous de nombreux rapports, l’époque Edo et l’ère Meiji s’expliquent aussi par leurs contacts avec la Chrétienté au XVIe siècle. Le système d’Edo s’est fondé sur l’extermination systématique des chrétiens, en cherchant à les faire apostasier : la fermeture du pays visait notamment à empêcher la religion catholique de se répandre plus sur le territoire. Pourquoi ? Parce que la religion catholique avait gagné ce peuple généreux dans des proportions impressionnantes et à tous les niveaux de la société, des intouchables aux seigneurs féodaux en passant par certains bonzes convertis… De quoi inquiéter les bouddhistes qui avaient les places et des prébendes. La morale catholique, à un certain point, venait aussi gêner les visées de gloire et de grandeur politique démesurées des dirigeants du Japon, entre un Hideyoshi qui voulait conquérir le monde tout en se prenant pour le fils du soleil et les généralissimes Tokugawa qui, quoique plus modérés dans leurs ambitions mégalomanes, n’en furent pas moins terribles dans l’extermination méthodique des chrétiens et dans la divinisation des persécuteurs, vénérés comme des dieux dans plusieurs sanctuaires, comme celui de Nikkô.

Les Japonais, et les missionnaires sur places, témoignèrent de l’amour du Christ jusqu’au martyre. Le nombre de morts in odium fidei atteignit des records non atteints depuis les temps des grandes persécutions romaines ! Tout ce sang donné généreusement pour Jésus-Christ ne pourra que retomber un jours sur le Japon, espérons que cette histoire chrétienne soit souvent rappelée dans l’archipel !

D’un point de vue culturel et même linguistique, l’épisode jésuite fut clef, car les chrétiens apportèrent beaucoup au Japon : culture culinaire, cérémonie du thé, armes à feu, imprimerie, connaissance de la langue (avec les premiers dictionnaires, qui sont d’ailleurs les seuls outils permettant aujourd’hui de connaître avec précision le japonais de l’époque), sans compter toutes les sources des missionnaires, nous permettant de connaître la société japonaise médiévale, jusque dans la vie privée et les mœurs de l’époque, ainsi que les grands événements politiques contemporains, puisque les Jésuites conseillaient et se faisaient recevoir par les plus grands.

Le Japon eut de plus sa propre Vendée, à Shimabahara.

Enfin, des chrétiens japonais, malgré la persécution et l’absence de prêtres, restèrent héroïquement fidèles au Christ et transmirent clandestinement le baptême, la foi et les prières à leurs descendants, jusqu’à leur redécouverte par le père Bernard Petitjean en 1865 : l’histoire est bien connue, des chrétiennes nipponnes vinrent trouver le missionnaire et lui demandèrent de prier la Vierge, avant de s’assurer qu’il était bien célibataire et de chercher à savoir qui était le pape du moment… Bref, elles étaient issues de communautés pleinement catholiques, connaissant l’importance des sacrements, de l’Église visible ou même du temps liturgique. C’est unique dans l’histoire !

L’exposition présente de nombreuses œuvres d’intérêt, dont un paravent célèbre (voir ci-contre) datant de la fin du XVIe ou du début du XVIIe, prêté par le musée de Kobe. Bien d’autres documents sont intéressant à voir,  telles les lettres originales du P. Petitjean, dont la lecture est par ailleurs disponible sur le site des MEP.

L’épopée continua après l’ouverture du Japon, avec un climax, pendant et après-guerre, autour du docteur Takashi Nagai, qui offrit les sacrifices des chrétiens de Nagasaki bombardés par Fat Man en réparation des péchés du Japon, montrant lui-même l’exemple en restant sur place pour soigner les blessés jusqu’à sa propre mort causée par les radiations.

Tous ces bons chrétiens ne peuvent que faire semence. Qu’ils soient pour nous une nourriture et une inspiration !

Nous invitons tous ceux qui le peuvent à aller visiter cette exposition. Tant d’œuvres réunies ensemble est une occasion unique, qui ne se reproduira pas de si tôt.

Paul de Lacvivier

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