L’éducation à la maison: alpha et omega de toute éducation saine (Petit cycle sur l’éducation 1/3)
Nous proposons trois courtes réflexions sur l’éducation qui nous semblent clefs
Nous conseillons tout de suite aux gens pressés de passer directement à la citation plus bas, tout y est dit, et les bavardages de votre serviteur ne méritent que peu d’attention.
Notre temps, atteint en profondeur par la démesure révolutionnaire, confond coupablement instruction et éducation. On veut nous faire croire, et nous croyons trop facilement en effet que l’éducation se résume à l’instruction, et que donc une bonne éducation revient à une excellente instruction. Rien de plus faux évidemment. Il suffit de constater la populace qui sort des dites meilleures écoles de l’instruction – dont je fais partie, donc je peux en témoigner – pour remarquer à quels points les gens mal éduqués sont pléthores dans les élites. Cela est d’autant plus visible aujourd’hui que même le vernis mondain des bonnes manières, qui ne dit rien sur la bonhomie foncière de la personne, s’effrite toujours plus et laisse juste à découvert toute la crasse d’ignorance profonde derrière l’entassement accumulatif de connaissances et l’absence total de bonté qu’aucune connaissance ne nourrit.
Vous avez des enfants, ou vous pensez en avoir un jour ? Alors sachez que vos enfants peuvent être aussi instruits qu’ils le veulent tout en restant des brutes, pire, en devenant des monstres que leur instruction mal utilisée rende diaboliques – cela s’appelle la révolution française, et plus loin toutes les tendances révolutionnaires nées toujours chez des gens très instruits, pour le pire, des diablotins illuminés et manipulateurs. La chance de notre temps est que l’excellence, en berne, ne soutient plus le diable, par trop voyant, qui ne se cache plus et dont les charmants atours ne parviennent plus à tromper le naïf.
Soyez prévenu : avant l’instruction, c’est l’éducation, c’est-à-dire l’édification au sens propre de bonshommes, dirigés vers le bien, conscient d’eux-mêmes, maître d’une volonté affermie, dans le service intégrale – le service au divin en somme, dans le monde sans jamais être du monde. L’instruction, à côté, est accessoire, secondaire. Elle ne peut venir qu’en supplément accessoire sur une âme déjà bien édifiée et dirigée vers le bien, pour l’approfondir et la renforcer, mais en second seulement, au risque de tomber dans le narcissisme, au mieux d’enfanter des collectionneurs et la complaisance dans l’inutile, au pire de rendre dangereux et démesuré, en faisant tomber dans la démesure, l’égotisme et l’ignorance du divin, augmenté de tristes manipulations du bourreau ancienne victime perdue et esclave de sa condition en usant et usant encore de moyens devenus fins, toujours pour de mauvaises choses, là où pourtant la raison et l’instruction ne devraient que rehausser et approfondir des vérités réelles, pratiques et divines.
Nous ne condamnons pas l’instruction, nous la remettons à sa place, c’est-à-dire comme ornement d’une bonne éducation et non comme une fondation.
Lire, par exemple, ne sauve pas l’âme, elle peut la perdre. De grands lecteurs sont devenus tant de grands saints que de terribles diables.
Ceci dit, en quoi consiste une éducation traditionnelle ? Nous nous proposons de laisser la parole à un petit bijou de clarté sur la question, qui sublime de loin toutes les oppositions rêvées entre éducation traditionnelle forcément autoritaire et éducation moderniste signe de progrès, puisqu’il y a progrès de l’instruction. Le problème est mal posé et faussé dès le départ, puisqu’au fond, l’art révolutionnaire est d’effacer le débat sur l’éducation en faisant croire que l’éducation c’est l’instruction[1]. La confusion des mots efface la nuance, permet d’attirer le bon sens dans le piège du flou révolutionnaire, efface le divin, la famille ; puis on nous sort la pseudo-neutralité de l’instruction, qui oublie l’essentiel – donc c’est une neutralité dès le départ mauvaise – on passe à l’éducation nationale – c’est-à-dire lavage de cerveaux généralisés pour des hommes-robots répondant à un certain schéma logique prédéfini, quel qu’il soit. Rien de tout cela dans l’éducation traditionnelle, dont le centre est le foyer – la citation est un peu longue mais tout est dit :
