Les limites de la liberté de choix
Dieu, par la voix de l’ange, nomma son Fils Jésus, c’est-à-dire « Sauveur ». Ainsi, Dieu le Père donna sa vocation à son Fils, celle de sauver les hommes. Et Jésus accomplit Sa mission sur la Croix, bien qu’il fût tenté, en tant qu’homme, de ne pas répondre à sa vocation quand il demanda, sur le mont des Oliviers, si le calice ne pouvait être écarté, mais il se reprit aussitôt : « non pas ce que Je veux, mais ce que Vous voulez ».
Voilà, notre exemple à suivre ! Il expose d’ailleurs un trait général dans l’histoire des civilisations : les vocations temporelles sont données par le pères aux enfants et, souvent, dès la naissance, dès l’octroi des prénoms.
C’est évidemment un principe opposé à celui de la « liberté de choix » ou de « l’égalité des chances », arnaque monumentale que tout ceux de ma génération ont expérimenté dans leur chair. On nous fait croire, à tous et dès notre plus jeune âge, que nous choisissons, mais ce n’est pas vrai. Pour choisir, il faut avoir de l’expérience, être déjà grand, fort et ferme dans sa volonté, ce qui n’est jamais le cas chez les jeunes, et si peu chez les vieux. En fin de compte, nous suivons tous la voie que la Modernité nous donne à suivre : filières, écoles, postes, pions d’entreprises. Et pour ceux qui n’ont pas la force de suivre, ils sont expulsés sur le bas-côté, et vivotent par une hideuse « solidarité » sans charité aucune. Tout est à l’envers !
Par essence, chacun a pourtant une place à prendre dans a société, en fonction de sa vocation propre. Pour s’en rendre compte, toutefois, il faut nier frontalement le principe d’égalité et reconnaître que la meilleure société est celle qui discrimine parfaitement, au point que chacun devient incomparable dans son domaine, que chacun est bien à sa place, contribuant au bien commun et à son propre bonheur, dans l’optique de la vie éternelle.
La liberté de choix n’existe pas et, au fond, c’est une bonne chose ! Celui qui n’a pas le choix n’a qu’à penser à bien vivre hic et nunc, sans se soucier de « choisir » sans arrêt ce qu’il n’a, de toute façon, pas le pouvoir ni la capacité de choisir, et s’inquiéter, se tourmenter, au détriment de sa vie, de sa contemplation, de son action.
Les chefs prévoient et choisissent, c’est la politique : quelle charge, quelle responsabilité ! Quelle folie que cette démocratie qui veut généraliser les tourments de quelques élus de Dieu à tout un peuple ! C’est d’une perversité diabolique, car généraliser ces tourments conduit à fabriquer des victimes, qui deviennent bourreaux en raison de leur amertume et de leur jalousie. Voilà le cercle vicieux démocratique !
Le cercle vertueux de la monarchie légitime traditionnelle et chrétienne consiste, au contraire, à discriminer en fonction des vocations propres, du bien commun et de l’obtention de la vie éternelle. On ne cherche pas à plaquer des modèles de lois sur des réalités diverses, comme ces énarques qui inventent des systèmes ou ces discoureurs de « diversité » une uniformité pratique désolante[1].
Alors, autant accepter rapidement la réalité : nous n’avons, en pratique, pas la liberté de choix. Les cas où nous choisissons sont restreints et toujours limités à des choses contingentes, mais pour les grandes orientations de la vie, nous avons aucun choix. Les grandes décisions sont rares, par définition, et la frénésie démocratique démontre par l’absurde que nous n’avons plus de liberté de choix : les vrais choix se mûrissent dans le calme et la prière, ils sont guidés par une volonté forte et une intelligence bien formée, toutes choses qui ne sont plus du tout communes dans notre temps…
Alors, acceptons la Providence, et agissons minute par minute selon les volontés du Très-Haut, dans l’exemple, dans nos devoirs, et le reste suivra. Et vous verrez, vous serez bien plus sereins et calmes ! Notre affaire est de vivre saintement, minute par minute, dans la perspective éternelle. Alors seulement, nous pourrons aussi bâtir des lignées séculaires et de grandes missions !
Paul-Raymond du Lac
Pour Dieu, pour le Roi, pour la France !
[1] L’on constate d’ailleurs comment le discours et la réalité divergent en révolution. On parle de diversité car, en tant qu’hommes, nous vivons au quotidien dans le singulier, bien que nous nions ce singulier dans toutes nos actions. Nous nions, du même coup, la seule universalité véritable des principes, en plaçant cette universalité dans des objets relatifs, forme d’idolâtrie nouvelle.
Cette idolâtrie nouvelle, par ailleurs, est pis encore que l’idolâtrie païenne en ce sens que ce qui est rendu absolu n’est plus une réalité concrète (comme un totem ou un veau d’or), mais une nuée subjective et conceptuelle qui peut changer toutes les trente secondes, dans un relativisme effréné qui complique toute redécouverte du seul absolu véritable, le Dieu Créateur et trinitaire.
Tout ce que vous écrivez est vrai, mais il faut tout de même ouvrir les yeux sur le fait que cette sacralisation du libre choix est en grande partie l’oeuvre de l’Eglise. Le Concile de Trente, en effet, a supprimé la condition du consentement paternel pour la validité des mariages religieux (donc civils). Cette réforme contient en germe beaucoup de catastrophes actuelles, et ce péril ne passa pas inaperçu des pouvoirs royaux et impériaux de ce temps-là: au début, la règle ne fut appliquée que dans les états ecclésiastiques. Patiemment l’Eglise imposa le consentement mutuel des époux et d’eux seuls. J’avais un ami jésuite qui disait ” Vers le début des années 1930, nous avions réussi à substituer le mariage par consentement mutuel au mariage arrangé, encore majoritaire quarante ans plus tôt. C’était une grande victoire, mais le Malin a arraché cette victoire en flétrissant le sacrement des hommes. ” Le Malin se trouvait peut-être déjà dans la “grande victoire”, hélas.
Oui, mais le Christ lui-même nous propose, nous invite, nous exhorte, toujours en nous laissant le choix final…il ne nous oblige jamais ! A nous de prendre la bonne décision… et pour nous y aider, nous avons les Saintes Ecritures et les prophètes !
Il est bien tard, Cher Monsieur. Je pense que l’Eglise, sans le vouloir, sans doute, et par angélisme, a ouvert une porte qui aurait dû rester fermée. Nos rois avaient vu le danger, et l’Eglise galllicane approuva les nombreux édits qui s’opposaient à la Réforme tridentine, dont les fruits se sont révélés empoisonnés. Peut-être ma réflexion vous paraît-elle choquante, mais comme le disait un évêque, il était infiniment plus facile de vivre dans la dignité quand la société nous y aidait. Aujourd’hui, le mariage est minoritaire et les deux tiers des unions légitimes se terminent en divorce. C’est un fait. Ne faudrait-il pas y réfléchir? Après tout, il est possible de reconstruire ce qui a été inconsidérément défait.