Le Roi du Japon va-t-il abdiquer ?
Le Tennô [ndlr : habituellement traduit par empereur, nous le traduisons par Roi, plus proche du concept de Tennô en Français que le mot « empereur »] s’est adressé directement à tout son Royaume le lundi 8 août à la suite de rumeurs émanant de l’office royal au début de l’été concernant sa volonté d’abdiquer.
Le discours en question ne parle pas directement d’abdication, car, par coutume sous la loi fondamentale imposée par les américains à la défaite, mais aussi par coutume ancestrale, le Tennô évite de donner toute opinion directe sur un problème politique précis, ici la succession.
Il faut aussi noter qu’un tel discours royal adressé à la nation en dehors des discours protocolaires, et de ceux pour son anniversaire et les dévotions de la nouvelles années, sont extrêmement rares : les deux précédents depuis la dernière guerre consistent en l’allocution sur la décision royale de capitulation le 15 août 1945, et l’allocution royale en 2011 après la catastrophe du Nord du Japon. Avant-guerre, les allocutions royales exceptionnelles sont restées rares, dont la plus saillante et importante est celle sur l’éducation (seule allocution véritablement adressée à toute la nation). Il faut aussi noter que parole de Roi sacré était considérée officiellement comme source de loi jusqu’à la défaite. Cette allocution a donc un poids symbolique important.
Nous vous proposons avant tout de prendre connaissance du discours en question avant tout commentaire, et après une mise en situation déjà trop longue.
Discours de Sa Majesté le Tennô à propos du service en tant que symbole (28e année Heisei, le 8 août)
Nous avons passé l’importante étape des 70 ans depuis la fin de la guerre, et dans deux ans, ce sera la trentième année de l’ère Heisei.
J’ai moi aussi plus de 80 ans, et il m’est arrivé plusieurs fois de me trouver confronté à des faiblesses physiques. Depuis quelques temps, je pense souvent à mes années de règne en tant que Roi, ainsi qu’à mon service et ce qu’il doit être dans les années à venir.
Je désire aujourd’hui vous faire part de mes réflexions à titre privé sur ce qui est souhaitable dans le cas où le Roi devient âgé, comme d’ailleurs progresse le vieillissement de la société, même si je m’abstiendrai de tout commentaire concret sur le système actuel de la chambre royale, du fait de ma position de Roi.
Depuis mon intronisation, j’ai vécu ces années dans l’accomplissement des diverses missions et cérémonies nationales qui m’ont échu et j’ai pu réfléchir quotidiennement sur la façon d’être la plus souhaitable du Roi, que la loi fondamentale actuelle a défini comme symbole. Je ne cesse de penser profondément à ma responsabilité de sauvegarder la tradition en tant qu’héritier et continuateur de celle-ci. J’ai aussi réfléchi continuellement à la façon dont la chambre royale peut continuer à faire vivre aujourd’hui la tradition véritablement dans la société de façon immanente et vigoureuse, tout en répondant aux attentes des gens, placés que nous sommes dans ce monde et dans un Japon qui se renouvelle tous les jours.
Au cours de mon service en tant que Roi, j’ai reçu il y a quelques années deux opérations chirurgicales, et le temps passant, j’ai commencé à sentir le poids des ans sur ma force physique. J’en suis alors venu à réfléchir plus souvent à ce qui serait le meilleur quant à la disposition de ma personne pour le pays, pour le peuple et pour la famille royale, qui me succédera dans le cas où l’accomplissement du lourd service royal deviendrait matériellement et physiquement difficile. J’ai déjà dépassé les 80 ans et j’ai le bonheur d’être en bonne santé, mais je m’inquiète de mon affaiblissement à venir dont je crains qu’il rende difficile l’accomplissement à venir de mon service en tant que symbole, de toutes mes forces et de tout mon cœur.
