Chretienté/christianophobie

N’oublions pas la Syrie

Nous entrons dans le quatrième dimanche de l’avent, Noël se rapproche de nous à grands pas. Ne nous étonnons pas si « la gloire de Dieu » se manifeste « dans la pauvreté d’un Enfant sans défense » : Dieu savait ce qu’Il faisait. Et avant de nous intéresser à la Syrie, qui nous préoccupe au plus haut point, posons-nous la question de notre représentativité dans le monde.

Un rapport sur la taille et la répartition des principaux groupes mondiaux religieuses établi par une organisation des Etats-Unis, le Pew Forum dans le cadre de son projet « Pew-Templeton Global Futures » analyse les évolutions religieuses et leur impact sur les sociétés à travers le monde. L’étude concerne plus de 230 pays, avec des données provenant de plus de 2.500 recensements nationaux, enquêtes à grande échelle et registres officiels de population, qui ont été collectées, évaluées et standardisées par les démographes du Pew Forum. Dans le monde, constate l’étude, plus de huit personnes sur dix s’identifient à un groupe religieux, c’est-à-dire quelque 5,8 milliards d’adultes et enfants, représentant 84% des 6,9 milliards de la population du monde en 2010.

Les chrétiens sont en première position, avec 2,2 milliards, soit environ une personne sur trois (32%) à travers le monde. Viennent ensuite 1,6 milliard de musulmans (23%), 1 milliard d’hindous (15%), près de 500 millions de bouddhistes (7%) et 14 millions de Juifs (0,2%). Plus de 400 millions de personnes (6%) pratiquent diverses religions folkloriques ou traditionnelles et 58 millions de personnes (moins de 1%) appartiennent à d’autres religions (jaïnisme, shintoïsme, taoïsme, zoroastrisme, etc.). Enfin, près d’une personne sur six (1,1 milliards, soit 16%) n’a aucune affiliation religieuse. La moitié des chrétiens sont catholiques (50%), tandis que 37% appartiennent à la tradition protestante – incluant les anglicans et des églises indépendantes – et 12% à la Communion orthodoxe. Le dernier 1% concerne les personnes d’autres traditions qui se considèrent comme des chrétiens (scientistes chrétiens, mormons, témoins de Jéhovah…).

L’étude permet d’observer – assez curieusement – que le christianisme, géographiquement très répandu, s’est éloigné de ses origines historiques. La grande majorité des chrétiens (99%) vivent hors du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, pourtant point de départ du christianisme. La plus grande partie de la population mondiale chrétienne se situe en Europe (26%), suivie de près par l’Amérique latine et les Caraïbes (24%) et l’Afrique subsaharienne (24%). Un nombre important de chrétiens vit également en Asie et dans le Pacifique (13%) et en Amérique du Nord (12%).

Au vu de ces chiffres, on pourrait imaginer que le christianisme se porte bien. Quel succès ! Quelles terribles tragédies couvrent la réalité ! Le pape François parle aujourd’hui d’un œcuménisme de sang

 « Dans les pays où l’on tue des chrétiens parce qu’ils portent une croix ou ont une Bible, les tueurs ne leur demandent pas s’ils sont anglicans, luthériens, catholiques ou orthodoxes. Leur sang est mélangé. Pour ceux qui tuent, ils sont chrétiens (…). Ceci est l’œcuménisme du sang ». 

En Syrie, dans les pays du Proche et du Moyen-Orient, particulièrement le Liban, en Irak, en Egypte et en Terre Sainte, les chrétiens sont menacés. L’avenir des chrétiens est tellement sombre dans ces régions qu’on pourrait même penser à « un plan de nettoyage ethnique contre les chrétiens » osent dire les responsables religieux sur place.