« N’importe qui souhaite pouvoir éduquer son enfant afin qu’il devienne quelqu’un de bien, mais il arrive souvent que de mauvaises éducations surviennent malgré le souhait des parents du fait de leur arbitraire et d’un manque de prise de conscience de ce qui est bon. Ce qu’il faut tout spécialement avoir au cœur dans l’éducation c’est de donner discipline et bonnes habitudes à ses enfants, chose qui ne se réussit véritablement bien qu’au sein de la Maison. Il faut bien toujours rester humble et se souvenir qu’une éducation trop sévère risque de tordre l’âme puérile, de l’altérer, mais il faut encore plus se garder de tomber dans une éducation laxiste où l’enfant est laissé libre de tout, ce qui les conduit à la débauche et au libertinage. S’il ne faut évidemment jamais oublier à quel point l’influence des actes et des paroles des parents et des vieux de la Maison sont importantes dans l’éducation et méritent toute l’attention, il faut aussi être extrêmement attentif aux paroles et aux actes de nos garçons et de nos filles, puisque c’est cette répétition de bons actes et de bonnes paroles qui conduisent sur le chemin de la vertu, et il faut donc corriger la moindre incartade à la vertu et la moindre souillure dès qu’elles apparaissent afin d’apprendre à nos enfants, et à les guider en ce sens, et à ne pas répéter les mêmes erreurs. La morale publique n’existe que parce que la vertu des Maisons est cultivée, et c’est pourquoi cette éducation est essentielle. Toutes les vertus publiques, à commencer par la civilité dans la rue, trouve leur fondement et leur apprentissage dans la Maison. La discipline et les bonnes manières étaient quelque chose d’essentiel et de strictement respectées dans les foyers avant l’ère Meiji. Les foyers de condition guerrière [les maisons de chevaliers] en particulier y apportaient une attention des plus rigoureuses, et les gens de cette condition recevaient et réalisaient des exercices qui les rendaient excellents, et de véritables gentilshommes. Ce genre d’éducation fonctionnait à merveille alors même qu’il n’existait ni les organismes scolaires de notre époque ni la formalisation que nous connaissons des diverses disciplines de l’esprit. Il faut toujours avoir à l’esprit que ces résultats extraordinaires provenaient quasi-exclusivement de l’éducation d’hommes [plutôt que l’enseignement de choses] se fondant sur discipline, bonne manière, exercice et culture au sein du foyer. Il est certes vrai que dans l’éducation d’aujourd’hui une grande partie de celle-ci est confiée aux écoles, dont l’aspect principal est l’instruction de connaissances théoriques, et que le foyer se contente trop souvent de ne venir qu’en complément, qu’en coopération de l’éducation scolaire, en portant beaucoup d’attention aux devoirs et aux cours du soir. Il ne faut pas oublier en revanche que pour ce qui est de la discipline et des bonnes manières les écoles sont globalement indifférentes, quel que soit d’ailleurs leur politique pédagogique, [et que cet aspect ne peut donc pas être délégué]. Cet aspect de l’éducation de nos enfants doit concentrer toutes notre attention de parents. Le foyer est le lieu de l’apprentissage des bonnes manières et de la discipline, et il est le lieu d’exercice et d’entraînement au quotidien. L’habitude qui consiste à respecter les lois de sa Maison et les coutumes de sa Maison est une belle, appréciable et ancienne habitude. Toute l’attention des parents, des anciens et du chef de famille à diriger, à guider ses enfants et ses cadets pour cultiver les bonnes actions, les bonnes manières, les bonnes paroles et la politesse est essentiel, et nous ne pouvons compter que sur les foyers pour réaliser cette tâche immense. »[2]
Quelle clarté ! Quelle justesse ! Le but est de faire un homme bon. Le reste découle naturellement. Il faut connaître le bien, le faire aimer, en faire prendre l’habitude – ce que nous appelons en termes chrétiens connaître Dieu, l’aimer et vivre selon le chemin montré par Jésus. L’habitude du bien, voilà l’important, et qui ne reste pas seulement contemplatif ou abstrait, mais bien incarné dans ce monde, sans jamais être mondain. Être sévère sans être dur, ni jamais être laxiste. L’école, l’état – si ce mot a un sens – ne peuvent pas éduquer, seule la Maison – non pas la famille, mais bien la société élargie à la parentèle et aux gens de la Maison – peut éduquer, première société, première res publica, dont seuls les bons hommes qui en sont issus font ensuite une société saine, le tout mené par l’exemple de la Maisons des Maisons, la Maison royale, seul État sensé. Le texte ci-dessus fait bien sentir que ce ne sont pas des mots qui épuisent le sujet, que toute théories et abstractions sont vaines. Chaque éducation est un défi à part entière, sans recette miracle, mais avec des principes solides et clairs, forcément souples, ancrés dans l’expérience et la pratique car guidée par le divin et dirigée vers lui. L’intention est importante, mais l’œuvre aussi. Une intention bonne doit devenir effective dans une incarnation bonne, un comportement vertueux, action, œuvre, attitude, parole, mode de vie ou n’importe.
Le Maison Royale montre la voie que toute Maison dans le royaume doit suivre, ce qui demande beaucoup d’énergie de tous, et qui ne supporte pas la passivité ni le laisser-aller, dans une œuvre toujours recommencée à chaque génération, par un miracle chaleureux et encourageant. Si difficile et si facile en même temps.
Pour Dieu, pour le Roi pour la France,
Paul de Beaulias
[1] Analogue à la confusion entre constitution et loi fondamentale, cf une autre de nos lettres. http://vexilla-galliae.fr/royaute/idees/2284-lettre-d-un-emigre-la-constitution-ne-se-reforme-pas
[2] Voie des Sujets, chapitre 3 1
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