Le Pr. Bouscau à l’évêque de Blois : « Nous sommes en droit d’espérer des évêques catholiques plutôt que des évêques républicains »
Ci-dessous, la lettre ouverte du Professeur Franck Bouscau à Mgr Batut, évêque de Blois et célébrant des obsèques du président Valéry Giscard d’Estaing, père de la loi sur l’avortement :
« Monseigneur.
Simple fidèle catholique, et un peu canoniste, je viens, comme cela est loisible à tout laïque, vous faire part de ma désapprobation relative au traitement qui a été réservé par l’Église au président Giscard d’Estaing lors de ses obsèques que vous avez présidées, lequel me paraît constituer un scandale.
M’abstenant de considérations politiques, je rappellerai seulement que Valéry Giscard d’Estaing, lorsqu’il était président de la République, a fait adopter l’odieuse loi Veil sur l’avortement. Or cet acte est réprouvé par le droit canonique qui sanctionne les « procurantes abortum » par la peine suprême de l’excommunication (CJC 1917, canon 2350 §1 ; CJC 1983, canon 1398). Dans sa sagesse, la sainte Église a voulu marquer ainsi la gravité de ce crime. Le pape Jean-Paul II, bien inspiré sur ce point, disait que « le premier droit de l’homme, c’est de vivre. »
Or Valéry Giscard d’Estaing a été enterré comme un chrétien et non comme un excommunié. Le fait qu’il ait été le président d’une République qui s’affirme agressivement laïque et qui a, depuis 1905, déchiré le pacte solennel conclu avec l’Église catholique change-t-il quelque chose à son péché public ? Ou bien celui qui a procuré le moyen juridique de procéder à des milliers d’avortements aurait-il échappé à la sanction canonique prévue pour un seul de ces actes ?
Il est choquant de voir des prêtres, et en particulier des évêques, se précipiter pour enterrer avec « les honneurs de l’Église » des personnages dont la vie publique a foulé aux pieds les valeurs chrétiennes. L’on pense à ces évêques orthodoxes qui sont allés honorer Staline après sa mort… Encore avaient-ils excuse d’être forcés.
J’ai le regret de vous dire qu’en présidant les obsèques de Valéry Giscard d’Estaing, au surplus revêtu de vos ornements épiscopaux, vous avez prôné par l’exemple le mépris du droit et de la discipline ecclésiastiques. Lors des funérailles de Jacques Chirac, son complice dans la « libéralisation » de l’avortement, j’avais déjà attiré l’attention de votre confrère, Mgr Aupetit, archevêque de Paris, sur le scandale qu’avait constitué alors sa présence et celle d’autres évêques. Je lui disais, et je vous dis aujourd’hui, que les autorités ecclésiastiques étaient tenues de refuser l’entrée des églises à ce genre de personnages.
Que l’on ne me dise pas que je juge alors que nous ne devons pas juger. Je ne fais que tirer les conséquences d’actes publics au for externe et appeler au respect de la discipline ecclésiastique, qui n’est pas facultative. Pour le reste, Valéry Giscard d’Estaing relève désormais du tribunal de Dieu et je ne porte aucun jugement sur son sort éternel.
Que l’on ne m’oppose pas la miséricorde. En effet, celle-ci n’est due qu’au pécheur qui la demande en se repentant. Et je ne sache pas que le président Giscard se soit jamais repenti d’avoir activement agi en faveur du vote de la loi sur l’avortement. Et d’ailleurs, si tel était le cas, sa repentance aurait dû être rendue publique (et ses obsèques auraient dû se dérouler discrètement et sans la présence d’évêques) ;
Je termine en précisant — mais la chose me semble aller de soi — que je ne vous connais pas personnellement et que ne suis mû par aucune hostilité envers votre personne. Ma démarche vise seulement à rappeler que les catholiques sont en droit d’espérer des évêques catholiques plutôt que des évêques républicains.
Je prie votre Excellence d’agréer l’expression de mon respect pour ses hautes fonctions et l’assurance de ma prière à son intention. »
Franck Bouscau
Historien du Droit
Maître en Droit canonique
Avocat honoraire à la Cour de Paris
Intéressante interpellation, Monsieur le Professeur, à laquelle aucun évêque ne répondra. En effet, sauf à être gallican – mais ce n’est pas votre choix, me semble-t-il – la politique de l’Eglise est décidée par les clercs et non par les laïcs, même canonistes.
Je sais bien que l’ancien président était fortement engagé en faveur de l’Europe, comprendre la soumission au monstre technocratique apatride bruxellois, mais l’image du cercueil de M. Giscard drapé du pavillon européen m’a fait bondir ! Un ancien chef de l’Etat français ne devrait être enterré QUE que sous les couleurs nationales !