Pour vous donner une juste idée de ce qui se passe en Syrie, nous avons estimé que la parole de Mgr Samir Nassar, archevêque maronite de Damas, irait droit à votre cœur. La Syrie ressemble le mieux à une Crèche : étable ouverte sans porte, froide, démunie et si pauvre. Ecoutons sa prière :

« L’Enfant Jésus ne manque pas de compagnons en Syrie… Des milliers d’enfants qui ont perdu leurs maisons vivent sous des tentes aussi pauvres que la Crèche de Bethléem… Jésus n’est plus seul dans sa misère. L’enfance syrienne abandonnée et marquée par les scènes de violences souhaite même être à la place de Jésus qui a toujours ses parents qui l’entourent et le chérissent… Ce sentiment d’amertume est bien visible dans les yeux des enfants syriens, leurs larmes et leur silence… Certains envient l’Enfant divin parce qu’il a trouvé cette étable pour naitre et s’abriter alors que certains de ces malheureux enfants syriens sont nés sous les bombes ou sur la route de l’exode. Marie dans ses difficultés n’est plus seule : des malheureuses mamans moins chanceuses qui vivent dans l’extrême pauvreté et assument les responsabilités familiales seules sans leurs maris… La précarité de la crèche de Bethléem apporte une consolation à ces pauvres mamans écrasées par des problèmes insolubles et le désespoir. La présence rassurante de Joseph auprès de la Sainte Famille est source de jalousie pour ces milliers de familles privées de papa, privation qui nourrit la peur, l’angoisse et l’inquiétude. Nos chômeurs envient Joseph menuisier qui épargne à sa famille le besoin. Les bergers et leurs troupeaux voisinant la crèche, parlent beaucoup aux nombreux éleveurs syriens qui ont perdu 70 % de leur cheptel dans cette guerre. La vie nomade sur cette terre biblique qui remonte à Abraham et bien avant, disparaît brutalement avec ses vieilles coutumes d’hospitalité et sa culture traditionnelle. Les chiens de ces bergers de Noël compatissent sur le sort des animaux domestiques en Syrie ravagés par la violence meurtrière, ils errent dans les ruines et se nourrissent de cadavres. Le bruit infernal de la guerre étouffe le Gloria des Anges… Cette symphonie de Noël pour la paix cède devant la haine la division et l’atrocité cruelle…Puisse les trois Rois Mages apporter à la Crèche de Syrie les plus précieux cadeaux de Noël : paix, pardon et réconciliation, afin que brille à nouveau l’Étoile de Noël dans nos sombres nuits. »

Il serait indécent d’ajouter quoi que ce soit. Tout est dit. Nous le savons, les régions chrétiennes sont bombardées jour et nuit ; les chrétiens ont toujours tort ; religieux et religieuses continuent d’être enlevés. Nous ne pouvons que demander à Marie, qui a vécu la plus grande aventure de l’humanité, celle de Dieu venu dans notre chair, de nous aider, de venir en aide à tous les persécutés de la terre.

Et pourtant, Noël parle de tendresse et d’espérance, de joie de Dieu, de lumière, de paix, de confiance, même dans un monde traversé par les guerres et les persécutions. La sérénité de la nuit de la Nativité est une invitation à regarder Marie qui s’est laissé pénétrer par l’amour de Dieu et à qui nous demandons des grâces pour nos frères et sœurs en difficultés en France et dans tous les pays du monde. Spécialement en Syrie, là où notre cœur saigne, tant nous nous sentons impuissants à venir en aide à ces chrétiens.

Que nos prières montent avec force, conviction et amour vers Marie pour qu’elle intercède en faveur de tous ces chrétiens persécutés et que la joie des chants de Noël résonne dans nos cœurs, haut et fort : « Il est né le divin enfant, jouez hautbois, résonnez musettes ! Il est né le divin enfant, chantons tous son avènement ! Depuis plus de quatre mille ans, nous le promettaient les prophètes, depuis plus de quatre mille ans, nous attendions cet heureux temps…  Ne nous laissons pas voler la trêve de Noël !

Solange Strimon

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