Depuis mon avènement à la dignité royale j’ai vécu ces 28 ans en partageant avec vous tous de nombreux moments de joies, et aussi des moments de tristesse. J’ai toujours considéré que mon plus précieux devoir en tant que Roi est de prier inlassablement pour la paix de la nation. Je me suis aussi rendu compte qu’il était précieux de pouvoir, au gré des évènements, être aux côtés des gens, de les écouter et de les comprendre. Afin que le Roi puisse accomplir son rôle d’union de la nation et son rôle de symbole, j’ai senti qu’il était nécessaire à la fois que le Roi demande au peuple de mieux d’approfondir sa compréhension du Roi en tant que symbole mais aussi pour le Roi lui-même de porter une attention profonde sur ce qu’il est en tant que Roi, et de travailler à l’approfondissement de la compréhension de son peuple et enfin de cultiver la prise de conscience qu’il est habituellement avec la nation. J’ai pu en ce sens sentir de précieuses choses durant mes divers voyages dans ma mission de symbole dans toutes les terres du Japon, dont les régions les plus éloignées et les îles les plus isolées. En incluant la période où j’étais encore Dauphin, la Reine et moi avons visité pratiquement toutes les terres du Japon, et nous aimons chacun de nos pays, chacune de nos régions. Ces voyages nous ont fait prendre conscience que nos régions sont soutenues par l’existence de fortes communautés et par les gens du cru. J’ai pu avoir le grand bonheur, grâce à la conscience de cette réalité, de continuellement aimer mon peuple et prier, qui est le service fondamental et précieux du Roi, pour lui dans une profonde confiance, dignité et tendresse envers vous tous.
En ce qui concerne les mesures à prendre concernant le vieillissement du Roi, je crois que la réduction illimitée des cérémonies et des affaires d’État, ainsi que celle des actes en tant que symbole, a ses limites et n’est pas souhaitable. Il est toujours possible de penser à ouvrir une régence qui remplirait les tâches royales en cas de maladie grave ou de minorité du Roi qui l’empêcherait d’accomplir ses fonctions. Néanmoins, même dans ce cas, le Roi, dans un état chronique d’incapacité de remplir ses mission, reste et continue d’être le Roi jusqu’à la fin de sa vie, la régence ne change rien à cela.
Je m’inquiète de voir que la mauvaise santé du Roi, ou une situation encore pire, puisse avoir de nombreux impacts sur la vie nationale en paralysant la société. Lors du décès du Roi, la coutume de la chambre royale consiste dans la mise en place du rite funéraire immémorial du mogari dont les cérémonies durent pendant 2 mois, puis d’observer un strict deuil pendant un an, avec les cérémonies liées. Ceux qui doivent observer tous ces rites et procéder aux préparatifs de la nouvelle ère, en particulier la famille royale, se retrouvent dans une situation sévère et extraordinaire. Cette situation est inévitable, mais je ne peux m’empêcher d’y penser.
Comme je l’ai précisé au début, le Roi, sous la loi fondamentale actuelle, ne possède aucune prérogative concernant la politique nationale. Dans cette situation, et en se rappelant la longue histoire des Rois mes aïeux dans notre pays, j’ai voulu vous faire part de mes sentiments et de mes vœux ardents pour que la chambre royale puisse toujours être avec la nation, pour que nous puissions construire l’avenir de notre pays dans le soutien mutuel, mais aussi pour que jamais le service du Roi ne soit interrompu, et qu’il puisse toujours continuer dans la stabilité.
Je souhaite de tout cœur obtenir la compréhension de mon peuple.[1]
L’audition de l’allocution royale manifeste plusieurs choses fondamentales sur la Royauté au Japon aujourd’hui, sur sa nature, sur les dangers auxquels elle est exposée, et sur la situation actuelle du Japon.
Il faut noter avant tout que le Roi ne dit rien sur une éventuelle abdication, et les médias qui parlent au Japon d’abdication sur-interprètent les propos royaux, qui évoquent au mieux l’éventualité d’une régence, en réaffirmant au passage que dans tous les cas le Roi est Roi jusqu’à la mort – et en réaffirmant ainsi la conception traditionnelle du « Roi est mort, Vive le Roi ! » à la japonaise.
