L’origine de la Chandeleur : la présentation de l’enfant Jésus au Temple
Nous serons certainement nombreux aujourd’hui à faire sauter les crêpes et à les déguster. Une majorité d’entre nous, fidèles à la tradition, feront sauter leur première crêpe de la main droite, tout en tenant un Louis d’or dans la main gauche. Remarquons que notre cher roi Louis est toujours présent dans le sacré, dans la famille et dans les traditions. Toute famille chrétienne se doit d’ailleurs d’avoir un Louis d’or dans l’une de ses armoires, bien à l’abri des tentations, jusqu’à l’année suivante. Un Louis d’or se transmet de génération en génération, selon la coutume. Dans certaines familles, il est offert au moment du baptême de l’enfant. Si ce n’est pas encore le cas, pourquoi ne pas programmer son acquisition pour l’année prochaine ?
La fête de la Chandeleur tire son nom du latin festa candelarum (fête des chandelles). Il s’agit de célébrer avec éclat et joie la présentation de l’enfant Jésus-Christ au Temple, évènement qui intervient 40 jours après sa naissance. Cette fête nous révèle le mystère de Jésus avec l’image d’un beau vieillard Siméon, penché sur l’enfant Jésus et qui annonce qu’il sera la Lumière des Nations. C’est pourquoi, cette fête de la Chandeleur est devenue celle de la fête des Lumières.
C’est seulement à partir de 492 qu’une procession annuelle sera organisée avec des cierges bénis allumés. Au cours de l’une de ces processions aura lieu le partage des crêpes. Fait extraordinaire : le pape Gélase 1er (49ème Pape de 492 à 496, l’un des trois papes africains du catholicisme) fera donner aux pèlerins venus jusqu’à Rome des crêpes (de crispus, ondulé en latin, appelées “oublies” en ce temps), non seulement pour les encourager, mais les remercier de leur soutien. Cette récompense ne nous fait-elle penser au « chapelet de la miséricorde » offert par le pape François aux visiteurs de la place Saint Pierre, voici quelque temps ? Dans le sud de la France, les crêpes peuvent devenir des beignets, mais la symbolique reste la même.
A l’époque de Jésus, selon la Thora, tous les parents offraient à Dieu leur fils premier-né pour bien souligner que cet enfant appartenait à Dieu seul. « Cette démarche rituelle voulue par la Loi, s’inscrivait dans la fidélité et la continuité de la révélation reçue depuis des siècles par les ancêtres de Jésus ». (Matthieu 1/2).
Rendons-nous donc au temple de Jérusalem. De Bethléem à Jérusalem, quelques kilomètres seulement. La petite Marie (c’est encore une très jeune fille) se sent très fière de porter cet enfant au temple. Elle est peut-être déjà en train de prendre conscience de ce que lui a dit l’ange de l’Annonciation, et pourquoi il faut le faire consacrer par l’action et la présence de l’esprit de dieu. On raconte que Marie gardait toutes ces réflexions dans son cœur, et les méditait à la lumière de la Parole de Dieu. Cet enfant âgé de quarante jours, donné par l’Esprit-Saint, n’est-ce pas la réalité même du Dieu dont l’ange lui a parlé et qu’elle a chanté dans son Magnificat ? Joseph, à ses côtés, protecteur de Marie et de Jésus, a certainement reçu lui aussi le message divin par l’ange.
Et voici que s’avance vers l’enfant un beau vieillard nommé Siméon, émerveillé de découvrir cet enfant, cet avenir nouveau qui se présente. Avec amour et reconnaissance, il prend l’enfant dans ses bras. Une lumière prophétique lui vient par-delà de ce qu’il ne voit pas. Siméon ne fait pas partie du corps sacerdotal chargé de l’offrande rituelle, c’est un passant. Il se souvient de ce passage d’Isaïe que ses contemporains méditent eux aussi : « Tous les peuples attendent la lumière, tout en ignorant ce qu’elle est vraiment, Lui qui est l’homme de l’ancienne alliance, devient le témoin privilégié de cette espérance qui est en train de naître pour l’humanité ».
Siméon (dont le nom signifie « qui écoute »), un homme juste et pieux, très attaché au Seigneur, attendait « la consolation d’Israël ». C’est ainsi que les rabbins appelaient le Messie, le consolateur par excellence (Luc 2 : 27 ; Es. 40 : 1). On apprend que Siméon « avait été divinement averti par l’Esprit-Saint qu’il ne verrait pas la mort, que premièrement il n’eût vu le Christ du Seigneur » (Ps 25 : 14). Inspiré par le Saint-Esprit, malgré la présence d’autres enfants, il reconnaît tout de suite le Messie. Selon les saintes écritures, on sait qu’ « il bénit Dieu » et dit : « Seigneur tu laisses aller ton esclave en paix selon ta parole ; car mes yeux ont vu ton salut, lequel tu as préparé devant la face de tous les peuples ; une lumière pour la révélation des nations et la gloire de ton peuple Israël » (Luc 2 : 29-32). Siméon a compris que le salut promis est assuré et qu’il peut rendre son âme au Seigneur. Imaginons la joie de Marie quand elle entend les paroles de Siméon. Jésus est présenté « comme la Lumière qui vient éclairer les nations païennes ». Siméon a compris que c’est cet enfant qui apportera le salut à l’humanité.
Si nous avons entendu parler de Siméon, nous savons aussi qu’une prophétesse nommée Anne fait partie de ce scénario de la présentation de l’enfant Jésus au Temple. Cette vieille femme, veuve, connue pour sa grande piété et ses « conversations » avec Dieu, mène une vie solitaire. En voyant Jésus, elle réalise tout de suite qu’elle vient de rencontrer Dieu en la présence de Jésus. Elle se met à remercier Dieu, qui s’offre à elle, alors qu’elle ne lui a rien demandé. “Elle en parle à tous ceux qui attendaient que Dieu délivre Jérusalem.”
Elle devient l’écho de ce que Zacharie avait chanté en la naissance du Précurseur : ” Tu marcheras pour faire savoir à son peuple qu’il vient le sauver.” (Luc 1/77).
De cette reconstitution historique (comme si nous y étions !), il nous reste à garder au fond de notre cœur le Christ, lumière du monde, et à imaginer ces pèlerinages dans tous les hauts lieux dédiés à la Vierge Marie, au cours desquels tant de cierges allumés viennent illuminer le monde, apportant l’espérance aux pauvres, aux exclus, aux opprimés, aux malades, aux prisonniers, à tous ceux qui souffrent dans leur corps et dans leur âme.
Ce reportage serait bien incomplet si nous ne donnions quelques lignes à la journée de la vie consacrée, qui a lieu chaque année le 2 février, suite à une initiative de Jean-Paul II, datant de 1997. En effet, cette journée revêt une importance particulière pour toute personne consacrée, qui, inspirée par le don bouleversant du Christ, aspire à son tour à donner sa vie et à tout abandonner pour marcher à sa suite. “Parce qu’il est beau et juste de remercier le Seigneur pour le grand don de la vie consacrée, qui enrichit et réjouit l’Eglise par la multiplicité des charismes et le dévouement de tant de vies totalement données au Seigneur et aux frères”.
Et maintenant que (presque) toute la lumière est faite sur cette magnifique journée, il ne reste plus qu’à… faire sauter les crêpes !
Solange Strimon