Conte de noël de Vexilla Galliae
Valentin faisait semblant de dormir. Il ne voulait pas voir couler de larmes sur le beau visage de sa maman. Dieu sait qu’elle essayait de les retenir ces larmes, qu’elle s’efforçait de ne pas se laisser aller à la tristesse, au désespoir. Ainsi Dieu n’avait pas eu pitié d’elle, de cet enfant de douze ans qui luttait depuis si longtemps contre un cancer généralisé et dont le temps était compté.
Le grand patron de la clinique était passé voir le petit Valentin. Il ne savait pas comment réconforter cet enfant qui ne cessait de parler de sa maman. Il ne parlait jamais de lui, de ses souffrances, de sa peur de quitter ce monde. Non, il ne parlait que de sa maman et de sa petite sœur. Comment allaient-elles vivre sans lui ? Lui qui savait les faire rire, leur faire oublier qu’il allait bientôt retourner au ciel et qu’il ne pourrait plus faire semblant d’être l’homme de la maison, celui qui avait remplacé ce papa, parti on ne sait où et avec qui.
Valentin continuait de faire semblant de dormir. Il avait fait un drôle de rêve et voulait prolonger ce rêve avant d’en parler. Il volait au-dessus des nuages, assis sur une étoile d’or qui le conduisait près du petit Jésus, qui allait bientôt naitre dans une étable pour apporter aux hommes l’espérance et la vie éternelle. Deux rênes conduisaient l’étoile en agitant leurs grelots qui réveillaient les anges, lesquels venaient saluer ce petit garçon qui avait l’air si sage, si irréel, si transparent. Que venait faire cet enfant dans le ciel ? Avait-il pris rendez-vous avec son ange gardien pour lui confier une mission extraordinaire ? Était-ce encore un petit garçon ou déjà un ange ? Les commentaires allaient bon train dans cette partie céleste du ciel où passaient des myriades de rêves, portés par des nains qui ressemblaient assez curieusement à ceux d’un conte de fée. Où donc se dirigeait l’étrange cortège qui semblait tout à fait déterminé à se rendre à un rendez-vous très précis ?
Et soudain dans le ciel, le cortège arriva devant une immense muraille de coton blanc et doux, qui semblait s’être dressée au moment où le petit garçon se mit à chanter quelques notes d’un célèbre chant de Noël. Nous arrivions aux portes de Noël. Celles-ci étaient fermées. Sans doute y avait-il un code, une formule magique à prononcer, un geste à faire, enfin quelque chose qui relevait de l’extraordinaire. Valentin se mit à penser à son chat. Un très célèbre chat que tous les poètes de France connaissaient car il avait été associé à des concours de poésie internationaux. Il s’agissait de sa Majesté Pirate 1er, le très beau, le magnifique, celui devant lequel toutes les femmes se pâmaient tant il dégageait de lumière et d’intelligence, allant même jusqu’à inspirer les réponses dans des cas complexes, quand il les regardait de ses yeux verts émeraude. Valentin se dit que s’il invoquait très fortement son chat et Saint François d’Assise, qui lui avait sauvé la vie autrefois, il obtiendrait sûrement la formule pour que cette muraille s’ouvre devant lui.
Alors Valentin mit sa tête entre ses genoux et se mit à appeler son chat resté sur terre mais avec lequel il communiquait par télépathie. Le chat lui donna une curieuse réponse, à laquelle Valentin crut tout de suite sans se poser de question. Il répéta trois fois le mot en gardant les yeux fermés respectant la consigne lui avait été donnée. C’est seulement lorsqu’il réalisa que les rênes reprenaient la route qu’il ouvrit les yeux. Hé bien oui, le miracle s’était produit, la muraille avait disparu. Et Valentin se trouva soudain avec les rois mages devant la Vierge Marie, Joseph, les bergers, les moutons, l’âne, le bœuf. Mais l’enfant Jésus n’était pas encore né.
La Vierge regarda ce petit garçon, envoyé de terre et lui demanda de s’approcher d’elle. Valentin obéit. Marie lui demanda alors quel était son vœu le plus cher avant de quitter la terre et de rejoindre les anges. Valentin osa alors se confier à la Mère de l’Humanité. Il demandait à la Vierge Marie d’intercéder auprès de Louis XX pour que celui-ci prit en charge sa famille lorsqu’il ne serait plus là. La Vierge Marie sourit et l’assura qu’elle ferait parvenir en rêve au Prince Louis ce souhait. Valentin ne demandait rien pour lui, absolument rien, il voulait juste protéger sa famille.
Quand Valentin prit conscience que sa maman ne pleurait plus, il ouvrit les yeux et lui tendit les bras. « Maman, j’ai fait un drôle de rêve. Il faut que je te le raconte, même si celui-ci parait tellement étrange ». Valentin raconta longuement le rêve. Et au moment où sa petite âme quitta son corps comme épuisée par ce voyage dans le ciel, une infirmière entra très excitée et demanda à la maman si elle connaissait le Prince Louis XX.
La Direction venait de recevoir un appel du Prince qui assurait qu’il venait de prendre la décision pour ce Noël 2013 de venir en aide à certaines familles, dont celle du petit Valentin.
Solange Strimon
NB : Solange Strimon est Sociétaire de la Société des Gens de Lettres de France et des Poètes Français, auteur d’une quinzaine de recueils de poèmes et de nouvelles, préfacés par Gustave Thibon et Gérard Leclerc.