Remarquons ensuite une réaffirmation du rôle traditionnel du Roi au Japon dans le triptyque fondamental de protecteur et continuateur de la tradition, de roi sacré priant pour son peuple et rendant les dévotions aux dieux ses ancêtres, et d’unificateur de la nation – nation qui inclut aussi l’histoire et la terre en elle-même.
En ce sens, la chambre royale actuelle a pleinement conscience de son rôle sacré, en relation avec le fait que le sacre et les diverses cérémonies religieuses ne furent pas interrompues avec la mort du précédent Tennô, Shôwa – qui lui-même a incarné la continuité entre l’avant et l’après-guerre, et perpétua en particulier toutes les traditions religieuses mais aussi politiques, en utilisant l’inertie de la tradition et des habitudes gouvernementales déjà installées avec un personnel globalement conservé, et en évoluant dans les interstices grises de l’interprétation constitutionnelle.
Le Tennô réaffirme donc dans son discours son rôle de roi priant, point fondamental qui manifeste la continuité de la constitution royale nipponne malgré la guerre, l’occupation et les pressions modernistes, ainsi que son rôle clef de continuateur de la tradition ancestrale, de sa sauvegarde, et de sa culture vivace dans la réalité contemporaine, couronné par son rôle unificateur de la nation, puisqu’il l’incarne.
En ce sens le Roi rappelle les fondements royaux, avec, comme clef de voûte qui réunifie les trois éléments précédents, l’union du Roi avec ses sujets et son Royaume, et la relation du Roi à ses sujets, ainsi que celle avec le Ciel, relations qui se fondent sur la charité et l’amour, avant tout système ou contrainte quelconque et révolutionnaire.
L’allocution royale permet néanmoins de déceler un certain nombre de risques, tant dans le contenu que dans les réactions que le discours a suscité, qui reflètent aussi les questions majeures que le Japon doit encore résoudre, la plupart datant de la défaite.
Commençons par les réactions des médias, qui parlent d’abdication pendant le « vivant du Tennô ». Cette façon de poser le problème malgré l’absence de déclaration sur l’abdication pendant la vie du Tennô – mot d’ailleurs qui n’existe pas en Japonais, et s’il y a le mot d’« abdication », le mot consacré diffère, et il faudrait plutôt le traduire en français par « passation de dignité » (abdication au sens propre) – est doublement dangereuse : elle manifeste d’abord un irrespect royal, en parlant du Roi comme s’il était déjà mort, car le mot en japonais ne s’emploie dans l’usage que de façon posthume d’une part, et on imagine mal ce que serait une abdication si elle n’est pas du vivant du Roi d’autre part. Outre cet irrespect dans une expression inadaptée, le cadre du débat que les médias imposent à l’opinion est inadéquat : si on part dans l’hypothèse d’une abdication, qui n’est pas prévue par la loi fondamentale, ni par le code de la Maison Royale – ce que tout le monde appelle à tort « constitution » dans la doxa – une éventuelle abdication suppose soit un changement de la loi fondamentale et du code (code qui soit dit en passant avait le même rang que la loi fondamentale avant-guerre mais qui a été rétrogradé au même rang qu’une loi normale après-guerre, ce qui signifie en clair que le Parlement peut voter sa réforme comme une loi normale et modifier les règles de succession si la folie lui en dit dans un processus absolument pas traditionnel) ou la mise en place d’une loi extraordinaire pour permettre exceptionnellement une abdication sans changer les règles. Il est clair que d’un point de vue traditionnel, la seconde solution permettrait au moins d’éviter de toucher au sacro-saint code, qui conserve un aura constitutionnel car inchangé depuis sa proclamation par le Roi Meiji au XIXe siècle, même si le système imposé par l’occupant donne la possibilité de la profanation, qui n’était pas possible auparavant. Au fond, on peut résumer la situation de la royauté nipponne à l’heure actuelle comme celle qui est soumise à la possibilité de la profanation mais dont heureusement l’esprit de tradition générale qui règne encore au Japon ne fit jamais usage : le danger serait que dans les prochaines décennies, avec des générations plus molles et beaucoup plus lessivées par le giron révolutionnaire, un gouvernement décide de faire ce qu’a fait en France dans la révolution face au roi, voire, plus insidieux, une troisième république face à l’Église, ou pire, la même chose mais en prétextant le salut de la Royauté, en la dénaturant au passage. Voilà le danger le plus pressant sur la royauté nippone actuelle, état de fait qui dure néanmoins depuis longtemps, et on peut espérer que l’inertie sera suffisante pour passer le gué en attendant le retour d’une jeune génération qui monte, beaucoup plus traditionnelle que ses parents.
