Idées

Lettre d’un émigré. La constitution est anticonstitutionnelle !

« Pour le mot « Kokutai » aussi, le décret[1] le cite dans le passage où il interdit toute publication et étude des deux essais « Le vrai sens du kokutai » et la « voie du sujet ». Il est traduit par la périphrase « The Fundamental Principles of the National Structure ». Comme l’avait déjà noté naguère avec exactitude Shôichi Watanabe, le mot exact en anglais pour désigner « Kokutai » est “Constitution”, tout simplement. Ce mot peut aussi se traduire par structure ou constitution physique, ou encore par « lois fondamentales ». En clair, cela[2] illustre l’axiome fondamental selon lequel la loi fondamentale est en fait l’expression par des mots et couchée par écrit de la constitution. Si la loi fondamentale en vigueur de 1946 présente de nombreuses contradictions, c’est parce qu’il y figure par écrit de la pensée en contradiction avec notre constitution. Il faut dire que cette loi fondamentale est en elle-même contradictoire et le produit insensé de cette contradiction. Il est donc tout à fait naturel qu’elle échoue dans toutes ses parties. »[3]

            Le Japon permet une fois de plus de se rappeler une vérité simple et claire, voire évidente, mais trop habituellement brouillée, compliquée et noyée dans un brouhaha entretenu de fadaises. On entend souvent en effet parler de « constitution », mais en réalité on ne parle jamais de la Constitution de la France. On peut se faire berner et croire que la constitution est le fondement inébranlable de « l’État », forcément une loi écrite, et de plus, si elle devient gênante, changeable tout de go à loisir – moyennant quelques pauvres procédures qui ne remettent jamais en cause la possibilité de modifier la constitution. Il n’en est rien bien sûr, en réalité.

            Comme le rappelle la citation précédente, l’appellation par « constitution » de la charte fondamentale du régime politique « république » est une faute grave de la pensée. Et comme disait Bossuet, une faute dans le langage entraîne irrémédiablement des fautes dans le comportement et les actions. Il faut donc la corriger.

            Ce que l’on appelle habituellement et faussement « constitution » est en fait tout bonnement une « loi fondamentale », ou même, pour remettre un joli mot au goût du jour, rien de plus qu’une « charte », c’est-à-dire un document écrit tentant, si les choses marchent à l’endroit, de refléter les lois fondamentales. Mais elle n’est pas la constitution, surtout pas.

            La constitution ne peut pas se résumer à un écrit, ni ne s’épuiser dans l’écrit ou dans la pensée. Comme notre propre constitution en tant qu’homme de chair animée, avec une âme, ne pourra jamais se résumer par une liste d’articles ou d’explications, ni s’épuiser par de la pensée et du langage, la constitution d’un pays, dans sa terre et ses hommes, recouvre tout un champ d’expériences ineffables, de lois coutumières transmises depuis des âges immémoriaux, d’esprit invisible issu de l’histoire, des mânes des ancêtres et de la volonté divine.

            La bizarrerie de notre modernité a consisté à vouloir « mettre par écrit » la constitution du  royaume. Laissons de côté la question de savoir si cette ambition presque blasphématoire n’est pas en elle-même un facteur de décadence. Il suffira de remarquer que pour pouvoir mettre par écrit la constitution, il faut au minimum avoir conscience que jamais cette « charte » ne pourra épuiser la véritable constitution, et que jamais elle ne pourra donc suffire. Elle ne dépasse jamais un succédané fatalement imparfait, parcellaire et incomplet, reflétant quelque part notre propre nature par définition finie.

            Une fois cela bien à l’esprit, une bonne loi fondamentale, sans jamais essayer – sans jamais ainsi tomber dans le pêché de démesure – de vouloir épuiser la constitution, sera un ensemble de lois et principes en accord avec la constitution du royaume. Une mauvaise loi fondamentale sera celle qui sera en contradiction avec la constitution.

