La tristesse du Père, par Paul-Raymond du Lac
Qu’il est triste pour un père de voir ses enfants se déchirer et se détester. Ils sont issus d’un même ventre, d’une même souche, d’un même foyer, et pourtant, pour souvent des peccadilles, des frictions de caractère, des jalousies cachées, ils en viennent à se détester et à ne plus se parler.
Notre-Seigneur partage la tristesse de son Père de voir ses enfants se déchirer entre eux dans leurs péchés tout en s’éloignant de lui-même. Dieu est venu en ce monde pour donner sa vie, se sacrifier, pour forcer ces frères ennemis à se raccommoder…
Regardons saint Paul dans ses épîtres, comment il s’évertue à calmer les terribles dissensions entre frères chrétiens, lui le père qui les a baptisés… Ils ont la grâce, ou ils vont l’avoir, et pourtant ils se détestent et se tirent dans les pattes, parfois d’une façon si subreptice et presque inconsciente… Et le père, si sensible à l’inimitié entre ses enfants, est triste, et souvent impuissant, ne pouvant guère que prier et offrir des sacrifices.
Qu’il doit être terrible pour le père d’une paroisse de voir sans cesse ses enfants s’entre-déchirer pour des peccadilles.
Qu’il est terrible pour le parrain de baptême ou de confirmation de constater que ses enfants spirituels peuvent se détester entre eux… Dieu, réconciliez-les, je vous en prie ! Mais que votre volonté soit faite. Les jeunes convertis ou les catéchumènes, enfants encore dans la foi, ne mesurent pas combien ils font souffrir leur père qui ne souhaite que leur amour charitable, la paix et la joie. Ils aiment leur père, mais ils ne voient pas que détester son frère c’est faire mal au père… et qu’il faudrait aller contre ses sentiments, contre sa mémoire, contre le passé, pour se raccommoder et réjouir le père.
Et le père, qui les aime tous comme un père, chacun selon sa singularité, et tous comme ses enfants, continue de les aimer ; et il sait qu’ici ou là, malgré ses précautions et sa délicatesse, les frères devront bien se croiser en présence du père, et celui-ci craint alors que ces rencontres ne fassent qu’augmenter la brisure entre eux.
Le père a des moments de solitude terribles : il a beau crier pour la réconciliation, les enfants, pourtant de bonne volonté, ne comprennent pas, ils n’entendent pas.
Alors à vous tous, les pères de cette planète, que vous soyez pères naturels, pères spirituels par le parrainage de baptême et de confirmation, pères spirituels par la cure d’une paroisse ou d’une communauté, chefs, rois : vous avez l’insigne chance, par vos souffrances cachées causées par la dissension de vos ouailles, malgré tout ce que vous pouvez faire, de vous rapprocher de Notre-Seigneur, qui a vécu bien pire, qui vit tous les jours bien pire !
Car nous ne cessons de nous diviser et de faire dissension : l’homme pécheur est si prompt à se diviser, et si lent à demander pardon et reconnaître ses fautes… et ce même chez les « meilleurs », chez qui cet orgueil caché prend des formes subtiles et terribles…
Dieu, réconciliez-les !
Que les mères viennent servir d’intermédiaire, pour réconcilier ces frères ! Et vous-mêmes, fils d’un même père, réalisez à quel point vos inimitiés entre vous le font souffrir.
Pardonnez-moi, Seigneur, pour toutes ces inimitiés dont je me suis rendu responsable, et qui vous ont fait mal.
Notre Maman du Ciel, venez nous réconcilier, avant que d’aller à l’autel…
Pour Dieu, pour le Roi, pour la France
Paul-Raymond du Lac