Commentaire de l’« Abrégé de l’Histoire de France » de Bossuet. Partie 32 François Ier : le roi de la Renaissance
Texte de Bossuet :
François Ier. suite
Tout était alors favorable à l’empereur ; le roi d’Angleterre lui prêta deux cent cinquante mille écus. Il retint un peu de temps avec cet argent les troupes qui se débandaient ; mais ce secours était faible pour ses besoins, et les confédérés furent obligés d’abandonner toutes leurs conquêtes, excepté la ville de Milan, celle de Novare, Pavie et Alexandrie, où le peuple nourrissait la garnison.
Cependant le roi, affligé des pertes qu’il avait faites, songeait à rétablir ses affaires. Il avait obtenu des Suisses seize mille hommes pour recouvrer le Milanais. Colonne, de son côté, renforcé de quatre mille Allemands, que le peuple de Milan avait levés à ses frais, mit le siège devant le château, et Lautrec, s’étant joint aux Vénitiens et aux Suisses, l’assiégea lui-même dans son camp. Il s’y était fortifié d’une terrible manière, en fermant la place d’un double fossé, pour empêcher les sorties de la garnison et le secours du dehors.
Durant tout ce temps, il n’est pas croyable combien Moron aida à soutenir le parti ; il persuada aux chefs de rétablir la maison Sforce, et que c’était le seul moyen de retenir le peuple dans une bonne disposition. Il fit donner le duché au jeune Francisque, homme sans vertu et sans mérite, qui jamais ne fit rien de considérable et n’eut que le nom de duc : aussi n’avait-on besoin que d’un nom pour amuser le vulgaire.
Après cette nomination, Moron fit avancer le nouveau duc à Pavie, pour l’introduire à la première occasion dans Milan, qui le désirait avec ardeur. Pour tirer de l’argent du peuple, il suscita un Augustin qui prêchait contre les Français, contre lesquels, disait-il, la colère de Dieu était déclarée, et qu’il fallait tout exterminer. Ainsi, mêlant la religion aux intérêts politiques, il tirait tout ce qu’il voulait.
Lautrec cependant incommodait beaucoup la ville ; il désespéra de forcer Colonne dans ses lignes, qui étaient trop fortes ; mais il brûlait les moulins, ravageait la campagne, et empêchait les convois; il coupa les canaux qui portaient de l’eau à la ville, et enfin elle avait à craindre les dernières extrémités, car il n’était pas possible de fournir longtemps des vivres aux bourgeois et à l’armée ; mais Moron, durant ces misères, ne s’oublia pas: il supposa des lettres interceptées, sous le nom du roi, comme s’il eût écrit à Lautrec de prendre la ville à quelque prix que ce fût, et de n’y laisser pierre sur pierre : ainsi, le peuple effrayé se résolut de tout souffrir.
Cependant le maréchal de Foix revenait de France avec quelques troupes et de l’argent. Il se résolut en passant, d’assiéger Novare, espérant que le feu du château, qui était à nous, jetterait l’épouvante dans la place : il avait fait une brèche, et il se préparait à donner l’assaut ; mais les Suisses refusèrent d’y aller, disant pour excuse qu’ils n’étaient pas faits pour les sièges. Le maréchal, sans s’étonner, fit descendre de cheval deux cents hommes d’armes qu’il avait, se mit à leur tête, força la muraille guerre et passa tout au fil de l’épée. Il punit ainsi la rage d’un peuple qui avait égorgé les Français et en avait mangé le cœur.
Comme il approchait de Milan, Lautrec fut obligé d’envoyer au-devant de lui une partie de l’armée pour l’escorter ; mais il ne put empêcher que le jeune Sforce, qui attendait à Pavie, n’entrât de nuit à Milan. L’argent que le maréchal apportait ne dura guère, et la plus grande partie tomba dans l’eau en passant dans un bac où la cavalerie se jeta trop tôt.
Après l’entrée du duc, le peuple qui l’adorait s’encouragea tellement à se défendre, qu’il n’y avait non plus moyen de le laisser que de forcer Colonne dans ses lignes ; ainsi Lautrec leva le siège et alla droit à Pavie. Le marquis de Mantoue, qui y commandait, ne soupçonnait rien parce que Lautrec était au-delà du Tésin. Cette rivière se trouva guéable, et la ville pensa être surprise : l’entreprise manqua par la faute d’un gentilhomme nommé Colombière, qui eut peur cette fois qu’on l’appelât « sans peur. » Nous perdîmes quatre cents hommes qui s’étaient trop avancés, et Lautrec ne laissa pas de former le siège ; mais le Tésin s’étant débordé, les vivres ne venaient plus dans le camp, et il fallut se retirer.
