Lampedusa : à la recherche des vrais coupables
Le rêve d’une vie meilleure s’est transformé en cauchemar pour les cinq cents migrants d’Erythrée ou de Somalie, qui ont voulu tenter l’aventure de croire aux promesses des passeurs, ces mafieux qui empochent de 1 000 à 1 500 € par personne et dont le chiffre d’affaires s’élèverait à 5 milliards d’euros. L’espoir d’une vie meilleure pour ces hommes, femmes et enfants a été noyé par une mer sans pitié, une mer qui est devenue le plus grand cimetière marin du monde.
Sur cette petite île, proche de la Sicile, il semblerait à ce jour que seulement 150 personnes aient pu être sauvés. Une journée de deuil national a été déclarée en Italie. Madame la Maire de Lampedusa, Giusi Nicolini n’a pu cacher sa douleur, ses larmes et son impuissance pour affronter cette tragédie en déclarant : “On n’a plus de place, ni pour les vivants ni pour les morts” – “C’est une horreur, une horreur ; ils n’arrêtent pas d’apporter des corps.” Que répond l’Europe ? Vite, tournons la tête, ne voyons pas ces têtes qui sortent de l’eau, cherchant une ouverture sur le ciel et posons-nous la question des vrais responsables de cette tragédie.
Plusieurs questions se posent : comment stopper ce trafic d’êtres humains, comment sensibiliser l’Europe pour trouver des solutions, comment aider les pays d’Afrique à se développer pour que ses habitants restent chez eux ? Il semble bien qu’une politique de développement solidaire dans des pays identifiés ne soit pas à l’ordre du jour et que les pays européens ne sont plus conscients qu’une prospérité en Afrique servirait aussi leurs intérêts.
Que le pape François parle de honte et redise à Assise son rejet de la « culture du déchet » suffira-t-il pour sensibiliser le monde chrétien à cette effroyable misère du continent africain. Celui-ci dispose pourtant des ressources nécessaires pour aller de l’avant s’il est soutenu par une vraie politique économique venant des Européens, de la Chine ou des Etats-Unis. Tout est possible, si l’on supprime les barrières de l’indifférence et de l’individualisme.
Selon certaines statistiques, 17 000 migrants seraient morts en 20 ans en essayant de parvenir en Europe. En juin 2011, 200 à 270 migrants originaires d’Afrique subsaharienne et fuyant la Libye s’étaient noyés en tentant de gagner Lampedusa. A l’époque, tout le monde s’en souvient, on avait crié au scandale, levé les bras au ciel et pleuré, assurant que cela n’arriverait plus.
Et hier ressemble à aujourd’hui qui deviendra demain. Une journée de pleurs a déclaré le pape. Combien pour les familles restées en Afrique, attendant des nouvelles de leurs « petits » partis pour assurer leur nourriture. Combien ? L’homme est ainsi fait qu’il n’est intéressé que par ce qui le touche directement. C’est aux politiques à régler ces problèmes, à savoir où va l’argent que nous donnons, à demander des comptes simplement.
Les politiques, c’est nous qui les mettons au pouvoir, nous qui les laissons « ne rien faire », nous qui n’avons peut-être pas encore intégré le fait que la politique de développement passait aussi par l’Afrique. François Hollande, homme de guerre, préfère vendre des armes, qu’assurer un plan de développement durable. La France, présente dans les conflits, ne l’est pas dans l’aide au développement. Le drame est là…
Solange Strimon
Le cauchemar de Lampedusa :