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Les fondamentaux de la restauration (6) – Chap. 3 : L’union, loi des familles et des États (2/2)

Les fondamentaux de la restauration – 6

Mgr Henri Delassus, L’Esprit familial dans la maison, dans la cité et dans l’État, Société Saint-Augustin, Lille, 1911.

Chapitre III – L’union, loi des familles, est aussi la loi des États (2/2)

La France est guérissable en tant que nation, il suffit de se restaurer. N’oublions aussi jamais que le peuple hébreu est parti de douze fils pour devenir une multitude : des familles nombreuses et pieuses seront le socle de la France restaurée.

D’un point de vue surnaturel, Mgr Delassus cite l’abbé Lehmann, juif converti au catholicisme, et source d’inspiration inépuisable :

« Persévérance dans la prière. Embrassement de la pénitence. Retour à l’unité. Tels sont, d’après la Bible et dans le domaine de l’ordre moral, les trois conditions indiquées de Dieu pour la guérison des nations. » En les accomplissant, la guérison de la France est moralement certaine. Et, si la guérison s’opère, on verra reparaître, avec le retour aux croyances religieuses, le respect de tous les droits, l’épanouissement de l’honneur, la pratique d’une vraie liberté, la noble ambition de la gloire, la protection des faibles, la sécurité du commerce, l’élan de la prospérité, la recherche de notre alliance, en un mot, tout ce qui a contribué à faire de la France, durant des siècles enviés à cette heure, le plus beau royaume après celui du ciel[1]. »

La restauration en France ne peut passer que par la restauration de la Foi, sinon ce ne sera qu’un ersatz de France, qui est substantiellement royale et catholique. Le régime apostat ne sera certes plus longtemps toléré par la nature des sociétés, mais sans restauration intégrale de la foi et du roi, nous n’aurons in fine qu’un énième régime païen — dont l’histoire a tant vu d’exemples —, inflexible et dur, sans charité chrétienne, si encore il maintient un minimum de justice.

Tout commence ainsi :

« Persévérance dans la prière. Embrassement de la pénitence. Retour à l’unité. »

Prions, et cherchons non pas à faire de la repentance, mais à nous repentir pour tous nos crimes d’une part, et encore plus pour les atrocités commises par nos frères régnicoles lors des révolutions. Français, ils ont engagé le courroux divin sur notre pays par leur impudence, par nos faiblesses et notre tiédeur.

Que cela ne se reproduise plus !

Après la prière et la repentance, la restauration demande que chacun accomplisse son devoir avec charité, j’entends son véritable devoir – qui n’est pas la compliance à la mode dans les entreprises désincarnées. Non, la restauration de la véritable politique : le père, chef attentionné dans sa famille, envers ses sujets ; les enfants, dans le conseil de son ministre, son épouse. Les chefs, dans tous les contextes, qui donnent et affectionnent leurs subordonnés, qui les servent pour leur bonheur, dans le sacrifice gai de celui qui espère et sait que toute ses souffrances et soucis font plaisir à Dieu car ils œuvrent pour le bien commun. Ainsi, de véritables nobles agiront dans la société, non pas les nobles de particule – qui peuvent néanmoins montrer l’exemple et rappeler à tous l’esprit de la noblesse, s’ils y travaillent et se convertissent – mais les nobles, avant tout dans le service : le service des inférieurs, et le service des supérieurs. Nous sommes tous inférieurs de quelqu’un, à commencer par le roi, qui est aux pieds de Dieu, et nous avons tous des inférieurs en un certain domaine ou d’une certaine façon : heureux celui qui serait le dernier assis s’il existe, le ciel lui appartient ! Nous comprenons cette idée évangélique de façon bien plus douloureuse le jour où nous commençons à porter des responsabilités qui nous dépassent forcément, et que seul la confiance en Dieu nous permet d’accomplir du mieux possible : ceux qui ne croient pas fort semblant d’oublier leur devoir, leur écrasante responsabilité, en général ; et de là parfois, cela peut dégénérer en abus, qui correspond au fond à l’oubli de ses responsabilité et la dangereuse croyance que l’on ne sera pas jugé tôt ou tard de nos actes. Nous pouvons nous en laver les mains, cela ne nous exempte d’aucune responsabilité

Les païens sentaient cette exigence de la justice et s’y pliait bon an mal an, dans la dureté certes, mais dans une dureté juste :

« Pour que la cohésion existe dans le corps social et lui donne vie et prospérité, il ne suffit point que l’amour attache le souverain aux sujets et les sujets au souverain, il doit unir les sujets entre eux par le dévouement des classes supérieures aux classes inférieures et le service des inférieurs aux supérieurs.

L’antiquité n’a point complètement méconnu ce devoir, ou du moins s’est prêtée à cette nécessité. Cicéron dit que Romulus donna aux sénateurs le nom de « pères », pour marquer l’affection paternelle qu’ils avaient pour le peuple[2]. »

Les temps modernes allient l’absence de charité et l’absence de justice, certainement une première dans l’histoire – du moins dans une version qui dure autant, car dans l’histoire, quand la justice disparaît, c’est le désordre, et le désordre ne survit pas longtemps…

Pour restaurer, retrouvons et admettons notre nature sociale et notre besoin des uns et des autres. Ainsi l’ont répété les papes, faisant ici plus qu’œuvre de foi, œuvre de bon sens des plus élémentaires !