Il venait alors de l’argent de France ; et comme Lautrec allait au-devant pour faciliter le passage, les Suisses voulaient être payés sans attendre un seul moment, sinon ils protestaient de s’en retourner ; mais pour montrer que ce n’était pas la crainte qui les obligeait à la retraite, ils priaient Lautrec de les mener sur le champ contre l’ennemi, et Albert de la Pierre, auteur du conseil, offrait d’aller à la tête. Depuis l’arrivée de Sforce à Milan, Colonne s’était mis en campagne, et il s’était retranché dans le jardin d’une ferme nommée la Bicoque.
Ce jardin, assez spacieux pour y mettre l’armée en bataille, était d’ailleurs agréable, et il y avait beaucoup d’eau ; les allées en étaient traversées de plusieurs petits canaux qui se jetaient dans un fossé à fond de cuve, dont le jardin était entouré ; de sorte que ce lieu était fortifié par la nature, et il ne fallut que le border d’artillerie pour le rendre inaccessible. Les Suisses ne laissèrent pas d’en vouloir faire l’attaque : on n’en était pas d’avis au conseil de guerre ; au contraire, on conseillait à Lautrec de laisser aller les Suisses et de jeter dans les places le reste des troupes : on assurait qu’il n’y avait rien à craindre des ennemis, et que la division se mettrait bientôt dans une armée toute composée de mercenaires, à qui il n’y avait point d’argent à donner.
Malgré tous ces avis, Lautrec, qui était d’un naturel impétueux, et d’ailleurs animé contre les Suisses, dit brusquement qu’il fallait combattre, parce que si ces téméraires gagnaient la victoire, les affaires du roi en iraient mieux, et s’ils étaient battus, ils seraient punis de leur défection et de leur témérité. Il partagea l’armée en trois : le maréchal de Foix en avait une partie où étaient les Italiens soudoyés par le roi ; François-Marie de la Rovère, duc d’Urbin, qui avait recouvré depuis peu son duché, commandait les Vénitiens ; Lautrec s’était réservé le reste de l’armée, où étaient presque tous les Suisses.
L’attaque commença par eux, et comme ils furent dans un vallon à la portée du mousquet, Anne de Montmorency, qui les conduisait, les pria d’attendre qu’une autre aile de notre armée et notre artillerie pussent agir en même temps. Ils s’obstinèrent à donner sans vouloir différer un moment, et quoiqu’ils eussent perdu mille hommes avant seulement de pouvoir approcher du fossé, ils se jetèrent à corps perdu dans l’eau qui passait leurs piques ; ils en sortirent à la fin avec de grands efforts, et se mirent à grimper ; mais autant qu’il en paraissait, autant y en avait-il de tués. Les ennemis riaient en les tuant, et Albert de la Pierre, furieux de voir tant de braves gens à la boucherie, était encore plus outré de ce qu’on les tuait en se moquant.
Cependant le maréchal de Foix, qui devait se saisir du pont de la ferme, s’en était approché sans perte à la faveur d’un coteau ; mais il trouva la garde du pont plus forte qu’il ne l’avait espéré. Il ne laissa pas de pénétrer assez avant dans le camp ; là, il fut abandonné des Italiens et enveloppé par les ennemis, malgré lesquels il se dégagea et se retira en bon ordre. Au milieu de ce tumulte, le duc d’Urbin était en repos avec les Vénitiens, et s’était mis à couvert. On voyait bien qu’on pouvait espérer quelque chose du côté du pont ; mais les Suisses rebutés refusèrent même de demeurer en contenance de gens qui voulaient combattre.
Enfin, après avoir vainement tenté la force, Lautrec voulait expérimenter si la ruse réussirait mieux. Il fit avancer des gens avec des écharpes rouges, comme s’ils venaient de Naples, envoyés par le vice-roi pour le secours de Colonne : ils furent bientôt découverts, et il fallut abandonner l’entreprise. Les ennemis cependant n’eussent pas évité leur perte, si on avait cru le maréchal de Chabannes, qui proposa de les bloquer. Il ne fallait que huit jours pour les faire périr de famine dans leur camp ; mais les Suisses, troublés de la mort d’un si grand nombre de leurs compagnons, ne voulurent rien entendre et s’en allèrent.
Aussitôt après la retraite de nos gens, la sédition se mit dans le camp des ennemis. Les Allemands demandèrent à Colonne une montre et le prix ordinaire de la victoire. Colonne disait qu’il n’en devait point, parce qu’il n’y avait point eu de bataille. Sur cela ils se mutinèrent : le général pensa périr dans cette sédition, et il eut une peine extrême à l’apaiser. Un peu après il nous surprit quelques places, et s’approcha de Crémone, la plus forte et la mieux munie que l’Italie eut alors. Le maréchal de Foix s’y était jeté, et s’y défendait avec sa vigueur ordinaire, attendant le secours de quatre cents lances et de dix mille hommes de pied que l’amiral amenait.
