[Conte de Noël] L’oiseau bleu de Saint-Louis
L’oiseau bleu de Saint-Louis
Il est des miracles qui dépassent l’imagination, mais quand ils se passent au moment de Noël où tout est possible, comment ne pas y croire ? Et avoir envie de relater l’événement, un vrai conte de Noël pour l’année 2014 qui s’achève !
Comme chaque mois de décembre, Noël accapare le devant de la scène pour faire revivre au monde chrétien la nativité du Sauveur de l’humanité associée dans la famille de Boisdaugustin à une merveilleuse statuette, celle de Saint-Louis, qui une fois par an, trône à côté du sapin de Noël, illuminé de mille feux. Sous les pieds de Saint-Louis est déposée une petite enveloppe dans laquelle se trouve une sollicitation rédigée par le grand-père. Celui-ci a pensé que pour les 800 ans de Saint-Louis, le saint Roi pourrait peut-être – enfin – intervenir. Voici plus de dix ans que la requête est déposée le 24 décembre sous ses pieds et que des prières appuient celle-ci pour que le miracle tant attendu s’accomplisse. Personne ne sait ce qui est écrit par le grand-père.
Les deux jeunes filles Emma et Héloïse ont souvent questionné le grand-père pour connaître la vérité, mais en vain. C’est l’heure où elles doivent quitter la propriété pour affronter le froid vif. Elles ont jeté sur leurs épaules la cape de feutre noir tissée dans la région après la tonte des alpagas.
S’éloigner de leur pièce préférée, où brûle un feu de cheminée bien entretenu pour accueillir un certain personnage à la robe rouge bordée d’hermine, est un rituel auquel elles se prêtent volontiers depuis qu’elles sont en âge de comprendre que tout le monde n’a pas la chance de vivre comme elles et qu’il est de leur devoir de faire en sorte que Noël le soit pour d’autres enfants. Elles s’en s’acquittent toujours avec joie. Elles espèrent quant à elles que la lettre envoyée au Père Noël aura bien été reçue et qu’elles auront le privilège de tout recevoir.
Déjà est apprêtée la desserte embellie du linge raffiné sur laquelle sont offerts liqueurs, sablés, sucres d’orge, entre joyeux chemins de table, élogieuses représentations de la mission exceptionnelle des lutins dans l’attente enthousiaste de la nuit magnifique du vingt-quatre décembre.
A l’évanescence du jour, les cônes vernis des sapins se couvrent de paillettes lumineuses. Les adolescentes viennent de parvenir à la cabane en bois confortable, abri de leurs jeux d’enfants, que le jardinier a conçue autrefois et qu’il entretient régulièrement.
La neige, qui blanchit le jardin d’une myriade de cristaux aux formes géométriques diverses, émerveille. Elles découvrent vite la grande enveloppe dans laquelle se trouvent les textes qui serviront de bougeoirs pliés tels origamis célestes. À haute voix, elles les lisent ensemble : « Qu’autour de toi rayonne le bonheur ; Que le meilleur de ton cœur se partage ; Que tu saches apprécier les beautés naturelles ; Que se joignent tes mains pour adorer, remercier Dieu et faire revivre la gloire de Saint-Louis ».
Mais en dehors de cette enveloppe, plusieurs paquets ont déjà été déposés pour qu’elles puissent les faire parvenir à temps à leurs destinataires et ceci dans la plus grande discrétion. Il s’agit d’apporter aux orphelins du bourg ces cadeaux – des jouets neufs et des vêtements chauds – pour leur donner un peu de joie et continuer à leur faire croire aux miracles de Noël. Le grand-père tient à ce que cette mission soit accomplie tous les ans par ses petites filles pour perpétuer une vieille tradition familiale.
Ce mercredi 24 décembre, tout se déroule comme d’habitude. Sauf qu’au retour de la messe de minuit, un bel oiseau bleu semble attendre sur la boite aux lettres. Le père, qui conduit la voiture vient de le remarquer, mais le grand-père assis à ses côtés aussi. Une émotion indicible étreint son cœur. Il avait regardé la boite aux lettres le matin même et celle-ci était vide. D’ailleurs, le facteur ne passe pas ou exceptionnellement la veille de Noël. Un miracle est-il possible ? La voiture a été stoppée. Le grand-père en sort le premier. L’oiseau bleu ne s’envole pas. Il semble l’attendre.
Le grand-père se signe lentement avant d’ouvrir la boite aux lettres et de découvrir une lettre postée du Canada. Fébrilement, il l’ouvre : son frère jumeau lui annonce qu’il a été victime d’un accident de voiture qui l’avait rendu amnésique et qu’il vient seulement de recouvrer la mémoire et le souvenir de l’adresse de sa famille. Il sera là avant la fin de l’année. Dix ans plus tard ! De la première voiture, tout le monde sort, conscient qu’il se passe quelque chose d’extraordinaire. La deuxième voiture, celle de la maman et des adolescentes s’est également immobilisée. Dans le grand silence de la nuit, l’oiseau bleu se met alors à chanter quelques minutes avant de s’envoler à jamais, comme dans un rêve.
De retour à la propriété, le grand-père se précipite vers la statuette de Saint-Louis, la lettre a disparu. À sa place, une magnifique plume bleue, preuve du passage de l’oiseau. Alors, il demande à tous de s’agenouiller pour prier et remercier Dieu et le grand Roi, qui pour ses 800 ans, va permettre à la famille de retrouver la joie et la sérénité. « Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes qui s’aiment ».
Claude-Sylvie Felgerolles