Lettre d’un émigré – Soyons disponible au Roi
Comment bien servir le Roi ? De nombreux sujets fidèles du Roi sont pris par la fièvre des élections, le carnaval récurrent des temps modernes qui amuse la galerie pour le pire. Le public est heureusement de plus en plus conscient du ridicule de l’exercice et de l’impuissance fondamentale de ces gens nouveaux clowns patentés d’une logique de deux siècles qui commence enfin à décrépir visiblement aux yeux de tous.
Le constat reste malgré tout en un certain sens affligeant : les pauvres Français veulent se sauver, ce qui est rien que de plus normal, mais ils s’excitent dans ces temps électoraux, qui deviennent une foire d’empoigne généralisée.
Les sujets fidèles du Roi, comme beaucoup d’autres, ressentent le besoin d’agir. Il faut bouger, il faut du mouvement, sinon c’est la mort ! Certes, certes, il est nécessaire d’agir et d’œuvrer, mais encore faut-il vraiment de l’action et des œuvres, et non pas de la distraction et des mouvements inutiles. La jeunesse peut compenser l’inutilité de mouvements pollueurs par une énergie débordante : comme le maître d’arts martiaux ne fait que les mouvements nécessaires, mais si parfaitement qu’ils sont d’une efficacité totale, une sorte de réalisation pure d’une volonté concentrée, nous aussi dans la vie de tous les jours nous faut-il nous efforcer d’exercer notre volonté en bloc, en supprimant mouvements inutiles et agitations frénétiques, pour tendre à des actions et des œuvres bonnes et efficaces, dans cet ordre.
L’art du sujet fidèle, plus que de faire preuve d’activisme, et de s’assumer au quotidien et bien œuvrer même dans les petits détails, tous dans le présent mais tourné vers le long-terme, et d’éduquer sa volonté pour agir et œuvrer au bon moment et comme il faut, dans les mesures de nos moyens.
L’important pour bien œuvrer n’est-il pas de savoir œuvrer avec une volonté puissante au moment où il le faut ? Il suffit d’étudier un peu l’histoire pour se rendre compte combien dans les temps anciens tant de grands changements et de grands évènements tiennent à des actions et des œuvres qui se jouent de peu, et dépendent souvent de l’action au bon moment et bien faite d’un protagoniste. Ces résultats n’arrivent néanmoins pas sans que rien ne soit fait et demandent une préparation, et un exercice de tous les jours, dans un travail et un entraînement de tous les instants, dans les moindres détails.
Ceci dit, que faire en tant que sujet ? Se rendre disponible à notre Roi et le lui signifier. Nous pouvons bien entendu avoir des opinions, et penser que ceci ou cela pourrait aller plus vite, ou pourrait être plus ceci ou cela, mais au fond qu’importe, ce n’est pas notre rôle, nous sommes sujets, non Roi, notre travail est d’accomplir notre rôle, dans le service gratuit et l’œuvre bonne.
Oui, rendons-nous disponible à notre Roi. C’est-à-dire que préparons-nous à ce qu’il nous appelle, et soyons prêts pour pouvoir et savoir répondre à l’appel du Roi, quand il le jugera nécessaire. Qu’Il sache que de nombreux sujets prient pour lui, œuvrent à leur niveau, et se rendent disponibles pour ce qu’il jugera nécessaire au moment où il le jugera nécessaire. Cela ne nous empêche pas d’œuvrer, au contraire, mais cela exige de nous encore un plus grand travail sur nous-mêmes, car il nous faut nous dire que demain le Roi peut nous appeler, et que notre devoir est de lui répondre, et lui répondre bien, donc il faut nous former cette volonté et nous tenir prêts, nous tenir vigilants.
D’une certaine façon, comme il est bon de se rendre disponible à Dieu en le laissant entrer en nous, le laissant nous parler, sans hésiter à lui adresser la parole, et sans hésiter d’agir selon ses vœux dans le monde d’ici-bas aussi, nous pouvons aussi sur cette terre nous rendre disponible à notre Roi, de tout notre cœur et de toutes nos forces, et nous préparer de façon exigeante. Il ne suffit pas d’affermir notre volonté, ce qui est une nécessité absolue, mais aussi de préparer nos familles et notre entourage, pour répondre quand il le faudra à notre Roi, pour aller à ses côtés, ou aller où il le voudra pour accomplir ses vœux, ce qui nécessite que nous nous préparions pour rendre possible dans nos moyens une disponibilité maximale, qui passe par une volonté affermie, et une préparation concrète pour que l’action soit matériellement possible quand l’appel viendra.
Cette disponibilité n’est-elle pas le meilleur moyen que nous avons en tant que sujet pour servir et soutenir notre Roi en son âme et en ce monde ? Cette disponibilité, qui peut se décliner de façon aussi large et selon autant de couleurs qu’il y a de situations personnelles, n’est-elle pas le moyen noble par excellence, dans un exemple édifiant, de servir et servir encore, en oubliant notre ego, et en nous remettant à notre Roi ? Cette disponibilité n’est-elle pas le meilleur moyen pour accomplir la Restauration, en mettant en sourdine les différences de vue et les oppositions que notre temps ne sait que trop bien exciter et irriter à l’extrême, zizanie nuisible qui est un enfant de l’orgueil et de l’égoïsme ? Ces zizanies ne disparaîtront pas du jour au lendemain, les mauvaises habitudes ne se changent pas comme cela, et les Français ont pris beaucoup de mauvaises habitudes, mais autour du Roi néanmoins, tout le monde peut se mettre d’accord. Il suffit de se rendre disponible à lui et répondre à son appel comme il faut quand il le faudra.
Il n’y pas à avoir peur, car c’est justement cela la Royauté : le Roi Très Chrétien, sachant cette disponibilité, ne demandera rien ni d’impossible, ni de mauvais, et si erreur il y a, ce ne sera jamais à dessein. Mieux vaut servir fidèlement et efficacement que rester camper dans une sorte de méfiance trop révolutionnaire : de bonnes œuvres et de bonnes vertus ne peuvent donner que de bons fruits. Le comment est souvent plus important que le résultat lui-même dans ces œuvres purement humaines – non pas les fins supérieures évidemment, et les résultats doivent être là, mais il ne faut jamais sacrifier les moyens au résultat, ce qui compte c’est de bien faire, et cela donne toujours de bons résultats, même si ce n’est pas ceux que l’on attendait… L’homme est souvent très prétentieux, et croit savoir ce qui est bon pour lui, quand, au fond, il ne sait rien, car l’histoire, imprévisible, ne laisse pas présager du bon choix si facilement, et ce qui se révèle le bon choix après coup n’est souvent pas perçu comme tel au moment concerné, et, qui sait, il ne le devient peut-être aussi que parce que ceux qui l’ont fait l’ont fait avec détermination, selon des bonnes actions et de bons principes.
Que les choses soient faciles ou pas, que les épreuves soient terribles ou pas, acceptons toutes les croix, et offrons-les à Jésus dans le Ciel et au Roi sur la Terre.
Rendons-nous donc entièrement disponibles à notre bon Roi, et soyons prêts le moment venu. Que notre Roi sache que ses sujets fidèles l’entourent, et sont vigilants et prêts à répondre à son appel !
Pour Dieu, pour le Roi, pour la France
Paul de Beaulias