Tout est autorité !
L’autorité n’a pas bonne presse dans le monde moderne, et pourtant…
A-t-on vu un siècle plus servile et gobeur de mensonge que le nôtre ? Il faut chercher et il est possible qu’on ne trouve aucun lieu et aucun temps aussi stupide que le nôtre.
Il ne faut pas s’étonner, les gens de notre siècle ne sont a priori pas plus bêtes que ceux d’un autre siècle – encore que ce genre d’assertion ne vaut que pour nos réflexions humaines, car la Providence, elle, peut bien décider de faire naître une concentration élevée de mauvaises âmes à tel ou tel siècle, pour leur salut, mais cela seul Dieu le sait et nous autres pauvres hommes nous ne pouvons rien dire à ce sujet.
Nous sommes les mêmes hommes qu’autrefois, avec la même nature. Donc nous ne vivons que par et pour l’autorité. C’est une réalité naturelle qui ne change pas avec les temps.
Cette assertion en choquera certain, cela ne change pas la réalité. Elle peut être amère parfois, ou même dure, mais la réalité est là, et il vaut mieux en avoir conscience.
Car réfléchissons-y quelque peu. Au fond, les choses que nous connaissons sont quasiment toutes issus d’un argument d’autorité. Toutes. Ou presque. Celles que nous déduisons de nous-même, pour ceux qui déduisent, même les plus grands philosophes – ou plutôt d’abord les plus grands philosophes, qui, plus que des génies de la raison, sont avant tout ceux qui savent quelle autorité ils peuvent croire et qui dit vrai sans examen profond– sont au fond en nombre très restreint, et sur des sujets au fond secondaires.
Regardez : réfléchissez à votre enfance. Nous croyons tout ce que disent nos parents et nos professeurs, sans examen. C’est naturel et nécessaire. Car nous ne pouvons d’abord pas examiner, cela vient plus tard. D’où l’importance que l’autorité ne dise que des choses vraies, car sinon la réalité et sa connaissance ne sont pas en adéquation, ce qui crée de douloureuses déceptions si ce n’est de profondes souffrances, sans compter le désordre apporté à l’action qui se fonde sur des critères faux ou biaisés, ou qui poursuit des chimères. L’autorité existe toujours et elle a une responsabilité écrasante.
Le plus intéressant est certainement de constater que même dans nos sociétés qui nient l’autorité, par principe tout reste autorité. C’est la preuve par l’absurde. Nier l’autorité ne la fait pas disparaître, elle lui enlève juste toute responsabilité, et la donne au tout venant, c’est simple…
Tous les poncifs pseudo-scientifiques sont un exemple parfait : tout scientifique honnête sait que la théorie de l’évolution est fausse et pourtant nous croyons qu’elle est vraie et scientifique. Car on nous l’a dit.
Idem pour tant de chose : démocratie, liberté, égalité, fraternité…Sans fin.
Car on nous l’a dit.
La question, c’est qui ?
Avant, Dieu était reconnu à sa place : soit comme l’autorité suprême. Et les autres autorités à leur place : vicaire du Christ, lieutenant de Dieu sur terre, les parents et les ancêtres, les anciens, les maîtres et toute la cascade hiérarchique. L’autorité, hors de Dieu, n’était pas monolithique, loin de là.
Autorité politique (famille, village, province et royaume, etc.), religieuse (père, roi, clercs, pape, etc.), dans les arts et les techniques, dans les métiers, dans la sagesse. Chaque autorité hors de Dieu avait certaines prérogatives et certaines limites.
La question est de savoir à quelle autorité se soumettre et donc se fier. D’où la rareté de l’obéissance servile qui sévit tant dans notre siècle : tout autorité était soumise à Dieu, et donc à la loi naturelle (et surnaturelle), et les nombreuses autorités dans les différentes dimensions assuraient, malgré les heurts dus à la blessure du péché originel, une harmonie d’ensemble indéniable et une saine lutte pour conserver l’ordre dans tous les domaines, soit l’affirmation de la réalité comme réalité.
Notre temps, en ce sens, est tout autorité, comme auparavant. Rien n’a changé, puisque nous sommes les mêmes hommes : on fait juste croire qu’il n’y en a pas d’autorité, ce qui revient à rendre tout un chacun victime de tous les bandits, manipulateurs, menteurs et tyrans qui peuplent le monde – dont le premier tyran est soi-même, car qui peut nier qu’il est affreusement difficile de vouloir ne serait-ce qu’entendre des vérités même évidentes (tu vas mourir, tu es un homme, tu as un sexe, tu es né dans une lignée, etc) alors ne parlons même pas des vérités moins évidentes mais que la sagesse des temps a permis de mettre en évidence (la loi naturelle, la politique naturelle) et les vérités surnaturelles accessibles seulement par la révélation…
Alors il s’agit de reconnaître que tout autorité : là alors il devient possible d’user à sa juste mesure et selon son génie propre de sa raison pour apporter sa pierre à l’édifice.
Mais quelle bêtise et inconséquence de croire que chaque individu pourrait reconstruire toute la sagesse de milliers de générations… C’est évidemment tellement faux… Nous avons tous ancré en nous tout ce que l’on nous a dit dans notre jeunesse, car nous croyons les autorités naturelles, et cela est bon. Ce qui est mal, c’est fouler notre devoir lorsque nous sommes cette autorité – et nous avons tous une parcelle d’autorité en quelque domaine ou quelque endroit – et parler légèrement, agir en mal, dire des mensonges, etc.
Heureusement, l’autorité de la nature – au sens de la création – elle, ne peut être fourvoyée par des mauvaises intentions : d’où l’importance de la contemplation de la nature depuis l’enfance, car elle donne un bon sens minimal. Cela ne saurait suffire, si le bon Dieu a voulu nous donner de nombreuses autorités, ministres de la sienne suprême, ce n’est pas pour rien : seul par ce moyen nous pouvons atteindre notre fin ultime.
Et surtout l’autorité de la Révélation, celle de Dieu directement, qui éclaire tout sous le jour de la lumière surnaturelle.
Pour Dieu, pour le Roi, pour la France
Paul-Raymond du Lac