Ce favori, enflé de sa conquête de Fontarabie, se croyait capable de tout et se fit donner le commandement d’Italie. Il n’eut pas sitôt quitté les côtes d’Espagne, que Fontarabie fut assiégée par le prince d’Orange. Le roi d’Angleterre, irrité contre François, à qui cette place avait fait refuser la paix, consentit à payer la moitié des frais de ce siège ; mais le comte de Lude le soutint avec une vigueur qui fit bientôt perdre aux Espagnols l’espérance de le forcer ; de sorte qu’ils se réduisirent à le prendre par famine.
Pendant que l’amiral préparait ce qui était nécessaire pour passer en Italie, et que le maréchal de Foix se défendait à Crémone, Lautrec était sur le territoire de Bresse, où il eut le déplaisir d’apprendre qu’Arone, place importante où il mettait son argent, avait été surprise par les ennemis. Ce qui lui restait de troupes ne subsistait plus que par les Vénitiens, qui se lassèrent enfin de les nourrir ; et Lautrec, accusé en France de la perte du Milanais, s’y rendit pour se justifier, il fut très-mal reçu du roi, qui ne daignait le regarder, loin de vouloir l’entendre ; mais le lendemain le connétable dit en plein conseil qu’il l’avait entendu, et qu’il avait de grandes raisons pour se justifier et des avis importants à donner pour le service. Sur cela on le fit venir, et d’abord le roi lui reprocha qu’il lui avait fait perdre le plus beau duché de la chrétienté.
Lautrec, sans s’étonner, répondit que c’était un grand malheur, mais qu’il fallait voir par la faute de qui il était arrivé. Ensuite il raconta comment l’argent lui avait toujours manqué, et que, faute d’en avoir, il n’avait pu retenir les troupes ; qu’à la vérité, si l’armée n’eût été composée que de Français, il aurait pu leur persuader d’attendre, et qu’en effet la cavalerie avait servi dix-huit mois sans paye ; mais que les Suisses et les autres troupes n’avaient pas le même zèle pour le service, et se débandaient si on ne les payait à point nommé.
Le roi parut étonné de cette réponse et crut lui fermer la bouche, en lui disant qu’il avait commandé qu’on lui envoyât à diverses fois de grandes sommes. Lautrec dit qu’il en avait touché quelques-unes, mais toujours trop tard et lorsque le mal était sans remède ; qu’au reste, le plus souvent il n’avait reçu que des lettres et des promesses sans effet. « Mais, du moins, poursuivit le roi, vous avez touché les quatre cent mille écus que je défendis si expressément de détourner. » Il entra dans une extrême colère, quand il sut qu’elle n’avait pas été payée, et manda aussitôt Samblançai, trésorier de son épargne, pour lui en demander la raison. En attendant, il reprocha à Lautrec que Colonne, qui n’avait pas eu plus d’argent que lui, avait mieux fait ses affaires.
Lautrec ne manqua pas de réplique ; il répondit que Colonne avait tout le pays pour lui ; au lieu que le peuple, maltraité par les Français, par la nécessité où ils étaient, avait pour eux une haine implacable. À ce coup le roi avait peine à se modérer, tant il était au désespoir de voir un duché si important perdu faute d’ordre. Il fut bien plus en colère, quand il apprit de Samblançai que dans le temps qu’il allait envoyer l’argent, Madame était venue en personne demander toutes ses pensions et appointements, le menaçant de le perdre s’il ne le payait sur l’heure, encore qu’il lui montrât qu’il n’y avait dans les coffres que la partie destinée pour le Milanais, et qu’elle avait pris sur elle de faire agréer la chose au roi : mais elle n’avait eu garde de lui en parler, et le roi l’ayant mandée, elle fut bien étonnée d’entendre les reproches qu’il lui fit en plein conseil.
Elle ne s’en défendit qu’en rejetant la faute sur le malheureux Samblançai : elle ne nia pas ce qui était constant, qu’elle s’était fait payer de ses appointements ; mais elle soutint que Samblançai ne l’avait point avertie que ce fut de l’argent du Milanais, et pressa le roi si violemment de le faire arrêter, qu’il en donna l’ordre sur-le-champ. En se levant, il dit à Lautrec qu’il était homme d’honneur, mais négligent et trop opiniâtre. Pour Samblançai, le chancelier, dévoué à Madame, aigrit le roi contre lui ; on fit son procès par commissaire, et le chancelier présida à ce jugement : il fut condamné à être pendu par les artifices de Gentil, un de ses juges, et exécuté publiquement. Le roi, qui connut, quelques années après, son innocence, put bien rendre l’honneur à sa mémoire et faire mourir le juge inique par les artifices duquel il avait été condamné ; mais il ne put rendre la vie à l’innocent, ni effacer cette tache de son règne.
