Societé

La vraie faute de François Hollande

La presse s’agite depuis plusieurs jours autour du cas Hollande-Gayet, avec une voracité terrifiante teintée d’une fausse réserve. A l’étalage de détails savoureux, on n’omet pas de joindre de prudents propos quant au respect de la vie privée, bien évidemment violée sans vergogne lignes après lignes. Hypocrisie, quand tu nous tiens !

C’était pourtant l’un des derniers remparts qui séparait notre presse, souvent veule et servile, de celle d’outre-Atlantique ou, plus proche de nous, d’outre-Manche : la distinction entre public et privé. Cette séparation repose sur une idée simple, un truisme qu’il aurait été inutile de développer en d’autres temps : on ne juge un homme politique que d’après ses actions publiques et politiques. Ce que peut faire ce même homme, dans le cercle de l’intimité, ne regarde personne (à part ses proches). Sauf bien sûr si cela peut avoir des conséquences sur la partie publique ; mettons : actions criminelles, corruption ou comportement léger pouvant mettre en péril la sécurité.

Pour le reste, que le chef de l’Etat ait été infidèle en amour n’est pas notre affaire. Certes, cela peut le rendre sympathique ou antipathique, selon que nos valeurs soient chevillées au corps ou purement d’apparat, mais la sympathie n’est pas un concept politique.

Oui, l’on pourra arguer du fait que nos deux derniers chefs d’Etat n’ont pas brillé par une discrétion appuyée quant à leurs frasques sentimentales. Si cela est vrai, ce n’en est pas pour autant une excuse pour avilir à ce point le débat public.

En revanche, il a bien une faute que l’on pourrait attribuer au chef de l’Etat, sans pour autant s’éloigner des strictes frontières de la chose publique. Et c’est Eric Zemmour qui s’en attribua le porte-parolat dans l’émission « ça se dispute » du 17 janvier dernier : la faute de François Hollande, c’est de ne pas être marié.

Oui, être infidèle est une faute morale, pas une faute politique. Mais faire preuve d’une pareille indifférence à l’égard de l’institution du mariage, qui est le socle de la civilisation, le fondement de la famille, cela regarde la chose publique.

Il est vrai qu’une certaine classe politico-médiatique, qui puise ses racines idéologiques dans l’emphase mai-soixante-huitarde, a méthodiquement œuvré tout au long d’un demi-siècle pour affaiblir en profondeur la noblesse de ce socle sociétal. Soit qu’elle fût ringardisée,  soit qu’elle fût dénaturée jusque dans sa définition même.

Il n’était donc pas si étonnant qu’un président socialiste ignorât la nécessité d’y recourir. Car le mariage, chez ces gens-là, ne représente rien, sinon les miasmes décadents d’un ordre obscur en putréfaction.

Et pourtant, la symbolique est tellement là. Le mariage est tellement aux antipodes de toutes les fausses valeurs portées par le système moderne : don de soi, fidélité, procréation. Quand l’époque ne porte que les étendards de la recherche personnelle du plaisir, de la « liberté » ou de la jouissance sans entraves.

Quand le chef de l’Etat respecte le mariage, il incarne une vision du couple, une idée de la famille, basée sur la complémentarité homme-femme, le désir d’enfants, la stabilité, le respect mutuel. Une vision qui ne se concrétise certes pas toujours dans les faits, mais que le mariage, dans sa nature réelle, sous-tend indéfectiblement.

Cela n’empêche pas la tromperie, la trahison, le mensonge, c’est vrai ! Mais l’institution est toujours là, solide, pour rappeler à chacun ses devoirs, et, à certains, combien ils y font défaut… dans le privé.

Lorsque le chef de l’Etat y renonce, c’est irrémédiablement pour se couler dans le courant de l’individualisme moderne, où l’autre membre du couple (ou du groupe ! Pourquoi pas ?) ne devient plus qu’un simple partenaire sexuel avec qui l’on ne cherche guère plus que le plaisir charnel immédiat… et qu’il convient de congédier dès lors qu’il ne nous satisfait plus.

Au fond, il n’est guère étonnant qu’Hollande ait commis cette faute. C’est celle de son temps, celle du monde contemporain libéral.

Et nul doute que, sur cet aspect-là, les prétendus « journalistes » de Closer auraient à cœur de s’exclamer « Hollande n’est pas marié ? Mais ce n’est pas notre problème, c’est son choix, sa vie privée. »

Preuve de plus, s’il en était besoin, que toute révolution passe par l’inversion des valeurs.

Stéphane Piolenc

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