Cette façon de poser le problème est déjà une sorte de démesure dans le cadre japonais, et un débat faussé car, plus qu’une éventuelle abdication, la régence du Dauphin semble être la solution la plus pertinente, système prévu dans la loi qui ne nécessite aucune manipulation légale, et cas déjà vu dans l’histoire récente avec la régence du Tennô Tenshô au début du vingtième à cause de sa maladie par son fil le Dauphin, le futur Tennô Shôwa[2]. On peut aussi rappeler que le précédent Tennô Shôwa, très malade en fin de vie, ne demanda ni régence ni abdication, sans que sa maladie ne pose de problèmes politiques.
Nous n’allons rentrer dans le détail des débats de succession au Japon, dont la présente allocution pourrait rallumer les feux, et dont un premier accès fiévreux survint en 2005-2006 par un gouvernement pseudo-conservateur et carrément libéral, qui proposait de légitimer la succession par les femmes, comme en leur temps les anglais. Le débat tomba providentiellement à l’eau avec la naissance d’un Prince héritier à la seconde génération. Ce qu’il faut noter, c’est que l’allocution royale actuelle porte le risque de mener à un autre débat de ce genre, dont la politisation serait très dangereuse.
D’un autre côté, l’allocution royale reflète le problème réel du vieillissement de la population, dont la famille royale est victime comme le reste de la population.
Si l’on en vient au contenu du discours lui-même, nous pouvons relever plusieurs points d’attention, qui sont les points d’achoppement actuels de la royauté, ses entraves héritées d’après-guerre et qui ne demandent qu’à être levées.
D’un point de vue formel, nous pouvons constater une dégradation du niveau de langue, dans le « je » en particulier, qui remplace le « nous » de majesté d’avant-guerre, ainsi que toute la langue royale nipponne en déshérence, manifestation symptomatique de la chute de la qualité du Japonais en général dans la société japonaise – quoique encore à des années lumières de la dégradation du Français. Le discours royal ne fait toutefois qu’adapter sa forme pour être compris, car l’usage de la langue royale serait aussi incompréhensible aux jeunes contemporains, que le parangon d’une sorte de résurgence d’un passé mythifié de militarisme absolutiste, ce qui est évidemment une politique révolutionnaire américaine de refondation historique dans la diabolisation du passé, qui a marché à moitié, aidé par des collaborateurs japonais.
L’autre expression véritablement problématique est le « à titre privé », expression inimaginable au Japon dans la bouche du Roi, qui est par définition une existence publique, dont les paroles avaient naguère – et ont toujours en vérité – force de loi. Cette expression, ainsi que l’insistance sur le mot « symbole » et les rappels récurrents à la loi fondamentale actuelle, manifestent la pression sur une royauté muselée, et de la crainte de tomber dans l’arène politique, ce qui est une bonne chose en soi, mais qui en l’occurrence, vu la matière royale par excellence du sujet du discours, montre la faiblesse excessive de la royauté qui craint la dictature des partis si le débat tourne mal.
