Le mythe des trains japonais à l’heure, par Paul de Beaulias
Certains mythes ont le vie dure : par exemple dire qu’au Japon tout marche et que les trains sont à l’heure. Tarte à la crème classique pour tout français qui se plaint de nos mauvais trasnports – qui atteignent certes un niveau de désorganisation inouïe, et par contraste il n’est pas compliqué de faire mieux.
IL est vrai que les TGV japonais (les shinkansen) ou les grandes lignes des grandes villes fonctionnent bien dans l’ensemble, et qu’il y a un formalisme qui fait que c’est « agréable ».
Mais tout n’est pas parfait. Après 10 ans de vie et un déménagement dans une banlieue éloignée de Tokyo, je suis sur une ligne aux retards fréquents, et aux pratiques qui rappellent certaines scènes de la SNCF française.
Vous arrivez après un dîner vers 21h du soir sur le quai, pour prendre le train et rentrer chez vous, et l’annonce explique que le train de 18h35 va bientôt arriver en gare. Sur l’affichage l’horaire est bien 18h30. Vous regardez votre montre, il est bien 21h. Après quelques temps, vous avez sur le panneau la mention « retard important ». Aucune raison n’est dite et pas d’annonce du chef de gare…
Un autre jour, le train n’arrive pas, l’horaire est dépassé, mais aucune annonce et rien sur les panneaux. Un employé fait une annonce, il y a du retard. Puis ensuite une annonce automatique annonce que le train qui n’arrive pas arrive, mais il n’arrive pas, et avec l’horaire fausse.
Un train arrive, mais ce n’est pas le vôtre, et l’indication sur le panneau, erroné, vous ferait bien monter dans ce train qui ne va pas là où vous devez aller.
L’autre jour encore, le train s’arrête brutalement, accident de voyageur. On reste 30 minutes en pleine voie sans annonce et sans savoir ce qui se passe.
Bref, comme partout, rien n’est parfait. Pluie, neige, suicide, accident, panne ou dégradation, les causes sont nombreuses qui peuvent retarder tel ou tel train.
Simplement, l’orgueil national, la fierté fait que l’on essaie de bien paraître, surtout envers les étrangers, donc on cache la poussière sous le tapis, et le cas échéant on tente de cacher les problèmes, pour que cela ne se voit pas. Mais ils existent quand même !
Ceci dit, évidemment, ça fonctionne bien, comme cela fonctionnait bien il y a quelques décennies en France, avec la charité chrétienne en plus, qui faisait qu’on ne laissait pas pour mort un passager étendu par terre et inconscient sans que personne ne s’intéresse à lui, l’ignore et lui marche presque dessus (il a fallu que j’arrive pour appuyer sur le bouton d’urgence et appeler des secours, le pauvre type était peut-être comme cela depuis longtemps, vue qu’on était sur la ligne circulaire de Tokyo).
La décadence républicaine actuelle ne doit pas nous illusionner, par exotisme, sur une supériorité supposée de mondes païens, qui peuvent ici et là à la marge fonctionner mieux (comme fonctionnait bien d’ailleurs notre société il n’y a pas si longtemps), mais qui manque cruellement de charité, et qui est contaminé par le même virus révolutionnaire – le ver est dans le fruit, mais avec quelques décennies de retard.
Pour Dieu, pour le Roi, pour la France
Paul de Beaulias