[Cinéma] Conclave., par Paul de Beaulias
Ce film sort à un moment où le prochain conclave occupe de plus en plus les pensées des chrétiens intéressés par l’avenir de l’Église.
Il est une adaptation d’un roman de 2016, une fiction historique se fondant néanmoins sur une certaine rigueur de la description des institutions.
Nous n’avons pas la prétention d’en faire une analyse complète. Disons que si sur le fond il pose problème, il reste intéressant aussi par un certain réalisme d’ensemble, permettant de comprendre cette institution, et des jeux de la curie, avec certains éléments bien vus.
Avant d’entrer dans le vif du sujet, notons que d’un point de vue cinématographique le film est de bonne qualité. Disons aussi qu’il n’est pas à première vue dans la vaine de ces films anti-religieux grossiers, et volontairement choquant. Les lieux, les costumes, certaines réactions ou façon de faire, sont typiques de la Curie, le latin, les ornements, tout cela est fidèle. Tout se fait de façon feutré.
Le film est certes tout à fait, au fond, anti-catholique, mais on se demande à quel point c’est volontaire.
Pourquoi donc ce film est-il anti-catholique ? Il finit sur une fin improbable où un cardinal nommé in pectore parvient à siéger au conclave…et par un retournement de toutes les manœuvres il va se faire, in fine, élire de façon « providentielle », sans que ce cardinal, évêque en Afghanistan, censé avoir connu la vrai chrétienté persécuté, et ancré dans une certaine foi pratique, malgré une apparence d’homme a un utérus…
C’est quelque part tellement gros, que cela fait pitié.
Le film pourtant a un certain intérêt. Son grand défaut est d’être vraiment trop « humain », et tout ce qui est conservateur, et donc catholique, est décrié, mais bizarrement cela ne tient pas trop la route.
La faction conservatrice est dépeinte comme des sortes de rigolos, qui ont l’air d’hippies. La faction progressiste, au contraire, et bien avant qu’on comprenne qu’ils sont progressistes, sont très sérieux, très « chrétiens » dans leur comportement, très courtois, très latins… Il y a comme une inversion accusatoire de la part de l’auteur, et le hiatus entre le comportement et les idées des deux factions est si immense que moi-même j’ai pas tout de suite réalisé la chose, et j’ai pu croire pendant quelque temps que ce film aurait pu être plutôt conservateur, et critiquant les manœuvres politiques des progressistes, dans un climat trop humain, trop « d’hommeries », avec Dieu toujours oublié. Par exemple le fait que le cardinal Lawrence utilise une confession pour connaître une vérité – certes il ne brisera pas le sceau de la confession.
Les conservateurs passent pour des idiots, c’est clair : l’africain qui se fait piégé par un autre cardinal (ce qui va causer sa propre chute d’ailleurs), pour une affaire de moeur ancienne, et classée, veut-il se moquer d’un cardinal Sarah ? Cette scène est d’autant plus ridicule qu’on se demande comment un cardinal bien conservateur pourrait se laisser si facilement déstabilisé en public, alors qu’il ne se passe rien… Et on se demande comment ce passage n’est pas critiqué outre-Atlantique pour raciste anti-noir…
Et le cardinal Lawrence, dans son rôle d’administrateur à la mort du Pape, joue bien son rôle…sauf que son pseudo-sermon à l’ouverture du conclave est désolant : on a l’impression, répétons-le qu’il y a des personnages qui n’ont pas les bonnes répliques, mais qui si on changeait le script du film, on pourrait en faire quelque chose d’intéressant.
Ce que je veux dire que si on oublie la volonté anti-catholique de ce film, et qu’on changeait quelques détails, il serait intéressant :
De bons clercs minutieux, voulant faire la volonté de Dieu, mais inquiets des manœuvres trop humaines de certains cardinaux font ce qu’ils peuvent. Le cardinal Lawrence, au lieu d’être relativiste et de parler de la vertu de « doute » rappellerait la mission du Pape et de l’Église dans le monde, et de l’amour du Christ. Et « providentiellement », comme dans le film, tous les cardinaux carriéristes tomberaient les uns après les autres, qu’ils soient d’ailleurs conservateurs ou progressistes, pour laisser la place à un cardinal de combat, connaissant ce que veut dire martyr et combat pour la Foi… et prenant le nom d’Innocent, nom tout à fait en ligne avec une restauration dans l’Église (sinon Pie)…
Retenons en tout cas l’aspect feutré, et ne nous effrayons pas trop de ces manœuvres : ces descriptions sont plutôt réalistes, et dans l’histoire ont existé (pensons à l’élection de Jules II, élu après le pape Pie III, ayant régné 26 jours, après la mort du tristement fameux Alexandre VI, empoisonné inopinément) à de nombreuses reprises…
Sauf que Dieu veille, et qu’il faut prier pour que les cardinaux prient pour être éclairés…
Ainsi, avec ces réserves, et sans y chercher plus que quelques éléments documentaires, ce film peut être visionnable par des personnes prévenues.
Pour Dieu, pour le Roi, pour la France
Paul de Beaulias