Lettre d’un émigré. Messe japonaise et messe française
Peu de choses sont peut-être comparables entre France et Japon. Ou plutôt, peu de choses permettent facilement d’être comparées, par manque d’équivalents ou de connaissances pour juger de la pertinence de l’analogie. Certaines choses pourtant frappent à tel point que n’importe qui pourrait le remarquer. Par exemple la messe. Quoi de plus facilement comparable que la messe universelle, même rite, même offrande… Messe française, messe japonaise sont comme, malheureusement, ténèbres et lumières[1]. Comment donc le même rite Vatican II peut être aussi différent ? Incroyable mais pourtant vrai. Les formes sont importantes, certainement, mais la faute est toujours chez les hommes.
Vous allez à la messe en japonais. Vous allez à la messe en français. Vous arrivez cinq minutes en avance, tous les Nippons sont déjà là, à réciter leur chapelet. Vous arrivez cinq minutes en avance, personne n’est là, si ce n’est la chorale qui chantera à votre place, les retardataires gênant la célébration et la messe par là-même commençant en retard. La messe commence, et vous êtes frappé par cette église pleine de Japonais qui chantent en chœur les chants, dont les airs reviennent chaque dimanche, et récitent prières, confiteor et tout le commun – et pas seulement credo et Pater Noster – en communion et par cœur. La messe commence, la chorale chante des airs à chaque fois différents et si difficiles que vous reconnaissez à peine la prière liturgique, l’atmosphère est lâche, les concentrations éparpillées. Eucharistie, génuflexion[2] des fidèles, calme des enfants, dont certains s’agenouillent aussi pour imiter leurs parents ; on se relève pour se dire la paix du Christ en se saluant avec distinction et gravité, puis on s’agenouille à nouveau, Jésus est toujours devant nous. Eucharistie, génuflexion des africains francophones et de quelques Français, mais aussi vite relevés pour se dire « la paix du Christ » comme sur la place du marché – le Saint-Sacrement, lui, n’a pas bougé -, trop peu s’agenouillent à nouveau ; et surtout : les piaillements incessants de toute une bande de gamins – qui vous avaient déjà empêché de comprendre les lectures et le sermon du prêtre- ce brouhaha digne de parlementaires, ne cessent pas ; s’agenouiller est le minimum pour pouvoir se recueillir, il serait presque plus facile de prier dans un café du commerce. Etc., etc.
Il y a un vrai problème. Il suffit de voir le contraste pour être atterré. Cette messe française ne laisse aucune chance aux enfants de grandir dans la Foi, qu’ils n’effleureront peut-être jamais s’ils n’ont la chance de faire de bonnes rencontres, puisque jamais rien n’est perdu de façon désespérée. Mais que d’années gâchées ! Quelle impureté, quel sacrilège au Saint-Sacrement. Un païen même dans une messe ne se permettrait pas le moindre de ces blasphèmes contenus tant dans les attitudes que les mots trop légers, car le païen connaît la divinité.
On dira par exemple : « c’est un peu facile de critiquer l’éducation des gosses qui font du bruit ! ». D’accord, mais quand même. Il faut être sacrément « innocent » pour constater que ce n’est pas un gosse impossible, mais une majorité de gosses qui sont non pas impossibles mais mal éduqués – et ils sont à plaindre, car comment peuvent-il découvrir le Christ si personne ne leur dit que chaque dimanche il est devant eux. Et surtout, que comme dans un miroir, aucun enfant de la messe japonaise ne gêne la célébration par des courses poursuites ou des cris. Au pire, un poupon pleure, et la mère s’empresse de sortir le temps que le caprice passe… Cela fait beaucoup de hasard…
Dans ces conditions, oui, la messe tridentine et éternelle reste le minimum en France pour restaurer la religion. Le minimum…
Paul de Beaulias
Pour Dieu, Pour le Roi, Pour la France