« Attachons-nous à modeler nos pensées, nos paroles et nos actes sur ce que Dieu veut. ». Lettre mensuelle aux membres et amis de la Confrérie Royale
Bien chers membres et amis de la Confrérie Royale,
Le 17 août dernier était le dixième anniversaire du rappel à Dieu de Monsieur l’Abbé Christian-Philippe Chanut (7 août 1948 – 17 août 2013), dont feu Monseigneur le Prince Alphonse de Bourbon, duc d’Anjou et de Cadix, de jure SMTC le Roi Alphonse II de France, avait fait le Grand Aumônier de France.
À plus d’un titre, les légitimistes d’aujourd’hui ont une dette de gratitude envers Monsieur l’Abbé Chanut dont les cours, les conférences, les prédications, le rayonnement intellectuel et spirituel, le précieux ministère sacerdotal et enfin les grandes souffrances, endurées et offertes avec générosité, ont sans aucun doute fait beaucoup pour la cause légitimiste.
À l’occasion de ce dixième anniversaire, en guise de « lettre mensuelle », vous trouverez ci-dessous le texte d’une prédication qu’il donna, en présence de Madame la duchesse d’Anjou et de Ségovie, le 23 juillet 1995, dans la chapelle du « Champ des Martyrs » de Brec’h (à côté de Sainte-Anne d’Auray), lors d’une Sainte Messe célébrée à la pieuse mémoire des victimes odieusement massacrées en ce lieu à la suite de l’échec du débarquement de Quiberon dont on commémorait le bicentenaire (23 juin-21 juillet 1795).
Au-delà des considérations particulières de cette évocation historique, ce sermon de Monsieur le Grand Aumônier contient de très grandes vérités, d’une actualité pérenne, dont les membres de la Confrérie Royale peuvent faire leur profit, desquelles ils peuvent s’inspirer pour soutenir et intensifier leur engagement.
Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur
Prieur de la Confrérie royale
25 août 2023
Fête de la Saint-Louis
Huitième anniversaire de la fondation de la Confrérie royale
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Sermon de Monsieur l’Abbé Christian-Philippe Chanut
au Champ des Martyrs de Brec’h,
le 23 juillet 1995
« Et à quoi tout cela a-t-il servi ? Mais Dieu merci il n’y a pas en nous que la « pétrissure » humaine, que la vision temporelle ; parce que par le baptême nous sommes devenus enfants de Dieu nous avons, du sens des choses et de l’Histoire, une vision bien plus grande, que dis-je, une vision éternelle ! Et dont nous rappelons, bien à profit aujourd’hui, pour ceux dont nous célébrons la mémoire comme pour nous-mêmes, que si le grain de blé ne tombe en terre et ne meurt : il ne portera pas de fruits. Le grain de blé est tombé en terre et il est mort.
Ces martyrs si nombreux, ces morts si glorieux du champ de bataille, ces fusillés illustres, quoique souvent inconnus, sont bien tombés en terre et sont bien morts. Assurément tués par les balles et les coups de leurs ennemis, qui étaient aussi leurs frères, ceux pour lesquels ils se laissaient immoler, ceux pour lesquels ils se battaient, mais aussi tués par la lâcheté des uns, par l’hypocrisie à peine masquée des autres, par les divisions qui régnaient entre leurs chefs, pour toutes sortes d’abus dans lesquels ils ont été saisis, mais qui n’ont pas arrêté leur force et leur courage.
Ils ne sont pas morts que des coups des Bleus, ils ne sont pas morts que du manque de parole des conventionnels, ils ne sont pas morts que de la ladrerie de leurs adversaires ; ils sont morts aussi, hélas ! pour une bonne part de l’impéritie, de l’égoïsme et de l’idiotie de leurs amis. Il y a là, assurément, comme une sorte de microcosme de l’Histoire, comme une sorte de rassemblement fulgurant de ce qui est la triste situation dans laquelle nous nous trouvons tous.
Le grain de blé est tombé en terre et il est mort. Mais parce que précisément il est mort, et parce que précisément il est tombé en terre, alors il portera du fruit à cent pour un, ajoute le Seigneur.
Êtes-vous ces fruits ? Voilà la seule question qu’il faut vous poser aujourd’hui. Voilà la seule réponse qu’il faut apporter ! Chacun de nous est-il le fruit de ce grain de blé qui est tombé en terre et qui est mort ?
Assurément, si vous ne l’étiez pas vous ne seriez pas là ! Si vous êtes venus ici aujourd’hui, c’est que vous avez été pressés par quelque chose qui est plus grand que vous, qui est plus fort que vous, qui est au-dessus de vous !
Allez-vous vous abandonner à cette pensée ? Allez-vous vous laisser guider par cette lumière ? Là vous verrez qu’en vous-même se trouvent votre meilleur ami et votre pire ennemi. Votre meilleur ami, celui qui élève votre âme, votre esprit, votre enthousiasme. Et votre pire ennemi, celui qui vous invite à la modération, qui vous invite au calme, qui vous invite à être comme tout le monde.
Or, précisément, ces Chouans si oubliés de l’histoire, au point qu’il était incongru il y a encore cinquante ans d’en parler aisément, ces Émigrés qui les ont rejoints sur les plages, ne voulaient pas être comme tout le monde, ne voulaient pas parler le langage de tout le monde, et rêvaient non pas d’un monde passé à réédifier, mais d’un monde futur à construire sur la grâce divine.
Hélas ! ou heureusement pour nous, nous n’avons pas à faire (pour le moment) acte d’héroïsme. Nous avons à vivre un héroïsme plus quotidien et plus caché. Nous avons à être fidèles dans nos pensées les plus secrètes, dans nos actions les plus insignifiantes, dans nos paroles les plus humbles. Et ce faisant, chaque fois que nous choisirons l’honneur de Dieu contre toute autre chose, oui, nous serons les fruits de ces grains de blé qui sont tombés en terre et qui sont morts.
Attachons-nous donc, autant que nous le pouvons, à modeler nos pensées, nos paroles et nos actes sur ce que Dieu veut. Et nous serons les dignes héritiers, par le sang ou par l’esprit, de ceux qui, pour nous, ont donné leur vie afin qu’après eux tous puissent être fidèles à leur Dieu, ce Dieu qui est le seul Roy, ce Dieu qui règne sur tout et que nous voulons voir régner dans notre cœur.
Voilà pourquoi si souvent, comme nous venons de le faire, nous Lui demandons la grâce de savoir sanctifier Son nom, la grâce de savoir faire Sa volonté, la grâce de savoir établir Son règne, la grâce de savoir établir Son règne, la grâce de savoir recevoir la grâce quotidienne jusqu’à ce qu’elle nous transforme afin que nous devenions nous-mêmes « pardon », en nous immolant avec le Christ immolé, chassant aussi loin de nous la tentation et délivrant le monde de l’emprise du Mal.
Voilà ce que signifie le Cœur Sacré qu’ils avaient cousu sur leurs vêtements. Voilà ce que signifie celui que vous portez aujourd’hui. Soyez en dignes dans les petites choses, peut-être serez-vous appelés à l’être dans les grandes choses, mais sachez que vous êtes dans le Cœur de Dieu, et que vous avez en vous déjà toutes les grâces du repos divin.
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il ! »