Tribunes

Les petites et grandes indignations

Elles sont partout. On n’entend qu’elles, à la télévision, à la radio, sur les alertes de nos téléphones. Ces saillies, ces petits mots, ces polémiques qui n’ont pas plus de sens que les faux débats qu’on nous livre sur les plateaux de télévision.

La dernière en date a pour protagoniste le Premier ministre de la république et l’un de nos philosophes les plus célèbres. Manuel Valls tacle Michel Onfray au motif qu’il serait devenu de droite et qu’en attaquant Bernard-Henri Lévy il légitimerait de facto les idées du Front national. Pour ce qui est de la très bonne réponse, je vous laisse avec les mots de l’intéressé, disponibles sur son site internet.

Alors que le chômage reste critique, que notre économie est exsangue, notre modèle social en perdition, le cénacle politicien ne trouve rien de mieux que de pérorer sur des éléments de langage, de s’indigner d’un mot, d’une phrase. Telle Christiane Taubira, Garde des Sceaux et ministre de la Justice remontant les bretelles d’un député de l’opposition parce que ce dernier avait estimé que son manque de résultat amenait les électeurs à se reporter sur des votes extrêmes.

La tactique politicienne est classique. Elle vise à attaquer les propos sur la forme pour ne pas y répondre sur le fond. Mais ce qui est remarquable est la violence des attaques : « déchets de la pensée humaine », « une personne à ce point pauvre, indigente, moralement, politiquement, culturellement ». Cela montre bien que Mme Taubira ne sait plus quoi dire pour contrer la moindre attaque qu’elle subirait. Il est connu que l’insulte vient quand on n’a plus rien à dire.

L’indignation est monnaie courante en ces temps de tensions politiques. D’un bord comme de l’autre, les politiques ne gouvernent plus. Ils sont devenus des rhéteurs. Ils passent plus de temps à choisir le bon mot que la bonne réforme. Et les médias font partie du cercle puisqu’ils relaient avec complaisance le bon mot qui allumera la mèche de la discorde. Tout cela me rappelle la décadence de l’Empire latin.

Alors bien évidemment, les disputes et joutes politiques ont toujours eu lieu et les noms d’oiseau ou de primate ont toujours fleuri dans notre histoire. Mais je pense que la situation est trop grave pour que l’on se batte sur le fait qu’il faille dire ou non Madame le Président. Nous avons un pays qui, socialement a perdu beaucoup de ses repères, économiquement est un champ de ruines. Et pour ce qui est de notre destin commun, je cherche encore la signification de ces fameuses « valeurs républicaines ».

Je veux bien qu’on s’indigne, je veux bien qu’on se crêpe le chignon, qu’on s’insulte et qu’on s’invective mais par pitié que ce soit sur des vraies questions ! Nos politiques semblent de plus en plus enfermées dans leur tour d’ivoire, de laquelle ils nous font parfois des discours et nous oublient souvent.

Heureusement, la société n’est pas aussi inerte que certains aimeraient. Les gens se rencontrent, discutent et battent le pavé. Les mouvements de l’écologie humaine (Manif pour tous, Veilleurs, Grenelle de la Famille) en sont un exemple saisissant. On n’eut beau traiter ces personnes d’homophobes, de néo-fascistes, de catholiques intégristes, ils ne se sont pas arrêté de défiler, veiller et discuter ; sans doute parce que leur indignation à eux est d’une plus grande noblesse.

Quoiqu’il en soit, nous devons continuer à aller de l’avant avec nos idées, ne pas s’arrêter à la petite pique et nous, royalistes, savons de quoi nous parlons. Sans cela, j’ai bien peur que nous finirons comme les byzantins, à débattre du sexe des transsexuels alors que les djihadistes sont à nos portes.

Edgard Comte

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