Les affaires du Milanais achevèrent bientôt de se ruiner. La division se mit dans la garnison de Crémone, faute d’argent ; et les Italiens menacèrent de livrer une porte à l’ennemi. Le maréchal de Foix leur en empêcha ; mais ne pouvant plus se fier à eux, il fit sa composition, à condition cependant qu’il aurait trois mois pour attendre le secours d’une armée royale ; après quoi il rendrait la ville et toutes les autres places du Milanais, à la réserve des châteaux de Crémone, de Novare et de Milan. Colonne cependant assiégea Gènes, et le connétable fit résoudre qu’on enverrait au secours le jeune duc de Longueville, prince de grande espérance ; il trouva les affaires en mauvais état : il y avait une brèche qui obligea les assiégés à capituler. Pendant la capitulation la place fut surprise et pillée.
On désespéra en France de sauver le Milanais, et l’amiral qui était auprès d’Ast, fut rappelée. Le maréchal de Foix abandonna les places au temps convenu, et revint en France. Dans les autres endroits, la guerre ne fut pas si malheureuse pour la France ; le comte de Lude tenait ferme dans Fontarabie, et la garnison était résolue à périr plutôt que de se rendre. Il y avait déjà dix mois qu’il se défendait, quand le roi, ne voulant pas laisser mourir tant de braves gens, envoya le maréchal de Châtillon pour les dégager. Il mourut sur le chemin ; Anne de Montmorency fut fait maréchal de France en sa place, et le commandement de cette armée fut donné au maréchal de Chabannes. Il força les lignes avec plus de perte. Lude fut rappelé pour recevoir la récompense de ses services, et on laissa le gouvernement à Frauget, homme de réputation, mais au fond de peu de mérite.
Cependant le roi d’Angleterre déclara la guerre ouvertement ; il y fut engagé par l’empereur, qui le vit en passant pour s’en retourner en Espagne. Les Anglais vinrent à Calais sous la conduite de Sulfolk, mari de la veuve de Louis XII, et investirent Hesdin, avec Bure, gouverneur des Pays-Bas. Le comte de Vendôme, qui commandait notre armée sur cette frontière, ne se sentant pas assez fort pour leur résister en campagne, renforça la garnison et jeta dans la place quelques officiers, qui se défendirent quarante-deux jours. Cette défense donna le temps aux garnisons voisines de s’assembler et d’assiéger les ennemis dans leur camp. Enfin les pluies survinrent, les maladies et la désertion des soldats obligèrent Suffolk à repasser en Angleterre.
Durant ces divisions des Chrétiens, l’ennemi commun ne s’endormait pas. Soliman II, empereur des Turcs, prince entreprenant et belliqueux, se rendit maître de Belgrade en Hongrie, et la défense admirable du grand maître Pierre de Villiers de l‘Isle-Adam ne l’empêcha pas d’emporter Rhodes, où étaient alors établis les chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem. Depuis ce temps ils errèrent en divers lieux, jusqu’à ce que Charles V leur donnât Malte, chose qui ne lui fut pas moins utile que glorieuse, puisqu’elle lui servait à mettre à couvert son royaume de Sicile. Il ne leur fit ce présent que cinq ou six ans après la perte de Rhodes, et leur première retraite fut à Rome, où le Pape Adrien les fit recevoir.
Ce bon Pape était arrivé à Rome, avec de grands desseins pour la paix, et tout ce qu’il devait à l’empereur ne l’empêcha pas de songer qu’il devait encore plus à toute la chrétienté, dont il était le Père commun. Occupé de cette pensée, il avait refusé à l’empereur de l’attendre à Barcelonne, parce qu’il ne voulait point se rendre suspect au roi. Cependant le duc de Sesse et milord Dudlei, ambassadeurs de l’empereur et du roi d’Angleterre, pressaient les Vénitiens de se joindre à eux ; et le roi, pour les obliger à renouveler l’alliance, leur promettait d’envoyer bientôt une grande armée en Italie.
Montmorency, et, depuis, l’évêque de Bayeux leur firent des propositions si avantageuses, qu’ils étaient ébranlés en faveur du roi, et les emportements des ennemis semblaient les déterminer à ce parti, car ils vinrent audacieusement déclarer en plein sénat que si, dans trois jours, pour tout délai, on ne leur faisait une réponse favorable, ils allaient se retirer. Le sénat, étonné d’une manière d’agir aussi hautaine, fut prêt à conclure avec les Français ; mais une lettre de Badouare, ambassadeur de la république en France, les fit tout d’un coup changer de dessein.
Cette lettre portait que le roi, uniquement occupé à ses plaisirs, ne songeait que par manière d’acquit aux affaires d’Italie et à la guerre; qu’au reste, quand il voudrait la soutenir, il n’était plus en état de le faire, par les dépenses excessives qui avaient épuisé ses finances ; qu’il n’y avait plus moyen de remplir ses coffres qu’en recourant aux voies extraordinaires, qui feraient crier le peuple et exciteraient quelque révolte ; que la disposition y était déjà tout entière, et même que le connétable, initié de la persécution que lui faisait Madame, qui voulait le dépouiller de ses biens, traitait secrètement avec l’empereur ; que la cabale était grande dans la cour et dans tout le royaume, et que la France avait à craindre une révolution universelle.
