À propos de la Journée mondiale du Tourisme 2015
Préparons-nous y maintenant, elle aura lieu le 27 septembre, suite au constat (selon les études réalisées par le Vatican) qu’un milliard de touristes représente un milliard d’opportunités. C’est en 2012 que la barrière symbolique d’un milliard d’arrivées touristiques internationales a été dépassée. Actuellement, les chiffres sont en progression constante et les prévisions estiment que la barre des deux milliards sera franchie en 2030. Il faut ajouter à ces données les chiffres encore plus élevés liés au tourisme local. Ce serait une lapalissade que de dire l’importance du tourisme, tant pour la contribution des touristes à l’économie du pays concerné que pour la connaissance des us et coutumes de celui-ci.
En prévision de cette Journée mondiale du Tourisme, le Cardinal Antonio Maria Vegliò Président et Mgr Joseph Kalathiparambil Secrétaire * ont souhaité se concentrer sur les opportunités et sur les défis soulevés par ces statistiques. Ils ont adopté le thème proposé par l’Organisation Mondiale du Tourisme : « Un milliard de touristes, un milliard d’opportunités ». Cette croissance lance un défi à tous les secteurs concernés par ce phénomène global : touristes, entreprises, gouvernements et communautés locales. Et, bien sûr, à l’Église aussi. Ce message a été rendu public quelques jours après la présentation de l’Encyclique « Laudato si » du Pape François, consacrée à la sauvegarde de la maison commune.
« Nous vivons une phase de mutation, où la façon de se déplacer change et, en conséquence, l’expérience du voyage aussi. Ceux qui partent vers des pays différents du leur le font avec le désir, plus ou moins conscient, de réveiller la partie plus intime d’eux-mêmes à travers la rencontre, le partage et la comparaison. Le touriste est toujours davantage à la recherche d’un contact direct avec ce qui est différent sous son aspect extraordinaire. »
Le concept classique de « touriste » s’est désormais affaibli au profit de celui de « voyageur » qui s’est renforcé, c’est-à-dire celui qui ne se limite pas à visiter un lieu mais qui, en quelque sorte, en devient partie intégrante. Le « citoyen du monde » est né. Non plus voir mais appartenir, non plus jouer aux curieux mais vivre, non plus analyser mais adhérer. Non sans le respect de tout cela et de ceux que l’on rencontre. Dans sa dernière encyclique, le Pape François nous invite à nous approcher de la nature avec le sens de l’« ouverture à l’étonnement et à l’émerveillement », en parlant « le langage de la fraternité et de la beauté de notre relation avec le monde » (Laudato si’, n° 11).
Les entreprises du secteur sont les premières à devoir s’engager dans la réalisation du bien commun. La responsabilité des entreprises est grande, dans le domaine touristique aussi, et, pour réussir à exploiter le milliard d’opportunités, il est nécessaire qu’elles en soient conscientes. L’objectif final ne doit pas être tant le gain que l’offre proposée aux voyageurs de voies à parcourir pour atteindre le vécu dont il est en quête. Ceci, les entreprises doivent le faire dans le respect des personnes et de l’environnement. Il est important de ne pas perdre la conscience des visages. On ne peut pas réduire les touristes à une statistique ou à une source de revenus. Il faut mettre en œuvre des formes de business touristique étudiées avec et pour les individus, en investissant sur les personnes et sur la durabilité, afin d’obtenir aussi des opportunités d’emploi dans le respect de la maison commune.
Les gouvernants doivent garantir le respect des lois et en créer de nouvelles capables de protéger la dignité des individus, des communautés et du territoire. Une attitude résolue est indispensable. Dans le domaine touristique aussi, les autorités civiles des différents pays doivent penser à des stratégies communes pour créer des réseaux socio-économiques globalisés en faveur des communautés locales et des voyageurs, afin d’exploiter positivement le milliard d’opportunités offertes par l’interaction.
C’est dans les communautés locales que l’on peut « susciter une plus grande responsabilité, un fort sentiment communautaire, une capacité spéciale de protection et une créativité plus généreuse, un amour profond pour sa terre ; là aussi, on pense à ce qu’on laisse aux enfants et aux petits-enfants» (Laudato si’, n° 179). L’économie du partage est en mesure de tisser un réseau à travers lequel se développent l’humanité et la fraternité, capables d’engendrer un échange équitable de biens et de services.
Le tourisme représente aussi un milliard d’opportunités pour la mission évangélisatrice de l’Église. «Il n’est rien de vraiment humain qui ne trouve écho dans leur cœur » (Concile Vatican II, Gaudium et spes, n° 1). En premier lieu, il est important qu’elle accompagne les catholiques par des propositions de liturgie et de formation. Elle doit également éclairer ceux qui, dans l’expérience du voyage, ouvrent leur cœur et s’interrogent, en réalisant ainsi une véritable première annonce de l’Évangile. Il est indispensable que l’Église sorte et se fasse proche des voyageurs pour offrir une réponse adéquate et individuelle à leur recherche intérieure ; en ouvrant son cœur à l’autre, l’Église rend possible une rencontre plus authentique avec Dieu. A cette fin, il faudrait approfondir l’accueil de la part des communautés paroissiales et la formation religieuse du personnel touristique.
La tâche de l’Église est également d’éduquer à vivre le temps libre. Le Saint-Père nous rappelle que «la spiritualité chrétienne intègre la valeur du loisir et de la fête. L’être humain tend à réduire le repos contemplatif au domaine de l’improductif ou de l’inutile, en oubliant qu’ainsi il retire à l’œuvre qu’il réalise le plus important : son sens. Nous sommes appelés à inclure dans notre agir une dimension réceptive et gratuite, qui est différente d’une simple inactivité» (Laudato si’, n° 237).
Un milliard d’opportunités aussi pour l’environnement. « Tout l’univers matériel est un langage de l’amour de Dieu, de sa tendresse démesurée envers nous. Le sol, l’eau, les montagnes, tout est caresse de Dieu » (Laudato si’, n° 84). Il existe entre le tourisme et l’environnement une étroite interdépendance. Le secteur touristique, profitant des richesses naturelles et culturelles, peut promouvoir leur conservation ou, paradoxalement, leur destruction. Dans ce rapport, l’encyclique Laudato si’ se présente comme une bonne compagne de voyage.
Un milliard d’occasions pour transformer le voyage en expérience existentielle. Un milliard de possibilités pour devenir les artisans d’un monde meilleur, conscients de la richesse que renferme la valise de chaque voyageur. Un milliard de touristes, un milliard d’opportunités pour devenir « les instruments de Dieu le Père pour que notre planète soit ce qu’il a rêvé en la créant, et pour qu’elle réponde à son projet de paix, de beauté et de plénitude » (Laudato si’, n° 53).
Étant donné qu’une partie d’entre nous s’apprête à choisir son lieu de destination, autant partir avec de belles consignes de vie et de découverte pour enrichir son esprit et son cœur. Que cette semaine vous soit agréable et dans la préparation heureuse et réussie d’un congé bien mérité, sans oublier que la Tunisie, au peuple si accueillant, nous attend certainement pour se relever de ses blessures et continuer à vivre dans la démocratie.
Solange Strimon
NB : *Le cardinal Antonio Maria Veglio est président du dicastère, Mgr Joseph Kalathiparambil, secrétaire. Le dicastère représente les différentes institutions de la Curie romaine, ainsi que les institutions chargées de travailler sur les questions importantes de la vie de l’Église et des sociétés civile. La Secrétairerie d’État le premier et le plus important dicastère.