« L’expérience quotidienne que fait l’homme de l’exiguïté de ses forces, dit Léon XIII, l’engage le le pousse à s’adjoindre une coopération étrangère. C’est dans les saintes Lettres qu’on lit cette maxime :  II vaut mieux que deux soient ensemble que d’être seul, car alors ils tirent avantage de leur société. Si l’un tombe, l’autre le soutient. Malheur à l’homme seul ! Car lorsqu’il sera tombé, il n’aura personne pour le relever ». Et cette autre : « Le frère qui est aidé par son frère est comme une ville forte ». De cette propension naturelle naissent les sociétés ». Avant d’écrire ces maximes dans les saints Livres, Dieu les avait gravées dans le cœur de l’homme ; et c’est ce qui explique comment des institutions, reposant sur les mêmes principes, ont pu naître spontanément dans l’antiquité païenne aussi bien qu’au sein du christianisme[3]. »

Oui, de la pure loi naturelle pourtant. Aujourd’hui, les lubies de « solidarité » sont comme un ersatz de cette nature sociale qui réapparaît tant bien que mal, mais qui est violentée encore et encore car niée dans ses principes de discrimination et d’autorité.

Cet esprit naturel de société organique, qui, par l’action chrétienne, devient charité et unité dans la foi, admis, travaillé, renforcé, et développé au jour le jour dans toutes nos relations s’étend à tous les domaines : là se trouve encore la restauration que nous pouvons faire tout de suite et immédiatement en agissant au sein de nos familles, à notre travail, dans les paroisses et les voisinages.

La famille naturelle est le socle de la société naturelle et de la royauté française dans tout ce qu’elle a de naturel ; la famille surnaturelle de la foi est le socle de la royauté française dans tout ce qu’elle a de surnaturel.

« Ce patronat que l’on voit ainsi s’établir sous des formes fort peu diverses, en des temps si distants et en tant de lieux, est évidemment sorti de la famille, il est une extension de son esprit. La prospérité des familles, avons-nous dit, a son principe dans l’union, union provenant de la communauté des affections et des efforts. C’est la vue des heureux effets que produit cette union, qui a porté à l’étendre en dehors des limites de la famille et qui a fait naître la clientèle chez les Romains et la féodalité chez nous. De la famille embryonnaire, si je puis ainsi dire, l’esprit familial s’est étendu avec le développement qu’a pris la famille patriarcale, et de là il a gagné et animé la phratrie, la gens, le fief, et enfin les nations, qui ne peuvent elles aussi, vivre et prospérer que dans l’union et par la communauté des efforts[4]. »

La force et la grandeur de la France furent d’avoir toujours épousé avec brio la loi naturelle et les contours naturels de la société, tout en les sublimant constamment et patiemment par la foi et les vérités surnaturelles. Le résultat fut une société fortement organique et charnelle, dans un cœur uni par la foi.

Les ravages révolutionnaires ont fait beaucoup de dégâts, et il ne faut pas s’attendre qu’une restauration par le haut – nous voulons dire par un changement de régime – change comme un coup de bâton magique la situation catastrophique du tissu organique de notre pays. Non, ne rêvons pas : nous pouvons en revanche reconstruire dans le bon sens et selon les mêmes principes sains et saints qui ont fait la France grande, pour le salut de nos âmes, et l’accomplissement de la mission de la France à l’avenir, encore, et selon la modalité que la divine Providence nous indiquera.

L’histoire est un livre pour nous apprendre les remèdes à nos maux :

« Chacun de ces groupes avait une organisation commune, d’un caractère à la fois familial et militaire, comme le groupe féodal. II est nécessaire de connaître ces faits, si l’on veut se rendre un compte exact du mal qui ronge la société actuelle et du remède à y apporter[5]. »

L’histoire vit aujourd’hui dans l’incarnation des descendants des familles, et d’abord de la famille des familles en la figure de notre bon roi, qui connaît d’autant mieux les bons remèdes.

Paul-Raymond du Lac

Pour Dieu, pour le Roi, pour la France


[1] Mgr Henri Delassus, L’Esprit familial dans la maison, dans la cité et dans l’État, Société Saint-Augustin, Lille, 1911, p. 54 ; Voir aussi : Abbé Augustin Lehmann, Dieu a fait la France guérissable, Victor Lecoffre, Paris, 1884.

[2] Mgr Henri Delassus, op. cit., p. 54.

[3] Ibid., p. 57.

[4] Ibid., p. 57.

[5] Ibid., p. 59.


Dans cette série d’articles intitulée « Les fondamentaux de la restauration », Paul-Raymond du Lac analyse et remet au goût du jour quelques classiques de la littérature contre-révolutionnaire. Il débute cette série avec L’Esprit familial dans la maison, dans la cité et dans l’État, écrit par Mgr Delassus il y a désormais plus d’un siècle.

Mgr Delassus, L’Esprit familial dans la maison, dans la cité et dans l’État (1911) :

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