Ces raisons persuadèrent au sénat qu’il n’y avait rien à espérer de François, en sorte qu’il conclut la ligue avec l’empereur et le roi d’Angleterre. Il est vrai que le connétable était étrangement persécuté de Madame, qui lui disputait les biens de la maison de Bourbon. Ce prince, quoique cadet de cette auguste maison, les avait toujours prétendus, en vertu d’une ancienne substitution par laquelle, dès l’origine, ils devaient passer de mâle en mâle ; et néanmoins, pour éviter tout procès, il avait été bien aise d’épouser Susanne, unique héritière de Pierre, dernier duc de Bourbon, qu’Anne de France, sa mère, lui offrit. Le mariage avait été célébré avec grande solennité sur la fin du règne de Louis XII, qui avait signé au contrat, avec vingt-cinq ou trente princes, prélats ou seigneurs. Par ce contrat, le duc était reconnu pour légitime héritier de la maison de Bourbon ; et pour le surplus des biens qui pouvaient appartenir aux uns et aux autres, ils s’en faisaient une donation mutuelle. Cette princesse mourut en couches en 1522, et ne laissa point d’enfants.
Madame, qui n’avait pu éteindre par aucun effort la passion qu’elle avait pour le connétable, sentit qu’elle revenait plus que jamais avec l’espérance de l’épouser. Comme elle était dans cet état, le chancelier, sa créature et ennemi particulier du connétable, qui lui avait refusé quelque grâce, vint la trouver pour lui dire qu’elle avait de quoi réduire ce prince, et qu’il lui mettrait en main tous les biens de la maison de Bourbon, dont elle était, disait-il, la seule héritière depuis la mort de Susanne. En effet, à ne regarder que la proximité du sang, Madame excluait le connétable ; mais il avait pour lui la substitution et la donation.
Le chancelier, qui trouvait des remèdes à tout, lui promit de détruire ces deux moyens, et donna assez de couleur à l’affaire, pour obliger Madame à l’entreprendre. Elle espérait tout de son crédit, et fut ravie de se sentir en pouvoir de réduire la fierté du connétable ou de s’en venger. Elle voulut cependant auparavant tenter les voies de douceur ; elle fit entendre au connétable les moyens qu’elle avait de le ruiner, et celui qu’il avait de se rendre heureux.
Bonnivet, qu’elle employa à cette négociation, y était peu propre, parce qu’il ne souhaitait rien tant que la perte du connétable, par la disgrâce duquel il s’assurait le commandement absolu des armées ; mais quand il eût agi dans toutes les intentions de Madame, il n’eût rien gagné sur le connétable qui, outre son aversion ancienne pour cette princesse, espérait d’épouser Renée de France, sœur de la reine, qu’elle-même lui avait offerte; ainsi il refusa Madame avec dédain, et elle se résolut de commencer le procès.
L’affaire fut plaidée solennellement au parlement ; les sollicitations de Madame et celles du chancelier qui avait tout crédit dans cette compagnie, dont il avait été premier président, étaient les plus fortes pièces contre le connétable, et il désespéra de pouvoir maintenir son bon droit contre tant d’autorité et tant d’artifice. Madame fit pourtant appointer l’affaire, afin d’avoir le loisir de faire parler de nouveau au connétable. Les propositions furent reçues avec un pareil dédain, et le connétable demanda hautement au roi madame Renée.
Dans le refus qui lui en fut fait, il n’avait pas sujet de se plaindre du roi, parce qu’on le fit refuser par la princesse elle-même, qui dit qu’elle ne voulait point épouser un prince qu’on allait dépouiller ; mais le connétable, qui sentit d’où lui venait le coup, entra dans un dépit extrême contre Madame, et dès lors résolut de traiter avec l’ennemi. On ne sait pas s’il avait sollicité le premier l’empereur, ou si l’empereur, attentif à tout ce qui pouvait servir à ses affaires, l’avait fait rechercher.
Quoi qu’il en soit, il eut assez longtemps dans sa maison Adrien de Croi, comte de Reux, premier gentilhomme de la chambre de l’empereur, et soit que l’ambassadeur de Venise en eût quelque avis certain, ou qu’il s’en doutât seulement par l’état où il voyait les choses, il est certain que le premier mauvais effet que François ressentit du mécontentement de Bourbon, fut qu’il en perdit les Vénitiens. Ainsi il avait contre lui tous les potentats d’Italie, excepté le Pape, qui persistait toujours dans le dessein de faire la paix.