            Vous l’aurez donc compris, nous avons donc un gros souci en France. Premièrement, la loi fondamentale a voulu usurper la place de la constitution, chose terriblement grave, que le régicide ne fait que matérialiser, mais qui vient de bien plus loin. Et sans compter la folie révolutionnaire, l’hubrys démoniaque a voulu faire croire qu’elle pouvait inventer, en plus d’usurper, une constitution. Fariboles ! Une constitution, comme notre nature, comme Dieu, ne se change pas, elle ne fait que se découvrir. La constitution de la France est aussi ancienne que le peuple franc, et certainement plus. Elle est le produit des chaînes de générations, de la verticalité divine, et de la relation au monde. Rien qui ne soit changeable sur une génération, ni même sur des siècles, et encore moins par une poignée de forcenés révolutionnaires.    

            La pensée révolutionnaire a réussi le coup de force terrible de faire oublier la constitution, en faisant appeler la loi fondamentale « constitution ». Nous voyons la décadence de l’esprit contemporain par le simple fait de parler de « réforme constitutionnelle ». C’est une illusion, on ne fait que changer de loi fondamentale, qui semble s’éloigner toujours plus de notre constitution véritable.

            La réalité est en effet simple. Que l’on triche en appelant la loi fondamentale « constitution » ou pas, on ne changera jamais que la loi fondamentale. La seule chose qui compte consiste dans l’harmonie et l’adéquation de la loi fondamentale à la constitution du royaume. Les lois fondamentales françaises sont manifestement anticonstitutionnelles depuis la Révolution, à part peut-être la « charte octroyée », et encore. Sans la royauté sacrée reconnue dans la loi fondamentale, elle est condamnée à être inconstitutionnelle, inexorablement.

            Le drame consiste dans le fait qu’il faudrait pourtant s’épuiser à découvrir toujours plus notre constitution, pour tenter peut-être de se fonder sur des principes en adéquation avec la nature de notre pays. Mais il n’en est rien, et on se perd en discussions oiseuses, à côté de la réalité et de la vérité, inutiles quand elles ne sont pas dangereuses et malintentionnées.

            Et en attendant, cette loi fondamentale qui renforce le parasite républicain contredit notre constitution, et affaiblit le pays. La France a beau ne pas être de constitution fragile, il n’est rien de pire que la scarification morale et physique pour atteindre son propre corps. La constitution ne changera pas, aussi fort soit elle malmenée. Au pire, la France ne fera que disparaître et mourir. La France vit depuis deux siècles à contre-courant de sa nature, dans l’auto-flagellation et la violence scarifiant ; cela la tue à petit feu.

            Attachons nous donc au Kokutai (la Constitution) de la France, et rétablissons une loi fondamentale constitutionnelle en harmonie avec la constitution de la France éternelle, soit du royaume de France, soit de la royauté sacrée française !

Paul de Beaulias

 Pour Dieu, Pour le Roi, Pour la France



[1]    Décret américain d’occupation sur le Shintô. En particulier interdit l’utilisation de certains mots et met en place la censure d’après-guerre de l’occupant.

[2]    L’existence des deux mots en japonais kokutai, constitution et kenpô, la charte fondamentale ou la loi fondamentale, distincte des « lois fondamentales ».

[3]    Keiichirô KOBORI, Sanctuaire Yasukuni et Japonais (靖国神社と日本人), Tôkyô, PHP Shinsho, 1998, p.138, traduction de notre fait :« 「国体」の語も亦、「国体ノ本義」「人民ノ道」と言った書籍の発行や論評を禁止する、と言う文脈に乗って指令本文に出現するのであって、そこでは“The Fundamental Principles of the National Structure”と言う題名の訳の中に出てくる。だが「国体」に当たる英語はかつて渡部昇一氏が正確に指摘された通り“Constitution”で十分だ。これを訳し返せば、構造、体格でもあるが、亦憲法でもある。と言うことはつまり憲法とは国体を言語に表現し成文化したまでのもの、と言う公理がここに表れているのである。現行の「一九四六年憲法」に種種の矛盾が露呈しているのはもともと国体に違背した思想を成文化した、それ自体が矛盾そのものと言うべき不条理の産物なのだから、至る所に破綻が生ずるのは当然なのである。 »

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