“Dernières conversations“ de Benoît XVI
Dernières conversations, le quatrième et dernier recueil d’échanges entre Joseph Ratzinger et son compatriote Peter Seewald aborde divers sujets comme la Renonciation au pontificat, l’affaire Vatileaks, le lobby gay à Rome, mais aussi Concile Vatican II, l’ecclésiologie, l’admiration pour le pape François ou encore son rapport avec la mort. Joseph Ratzinger dit tout ou presque sur sa vie avant, pendant et après son pontificat dans cet ouvrage de plus de 220 pages, qui compile 630 questions-réponses de longueurs diverses, également riche d’anecdotes de moindre importance.
Ce livre est divisé en trois parties. La première concerne la renonciation et la vie du pape émérite aujourd’hui au monastère Mater Ecclesiae. Retour dans le passé dans la seconde partie – sans doute la plus intéressante – qui retrace la vie de Joseph Ratzinger : sa famille, son enfance, la Seconde Guerre mondiale, ses années comme enseignant et théologien, le Concile Vatican II, les années comme archevêque de Munich-Freising puis le quart de siècle passé au Vatican comme préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi. Enfin, le pape émérite revient sur différents aspects de son pontificat, ses crises mais aussi les voyages et les rencontres qui l’ont marqué. Le tout est précédé d’une introduction de Peter Seewald, qui explique comment il a élaboré ce livre, qui devait à l’origine s’apparenter davantage à une biographie.
La renonciation est sans doute l’un des thèmes les plus attendus, l’acte le plus marquant de ses 8 années de pontificat, la renonciation à sa charge annoncée à la surprise de tous le 11 février 2013. Sur ce sujet, Benoît XVI affirme catégoriquement qu’il s’agit d’une décision entièrement personnelle : « Je n’ai pas renoncé sous la pression des événements et je n’ai pas fui parce que j’étais incapable d’y faire face. Personne n’a cherché à me forcer la main. Je ne l’aurais de toute façon jamais permis. Si quelqu’un avait tenté de le faire, je ne serais pas parti parce qu’il ne faut jamais s’en aller sous la pression. Il est tout aussi faux de dire que j’éprouvais de la déception ou autres sentiments du même genre. Au contraire, grâce à Dieu, j’avais l’âme en paix, pour avoir surmonté la difficulté. L’état d’esprit dans lequel on peut sereinement passer la barre à son successeur. »
Au passage, il confirme son attachement à la langue de Cicéron en de pareilles circonstances : « C’est moi qui ai écrit le texte de la renonciation. (…) Je l’ai écrit en latin. Un texte aussi important devait être écrit en latin. En outre, c’est une langue que je connais suffisamment bien pour l’écrire d’une manière digne du sujet. Naturellement, j’aurais tout aussi bien pu l’écrire en italien, mais je risquais de faire des fautes. »
Autre thème très attendu : sa vision du « style François ». En effet, certains commentateurs ont parfois opposé les deux papes, notamment pendant le synode sur la famille. Benoît XVI ne cache pas avoir éprouvé un certain étonnement en entendant le nom du nouveau pape… ainsi qu’une admiration immédiate. « Mon successeur a refusé la pèlerine rouge. Cela ne m’a pas du tout heurté. (…) Sa façon de prier pour moi, le moment de recueillement, puis la cordialité avec laquelle il a salué les gens : tout cela a fait immédiatement jaillir une étincelle en moi. Personne ne s’attendait à ce que ce soit lui. (…) Je ne pensais pas qu’il fasse partie du groupe restreint des candidats. Au début, quand j’ai entendu son nom, je n’étais pas sûr d’avoir bien compris. Mais lorsque j’ai vu comment il s’adressait d’une part à Dieu et d’autre part aux hommes, j’ai vraiment été content. Et heureux. »
Dans ce livre Benoît XVI livre aussi sa vision de l’Église actuelle, qui fait face selon lui à un véritable défi : une nécessaire réforme. « De toute évidence, l’Église se détache de plus en plus des vieilles structures traditionnelles de la vie européenne et par conséquent elle change d’aspect et présente de nouvelles formes…
Le pape émérite, qui a démissionné en février 2013, partage son temps entre la lecture, la prière, le piano et quelques visites. Il entretient de bons rapports avec son successeur, qui le définit comme “un grand-père à la maison” dont il aime écouter les conseils. Ces propos ont été largement interprétés comme une expression de soutien explicite à François de la part d’un pape considéré comme plus conservateur et rigoriste, de part ses origines et sa nature profonde.
Nous avions eu le bonheur de le rencontrer à Lourdes voici quelques années et la bonté, la générosité, la bienveillance qui s’échappaient de son regard nous a émus et séduits à la fois. Une belle âme, qui ira directement près de Jésus-Christ sans passer par les couloirs de la confession…
Solange Strimon