Le cardinal Soderini, son principal confident, et ami de la France, l’entretenait dans la pensée d’unir plutôt les princes chrétiens contre les Turcs, que de prendre part dans leurs divisions. En lui donnant des conseils si conformes à son humeur, il s’insinua tellement dans ses bonnes grâces, qu’il éloigna le cardinal de Médicis, à qui le Pape avait d’abord donné sa confiance, comme à l’auteur de son exaltation ; par ses conseils, le Pape envoya des légats à l’empereur et aux rois de France et d’Angleterre ; mais les divers intérêts des princes rendirent sa médiation inutile.
François, à qui le mauvais état des affaires ne permettait pas d’espérer une paix avantageuse, ne voulait qu’une trêve, encore la voulait-il de peu de durée. Par une raison contraire, l’empereur souhaitait la paix et non une trêve ; mais le roi d’Angleterre, poussé par les conseils ambitieux du cardinal Volsey, archevêque d’York, son principal ministre, ne voulait ni trêve ni paix, s’étant persuadé que, dans ces divisions, il pourrait attaquer la France, ou du moins se rendre l’arbitre de la chrétienté.
Durant ces négociations, le roi attendait avec impatience l’événement d’une conjuration qui se tramait en Sicile. Le cardinal de Soderini était celui qui la ménageait ; mais le cardinal de Médicis, qui était piqué de jalousie de ce qu’il avait pris sa place, l’observa de si près, qu’il découvrit ses desseins et donna moyen au duc de Sesse de surprendre le courrier qui allait en France avec ses paquets. On apprit, en les ouvrant, que la conjuration était en état d’éclater : les complices furent châtiés rigoureusement, et le Pape, irrité contre Soderini qui l’avait trompé, le fit mettre prisonnier au château Saint Ange, où il lui fit faire son procès, pour avoir voulu livrer aux Français un fief du Saint Siège.
Pendant que le Pape était irrité, les Espagnols trouvèrent moyen de l’animer contre la France. On lui fit regarder le roi comme le seul obstacle à l’union de la chrétienté, et il entra dans la ligue avec tous les autres. Le roi était à Chambord, maison de plaisance qu’il avait fait bâtir tout nouvellement. Il y apprit ces nouvelles, et il prit une résolution digne de son courage qui était d’aller en personne à la tête d’une grande armée en Italie, pour soutenir tant d’ennemis.
En même temps il eut avis que Nicolas de Longueval, comte de Bossu, gouverneur de Guise, par une fausse intelligence avec le duc d’Ascot, gouverneur du Hainaut, dressait une embuscade inévitable aux Flamands. Il promettait à ce duc de lui livrer sa place ; lui et Fiennes, gouverneur de Flandre, devaient s’avancer de plusieurs côtés pour s’en saisir.
En même temps, les Français avaient disposé des troupes pour envelopper les ennemis. Ils devaient être prêts à venir se jeter d’eux-mêmes dans le piège que le comte leur avait tendu ; mais le roi voulut être de la partie, et vint en poste sur cette frontière. Une marche si précipitée ne put être sans grand éclat, et fit penser à Fiennes, ou que le gouverneur le trompait, ou que le roi avait découvert la conjuration ; ainsi l’affaire manqua, et le roi, fâché d’en avoir été la cause, voulut couvrir sa faute en faisant ravitailler Thérouanne, qui était fort pressée par les ennemis. Fiennes, s’étant mis en campagne pour l’en empêcher, se présenta devant nos gens ; une terreur panique se répandit dans son armée, qui prit la fuite fort vite, et Disne, capitaine de grande valeur, répara leur désordre, et favorisa leur retraite.
Fiennes put bien empêcher l’armée de périr, mais il ne put empêcher qu’elle se débandât quelques jours après. Ainsi la Flandre demeurait ouverte, et François y aurait pu faire de grands progrès, s’il n’avait eu dans l’esprit son entreprise d’Italie. Il prit le chemin de Lyon, où il avait donné rendez-vous à toutes les troupes. Comme il était à Saint- Pierre-le-Moutier, dans le Nivernais, deux gentilshommes normands demandèrent à lui parler, et d’abord ils se jetèrent à ses genoux ; c’étaient Matignon et d’Argouges, domestiques du connétable, dont ils vinrent lui découvrir la conjuration. L’envoyé de l’empereur avait traité avec lui au nom de son maître.
Par ce traité, qui ne fut que verbal, le connétable s’engageait à fournir trois cents hommes d’armes et cinq mille hommes de pied de ses terres, pour les joindre à douze mille impériaux qui devaient entrer en Bourgogne. L’empereur, en même temps, devait passer les Pyrénées du côté du Languedoc : le connétable promettait de s’y rendre et de traverser avec lui tout le royaume, pour aller tous ensemble tomber sur le roi, qui serait enveloppé par ce moyen et devait être livré entre les mains du connétable. Le roi d’Angleterre devait aussi entrer dans la Picardie ; ces trois princes avaient partagé entre eux le royaume de France.