L’autre point inquiétant, bien signe de son époque, consiste dans l’intention, tendre du reste, mais non royale, d’alléger les charges pour la famille qui lui survivra autour des rites funéraires. Cette précision, ainsi qu’ailleurs ce qui est le mieux pour « le pays, le peuple et la famille royale », sont des signes d’un individualisme, certes feutré, mais nouveau dans l’histoire nipponne : s’il est peu probable que le Roi actuel ait une once d’individualisme, cette déclaration pourrait témoigner d’un esprit existant au sein de la famille royale, restreinte comparée à l’avant-guerre – ce qui n’est jamais bon – et du besoin urgent de l’étendre à nouveau par des naissances, ou en réintégrant les Princes de sang déchus par les américains à la défaite et exclus ainsi de la succession. Il reste à prier pour que jamais la famille royale nipponne ne tombe pas dans les frasques anglaises de personnes princières qui montrent le mauvais exemple ou n’en font qu’à leur tête – ce qui n’est jamais arrivé dans le Japon contemporain.
Il faudrait préciser encore que le mot « symbole », voulu par les américains pour faire de la royauté une coquille vide, peut signifier beaucoup plus en japonais, et correspond, avec une bonne interprétation qui se voit de plus en plus au Japon dans les milieux conservateurs, au concept de « lieutenant de Dieu sur terre », terme devenu tabou après-guerre.
Un dernier point à souligner concerne la figure royale à la fois modeste et dédiée au service de son royaume, et de son inquiétude de voir ses missions réduites par l’office ou le gouvernement en prétextant sa santé, et qui dans le pire des cas pourraient ne jamais être reprises. Ceci témoigne de potentiels soucis de l’office royal (ancien ministère de la gestion des affaires et de l’intendance de la chambre royale), qui se fonctionnarise et se trouve à la botte gouvernementale au lieu de rester dans l’esprit de service au Roi – esprit dans lequel il était dans l’après-guerre, et qui doit toujours l’être, mais avec des soucis véritables et sérieux, au point de décider le Roi à faire une allocution. Nous voyons ici un phénomène assez analogue au retrait de Benoît XVI, qui considère l’époque suffisamment dangereuse pour l’Église qu’elle ne pourrait supporter un pape affaibli. De la même façon, si l’ancien Roi Shôwa était un mythe intouchable, et dont on ne pouvait changer les traditions d’avant-guerre, l’actuel doit craindre, au fond, que les charges et cérémonies réduites du fait de sa santé ne soient jamais remises en place pour le Roi suivant – on peut imaginer tous les prétextes, à commencer par le coût, dans cette époque obsédée par l’argent.
Ce qu’il faut entendre avant tout néanmoins, c’est l’appel royal pour la continuité de la royauté et la continuité de son service, et l’inquiétude royale quant aux problèmes d’accomplissement de ses missions, et de la situation du pays. Là se trouve le facteur le plus encourageant de l’allocution : que la réaction des japonais soit de répondre humblement à la voix royale pour répondre traditionnellement dans un esprit de conseil et une dynamique positive d’union, sans politisation, ni d’ambiance révolutionnaire, en marchant sur la Voie royale.
Nous proposerons à un autre moment une analyse des questions successorales au Japon de façon plus précise, point intéressant dans la comparaison avec la royauté française, qui permet d’éclairer les tenants et les aboutissants des problèmes successoraux, tout en manifestant les limites théoriques qui dépendent des réalités concrètes. Cette comparaison est de grand intérêt pour la royauté nipponne qui n’est pas loin d’une crise successorale sans précédent dans le siècle à venir, mais peut-être aussi pour la restauration, dans la suggestion de modes de résolution et réconciliation dont nous avons tant perdu l’habitude dans ce siècle révolutionnaire où seule la lutte a raison.
