Politique

Un big-bang de droite

La manif pour tous, et plus largement la droite, semble sombrer dans le vieux travers qui a toujours guetté les forces réactionnaires françaises : la dispersion. Mais, alors qu’Internet et les réseaux sociaux ont métamorphosé le militantisme, doit-on voir un affaiblissement ou une pérennisation de l’élan contestataire?

Notre lecteur averti, habitué à nous lire, se dira sans doute qu’il est plus que douteux que nous fassions référence ici à la théorie pseudo scientifique du big-bang, fadaise anticléricale dont on peut, à l’instar de la soit disant évolution de Darwin, tout à fait se passer en lisant la Genèse. 
Mais foin de cette autodérision récréative qui, elle, est bien la marque des gens de droite dans ce pays, les distinguant des gens de gauche qui eux se prennent au sérieux. A tort.

Quand on s’immerge rapidement dans l’histoire de la droite en France on se rend compte que bien souvent ce n’est pas les idées de gauche qui triomphent, mais la droite qui, embourbée dans ces querelles intestines, se tire une balle dans le pied et ne parvient pas à faire front contre le progressisme écœurant de nos adversaires.
Ainsi l’année dernière, La Manif Pour Tous (que nous abrégerons dorénavant sous le sigle hilarant de LMPT) qui était déjà un rassemblement de divers collectifs plus ou moins influents, s’est déjà divisée en deux grands courants : LMPT qui a gardé son cadre bien gentil, et le « Printemps Français » nébuleuse (encore une référence astronomique) plus ou moins formée et davantage marquée par un activisme radical. Avec Frigide Barjot et « l’Avenir Pour Tous » la galaxie LMPT se trouve donc déjà dotée d’un nombre de corps célestes convenables qui gravitent autour d’un soleil commun : le mariage gay et ses conséquences.           

Si on observe un petit peu ce qui se fait dans les différents mouvements de droite, on note aussi que des jeunes issus de LMPT (je ne me lasserai jamais de ce sigle) sont plutôt favorables au « noyautage » de l’UMP* alors que ce parti est déjà considérablement divisé, du moins à l’échelle de ses cadres, par différents courants. Entre le boboïsme de Nathalie Kosciusko Morizet, la mollesse portée en étendard d’un François Fillon découvrant soudainement -et trop tard- les bienfaits du discours tribunicien, le consensualisme d’un Copé qui se retrouve constamment entre deux chaises, et le dynamisme tonique mais inefficace -puisque privé d’appui au sein de l’appareil- de Guillaume Peltier, on ne peut pas dire que la paix et l’harmonie permettent une lutte efficace contre le parti dit « socialiste », cible prioritaire de ces temps troublés.

Portons notre regard un peu plus à droite, et notons qu’au Front National, malgré quelques dissensions qui opposent majoritairement une ligne proche de Jean Marie le Pen et une autre plus proche de Marine le Pen, il est notable que le parti ne soit pas encore le fruit de luttes intestines et fratricides. Le parti est jeune, tout au moins dans l’influence nouvelle qu’il a sur le paysage politique français : laissons-lui le temps de se diviser!

Et pourtant (est-ce le fruit de la prise de pouvoir des socialistes ?), rarement la droite n’a paru aussi efficace, aussi capable de donner des coups de manière simultanée si ce n’est même coordonnée. Doit-on en conclure que cette « galaxisation » de la droite, cet éclatement de LMPT et de l’UMP, plutôt que de la détruire, l’a lancée dans une phase d’expansion continue ? Une sorte de Big-Bang politique ? 

L’idée peut avoir une certaine pertinence. Le développement des réseaux sociaux et des moyens d’information numérique, parallèlement à l’affaiblissement de la presse écrite (tant en terme de tirage que de qualité du contenu !) a rendu plus nécessaire que jamais la bataille de la communication, mais a aussi considérablement accru le poids de ces informations dans la construction idéologique de l’électeur moyen. 

Une revue royaliste déplorait que « Une fois la batterie de leur ordi portable déchargée, [les étudiants] n’ont tout simplement plus de cerveau » (sic).  Je m’associe volontiers à cette remarque, et irai même un peu plus loin : de nos jours une proportion significative de la population s’informe exclusivement sur Internet… Cela peut paraître particulièrement pauvre, mais il faut bien se rendre compte que l’on trouve de tout sur Internet. Le meilleur (par exemple nous, en toute objectivité et modestie bien sûr) y côtoie le pire (par exemple « Le Monde »…) sans que personne n’aille vérifier la valeur des articles, la qualité des sources, ou ne fasse une critique du document à partir de l’environnement politique de l’organe de presse qui fournit l’information.

Parlons clairement : l’électeur moyen, veau qu’il est, manquant de temps pour se lancer dans une enquête précise des articles qu’il lit, croit candidement à tout ce qu’on voudra bien lui mettre sous le nez. Et, entre deux informations contradictoires, il choisira celle qui sera représentée dans le plus d’articles. Extension de la pensée de base de la démocratie : la masse a forcément raison par rapport à l’individu. Raisonnement dont peuvent témoigner Jésus Christ, Louis XVI et les résistants de Juin 1940. 

Le fait notable de ce paysage éclaté de LMPT, de l’UMP, et même de nos mouvements royalistes divisés en chapelles Légitimiste et Orléaniste (ordre alphabétique, pour ne froisser personne !) c’est que ces différents mouvements, mouvances internes, disposent de médias : sites Internet, newsletters, tracts, affiches, périodiques papiers, etc.

Sur le principe, les centralisateurs que nous sommes (tradition française oblige) y voient une perte d’efficacité et de moyens.
Mais dans les faits, le lecteur un peu perdu politiquement, sera d’autant plus convaincu qu’il lira les mêmes informations, présentées de manière différentes, sur des sites distincts.

Tempérons un peu toutefois : la communication n’est pas l’alpha et l’oméga de l’action politique (et il serait bon que certains d’entre nous lèvent parfois le nez de leur clavier pour organiser la diffusion de leurs idées dans la vie réelle) et il demeure vrai que c’est l’union et le regroupement de personnes différentes vers un certain nombre d’objectifs communs qui font la force d’un groupe politique : le Front National nous en donne un exemple vibrant ces temps derniers.

Ainsi la gauche à l’idéologie du progrès pour ligne d’horizon, la création d’un homme dit « libre » c’est à dire absolu, qui soit capable de s’autodéterminer… C’est le fond philosophique du Marxisme et du Nazisme.
Mais à droite nous avons été décapités de cette ligne d’horizon, un certain 21 Janvier 1793.
Nous espérons sincèrement que le point commun, l’avenir commun « pour tous », oserions nous avancer espièglement, serait de tempérer nos institutions menacées de ruine à cause de la mauvaise application d’une démocratie débridée, par le rétablissement d’un Monarque père de la Nation…

Alors que nous observons la métamorphose radicale de notre univers politique, il y a, à notre sens, la place pour nos idées.

A nous de les imposer. 

Roman Ungern 

*http://www.lepoint.fr/politique/exclusif-ces-jeunes-de-la-manif-pour-tous-qui-veulent-noyauter-l-ump-16-10-2013-1744574_20.php

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