On composait à Bourbon un nouveau royaume de Bourgogne, de ses provinces révoltées, du duché de Bourgogne, qu’Aimar de Prie avait promis de lui livrer, et de la Franche-Comté que l’empereur lui donnait, avec Éléonore sa sœur, veuve du roi de Portugal ; et le traité étant conclu, le connétable, qui n’attendait que le temps de commencer l’exécution, vint à Moulins, ville de sa dépendance, où il faisait le malade, afin d’avoir un prétexte de s’absenter de la cour.
Matignon et d’Argouges, qui devaient le suivre, étaient allés en leur pays pour donner ordre à leurs affaires. Là, pressés par le remords de leur conscience, ils se confessèrent à un curé d’être entrés dans une conspiration contre l’État. Ce confesseur leur déclara qu’il ne suffisait pas de s’en retirer, mais qu’ils étaient obligés de la découvrir, et que, pour leur en donner l’exemple, il allait tout découvrir au sénéchal de Normandie.
Ces gentilshommes, voyant tout leur dessein découvert par où ils devaient moins craindre qu’il le fût, appréhendèrent d’être prévenus ; ils allèrent au roi, lui découvrirent les complices, et obtinrent leur grâce. Il est malaisé d’expliquer l’embarras où il se trouva : il n’y avait point d’apparence de passer en Italie, tant qu’il sentirait dans le royaume un si grand commencement de révolte. De faire arrêter le connétable au milieu de ses provinces où il était adoré, c’était une chose impossible. Il résolut de l’aller trouver à Moulins, qui n’était pas éloigné de son chemin : il lui parla noblement, lui témoignant qu’il savait que l’empereur l’avait sollicité, mais qu’il ne voulait pas croire qu’il eût rien fait contre son devoir.
Le connétable, qui le vit instruit, lui avoua ce qu’il ne put lui nier, et ajouta que s’il avait écouté des propositions, il y avait été poussé par les indignes traitements que Madame lui avait faits. À cela le roi lui répondit qu’il ne pouvait empêcher sa mère de faire un procès, mais quel qu’en fût l’événement, il lui promettait de lui rendre tous ses biens. Cette promesse ne contenta guère Bourbon, qui ne voulait pas être à la merci de Madame ; ni réduit à n’attendre de soulagement que lorsqu’elle serait morte. Il répondit pourtant au roi avec une profonde dissimulation, et ce prince sincère, qui croyait aisément tout gagner par sa franchise, ne prit d’autres précautions que d’ordonner au connétable de le suivre ; ce qu’il lui promit aussitôt qu’il le pourrait. Il continua son voyage jusqu’à Lyon d’où il ne tarda pas de faire partir l’amiral avec ordre de l’attendre à Verceuil avec l’armée. À l’égard du connétable, quelque temps après le départ du roi, il prit le chemin de Lyon en litière, feignant toujours d’être malade. Sitôt qu’il fut arrivé à la Palice, il apprit que le parlement avait mis en séquestre les terres de la maison de Bourbon ; il fit semblant alors que son mal s’était augmenté, et qu’il ne pouvait plus même supporter le mouvement de la litière ; il dépêcha un gentilhomme pour faire ses excuses au roi, et s’en retourna à sa maison de Chantelle. II n’y fut pas plus tôt qu’il envoya Huraut, évêque d’Autun, pour assurer le roi que s’il lui plaisait de casser l’arrêt du parlement et de lui en donner son abolition, il le servirait plus fidèlement que jamais ; mais Madame, qui avait de bons espions auprès du connétable, le prévint et obtint du roi qu’il ferait arrêter l’évêque et assiéger le connétable dans Chantelle.
(À suivre.)
Commentaire de la rédaction :
Les temps de François 1er sont proches du temps ou écrit Bossuet, environ cent cinquante ans. Et ces règnes sont pleins d’enseignements.
Nous constatons combien le mercenariat est un expédient incertain et dangereux : se battre et risquer sa vie ne devrait pas se faire contre de l’argent, mais bien par amour et par fidélité. Certes il faut de l’argent pour s’équiper, mais les aventures italiennes montrent combien ce mercenariat est nocif et délétère, avec des troupes toujours prêtes à se rebeller, mais en même temps avides tant d’argent que de glorioles, et donc pouvant aller se battre ou faire pression pour, contre toute raison militaire et prudence tactique…
Bossuet souligne encore combien l’injustice faite à Semblançay, jugé injustement, fut une grande tâche pour le règne de François Ier ; certes, justice fut faite et le mauvais juge fut par la suite condamné, mais le mal a été fait, car, comme dit Bossuet, on ne peut rendre la vie à un innocent. C’est un double enseignement pour la politique : les officiers, dont les juges avant tout, sont les représentants du roi, et leurs décisions sont celles faites au nom du Roi. Ils doivent donc être irréprochables, et ce système traditionnel de la justice royale « force » le roi à vraiment faire attention à son personnel politique ; et l’on sait, par les nombreux historiens du droit étudiant l’Ancien Régime, combien la justice royale était diligente, juste, équitable, rigoureuse et clémente. Rien à voir avec nos institutions présentes, où le juge ne devrait qu’être la bouche de la loi positive, et n’est ni responsable, au fond, des jugements qu’il rend au nom d’une loi positive aussi fluctuante que le plaisir changeant du « souverain » peuple et aussi fausse que le déchaînement des passions d’alors, et ne représente personne d’autre qu’une entité ainsi abstraite, la loi positive.