Pour Dieu, pour le Roi, pour la France
Paul de Beaulias
[1] Traduit par nos soins: « 象徴としてのお務めについての天皇陛下のおことば(平成28年8月8日)
戦後70年という大きな節目を過ぎ,2年後には,平成30年を迎えます。
私も80を越え,体力の面などから様々な制約を覚えることもあり,ここ数年,天皇としての自らの歩みを振り返るとともに,この先の自分の在り方や務めにつき,思いを致すようになりました。
本日は,社会の高齢化が進む中,天皇もまた高齢となった場合,どのような在り方が望ましいか,天皇という立場上,現行の皇室制度に具体的に触れることは控えながら,私が個人として,これまでに考えて来たことを話したいと思います。
即位以来,私は国事行為を行うと共に,日本国憲法下で象徴と位置づけられた天皇の望ましい在り方を,日々模索しつつ過ごし て来ました。伝統の継承者として,これを守り続ける責任に深く思いを致し,更に日々新たになる日本と世界の中にあって,日本の皇室が,いかに伝統を現代に 生かし,いきいきとして社会に内在し,人々の期待に応えていくかを考えつつ,今日に至っています。
そのような中,何年か前のことになりますが,2度の外科手術を受け,加えて高齢による体力の低下を覚えるようになった頃か ら,これから先,従来のように重い務めを果たすことが困難になった場合,どのように身を処していくことが,国にとり,国民にとり,また,私のあとを歩む皇 族にとり良いことであるかにつき,考えるようになりました。既に80を越え,幸いに健康であるとは申せ,次第に進む身体の衰えを考慮する時,これまでのよ うに,全身全霊をもって象徴の務めを果たしていくことが,難しくなるのではないかと案じています。
私が天皇の位についてから,ほぼ28年,この私 は,我が国における多くの喜びの時,また悲しみの時を,人々と共に過ごして来ました。私はこれまで天皇の務めとして,何よりもまず国民の安寧と幸せを祈る ことを大切に考えて来ましたが,同時に事にあたっては,時として人々の傍らに立ち,その声に耳を傾け,思いに寄り添うことも大切なことと考えて来ました。 天皇が象徴であると共に,国民統合の象徴としての役割を果たすためには,天皇が国民に,天皇という象徴の立場への理解を求めると共に,天皇もまた,自らの ありように深く心し,国民に対する理解を深め,常に国民と共にある自覚を自らの内に育てる必要を感じて来ました。こうした意味において,日本の各地,とり わけ遠隔の地や島々への旅も,私は天皇の象徴的行為として,大切なものと感じて来ました。皇太子の時代も含め,これまで私が皇后と共に行(おこな)って来たほぼ全国に及ぶ旅は,国内のどこにおいても,その地域を愛し,その共同体を地道に支える市井(しせい)の人々のあることを私に認識させ,私がこの認識をもって,天皇として大切な,国民を思い,国民のために祈るという務めを,人々への深い信頼と敬愛をもってなし得たことは,幸せなことでした。
天皇の高齢化に伴う対処の仕方が,国事行為や,その象徴としての行為を限りなく縮小していくことには,無理があろうと思わ れます。また,天皇が未成年であったり,重病などによりその機能を果たし得なくなった場合には,天皇の行為を代行する摂政を置くことも考えられます。しか し,この場合も,天皇が十分にその立場に求められる務めを果たせぬまま,生涯の終わりに至るまで天皇であり続けることに変わりはありません。
天皇が健康を損ない,深刻な状態に立ち至った場合,これまでにも見られたように,社会が停滞し,国民の暮らしにも様々な影響が及ぶことが懸念されます。更にこれまでの皇室のしきたりとして,天皇の終焉に当たっては,重いの行事が連日ほぼ2ヶ月にわたって続き,その後に 関連する行事が,1年間続きます。その様々な行事と,新時代に関わる諸行事が同時に進行することから,行事に関わる人々,とりわけ残される家族は,非常に 厳しい状況下に置かれざるを得ません。こうした事態を避けることは出来ないものだろうかとの思いが,胸に去来することもあります。
始めにも述べましたように,憲法の, 天皇は国政に関する権能を有しません。そうした中で,このたび我が国の長い天皇の歴史を改めて振り返りつつ,これからも皇室がどのような時にも国民と共に あり,相たずさえてこの国の未来を築いていけるよう,そして象徴天皇の務めが常に途切れることなく,安定的に続いていくことをひとえに念じ,ここに私の気 持ちをお話しいたしました。
民の理解を得られることを,切に願っています。 »
[2] Connu chez nous sous le nom d’ “Akihito”, appellation toutefois impropre car irrespectueuse au Japon: on n’appelle pas le Roi par son nom familier, normalement réservé à ses proches.