Le juge d’ancien Régime représentait le Roi, et donc le Roi comme le juge étaient tributaires du bon fonctionnement de la justice pour leur honneur, et pour la longévité politique. Le Roi était naturellement incité à faire très attention à son personnel, et le juge, qui rester sujet et homme plein, ne devait pas simplement être la bouche de lois positives, mais bien rendre des jugements équitables, c’est-à-dire appliquer les lois non seulement positives mais aussi coutumières, naturelles, morales et divines, dans la situation particulière. Le juge n’était pas une machine, mais bien un juge, qui juge, et prend la responsabilité de son jugement, qui est aggravé par le fait qu’il le fait au nom du roi et par le pouvoir des prérogatives royales donnés par la force publique : un mauvais juge risquait gros, d’autant plus qu’il impliquait l’honneur du Roi, et qu’il concentrait le mécontentement des justiciables.
Le second enseignement consiste à la grande prudence dans les jugements de mort : et tant le Moyen Âge central que le Grand siècle montre un nombre très faible de peine capitale, souvent non-exécutés d’ailleurs, ou graciés par le Roi. La sagesse chrétienne savait satisfaire la justice, et ne pas abdiquer la nécessaire peine de mort, tout en l’appliquant très justement et très prudemment, pour le profit du bien commun et de la paix publique, mais aussi pour le salut de l’homme condamné le cas échéant – car il arrivait souvent que de grands criminels se convertissaient et montaient à l’échafaud volontairement, avec le pardon des victimes, à l’exemple du bon larron de l’Évangile.
Parlons aussi un tout petit peu de cette gestion financière, certes nécessaire, mais qui semble prendre des proportions à l’époque moderne bien peu chrétienne, et bien plus paganisante qu’on ne le croit : François Ier qui accroche la reine en plein conseil, et les histoires d’accommodements financiers ou de salaires qui prennent le pas sur la fidélité, la justice et le sacrifice… Encore un signe de l’affaissement moderne qui fut certainement et malheureusement l’incubateur de la réussite de l’hérésie, qui légitima ce qu’on appellera plus tard le capitalisme, c’est-à-dire l’enrichissement pour enrichissement, et l’action non pas pour des vertus supérieures et dans l’esprit de sacrifice, mais d’abord pour gagner de l’argent et non pas seulement un juste salaire.
Saint Louis, lui, usait de la moitié de son budget pour faire venir la couronne d’épines et bénir le royaume de France par cette présence insigne ; François Ier emprunte et fait circuler l’argent, pour mener des guerres vaines et de glorioles… Nous ne sommes plus dans la même époque, et ce XVIe siècle français, décidément, commence mal, et on comprend pourquoi les guerres de religion vont exploser plus tard, et on comprend aussi pourquoi le Grand siècle fut grand : il le fut car il revînt à une grande ferveur catholique, et un recul des pratiques « machiavéliennes » dans le gouvernement.
Il faut encore noter que quoi qu’il en soit les temps restent très chrétiens : les comploteurs repentants vont permettre d’éviter le pire pour la France ; et le pape Adrien commence enfin à se préoccuper de la menace du Turc, qui use des divisions chrétiennes pour agrandir son empire et menacer toute la chrétienté.
L’histoire de la cabale du connétable est symptomatique et nous enseigne plusieurs choses : qu’il ne faut jamais user de la justice pour se venger, même si la cause est entendue, ni pour des raisons de cœur – et la responsabilité de Madame en la matière est grande, cédant aux passions féminines contre le bien commun dans ce siècle où le bien commun semble être souvent mis au bémol derrière l’envie d’aventures grandioses. Ah, que le roi François aurait dû lire le testament de saint Louis recommandant de céder toujours dans le doute ses intérêts en justice à l’intérêt de ses sujets. Et cela montre comment le Roi, fort en Italie pour la gloriole, est faible avec sa mère quand il aurait dû être fort…
Et le fait que le connétable feint une maladie est comme une résurgence assez médiocre de la « ruse » machiavélienne et païenne : cela ne peut pas nous faire penser à ces faux malades dans l’histoire du Japon qui usent de cette feinte pour retarder la punition terrible du général ou du puissant du moment, ou pour différer une nécessité…`