Chretienté/christianophobie

De « Hosanna » à « Crucifie-le ! » ou des Rameaux à Pâques…

… Vivons pleinement ce dimanche des Rameaux et de la Passion qui ouvre la Semaine Sainte, laquelle achève le temps du Carême avec le Jeudi Saint, le Vendredi Saint, le Samedi Saint et la Vigile Pascale. Cette semaine commémore les derniers jours du Christ (le repas de la Cène, sa Passion, sa mort et sa Résurrection). Ces journées constituent le sommet de l’année liturgique et rassemblent les fidèles catholiques du monde entier.

Ce dimanche,  l’Église célèbre donc solennellement, avant la messe, l’entrée messianique du Seigneur à Jérusalem, telle que les quatre évangiles la rapportent : « La foule nombreuse venue pour la fête apprit que Jésus venait à Jérusalem ; ils prirent les rameaux des palmiers et sortirent à sa rencontre et ils criaient : Hosanna ! Béni soit celui qui vient au nom du Sei­gneur » (Jn 12, 12-13). Le dimanche des Rameaux (du mot latin ramus : « branche », « branchage » et de son dimi­nutif ramellus) permet à tous les catholiques de vivre un jour de fête. De l’Orient à l’Occident, et du IV° siècle à nos jours, cette fête qui exprime la Mort et la Gloire, a connu des formes et des accentuations diverses. En certains pays, elle a un très fort enracinement populaire.

Tout commence par l’entrée triomphale du Christ à Jérusalem monté sur un jeune âne. De partout, la foule loue et acclame Dieu, reconnaissant en Jésus son envoyé et le fils de David promu roi. C’est la même foule, nous dit l’évangile de ce dimanche, qui reniera Jésus jusqu’à le faire condamner. Les  « Hosanna » vont devenir « à bas ! ». Les « béni sois-tu » vont devenir « crucifie-le ! », les « vive Jésus » vont se transformer en « à mort ! ». Jésus le sait et se prépare à vivre la suite. Il n’est pas monté à Jérusalem pour cet éphémère triomphe humain, mais pour réaliser son œuvre de rédemption par la Croix : « la gloire, je ne la tiens pas des hommes…, mais du Dieu unique ». (Jn 5, 43-43).

Par amour pour nous, Jésus a affronté la souffrance des autres pour en être lui-même affecté, devenant solidaire de nos détresses. De célèbres artistes du 16ème siècle ont été tentés de décrire les souffrances de Jésus portant sa croix et… y ont réussi.  Le Christ devient l’un de nous dans la souffrance commune. Ce faisant, il brise la solitude de notre malheur. Aussi longtemps qu’un homme s’éloignera de la croix de Jésus-Christ, il ne trouvera aucune réponse humaine à la question de sa souffrance. Il n’aura jamais la réponse exhaustive à ce mystère. Jésus, lui, a voulu se rendre présent au non-sens de l’épreuve, qu’elle soit physique, morale ou spirituelle. La souffrance ne se justifie pas. Elle ne peut être combattue avec succès que par la foi.

C’est en souvenir de cette entrée triomphale à Jérusalem que les fidèles portent des rameaux (de buis, d’oliviers, de lauriers ou palmiers…). Des processions sont organisées dans de nombreuses villes, là où le diktat de notre gouvernement socialiste et laïc n’a pas encore pensé à l’interdire. Mais veillons, tout peut arriver, et surtout le pire. Selon les régions, les branchages utilisés peuvent varier : le buis est souvent utilisé en France, mais dans le sud, on emploie également le laurier et l’olivier ainsi que le palmier. Les branches utilisées à l’origine à Jérusalem étant des branches de palmier, c’est tout naturellement vers le palmier que va la préférence des habitants de régions chaudes. Si le buis est beaucoup utilisé en France, c’est aussi en raison de ce qu’il représente : en effet le buis est un persistant toujours vert et il est donc symbole d’immortalité, d’éternité.

Durant la messe du Dimanche des Rameaux, le buis est béni par le prêtre qui le distribue aux fidèles avec solennité et joie. Ceux-ci l’emportent ensuite pour le déposer sur le crucifix qu’ils possèdent à leur domicile. Veillons, nous qui avons peut-être plus que d’autres, le devoir de la transmission pour que nos amis pensent à le faire. Le buis béni de l’année est gardé précieusement, jusqu’au mercredi des cendres, où il est rapporté à l’église pour être brûlé et devenir cendres.

L’histoire dispose des traces de l’existence de la procession des Rameaux à Jérusalem au IV° siècle grâce au journal de voyage d’une pèlerine espagnole Egeria. De Jérusalem, cette procession se répandit dans presque tout l’Orient ; Byzance cependant ne l’accueillit que tardivement, et l’abandonna dès le X° siècle. A Rome, pourtant au temps de saint Léon, le dernier dimanche de Carême est considéré comme le dimanche de la Passion, et il se caractérise par la lecture solennelle de la Passion selon saint Matthieu.

Alors qu’avant 1955, la bénédiction des rameaux se déroulait dans l’église même, la liturgie renouvelée propose la commémoration de l’entrée du Seigneur à Jérusalem à l’extérieur des murs. Les chrétiens célèbrent ainsi le Christ mort et ressuscité… d’où l’importance de ne pas limiter sa participation à la “bénédiction des Rameaux” mais bien à l’ensemble de la célébration constituée de la procession et bénédiction des rameaux et de la messe qui y est rattachée.

Ces rameaux, une fois bénis, sont tenus en main par les fidèles qui se mettent en marche, en procession : marche vers Pâques du peuple de Dieu à la suite du Christ. On procède au cours de la célébration à la lecture de la Passion du Seigneur, le récit de l’ensemble des souffrances du Christ depuis son arrestation au jardin des oliviers jusqu’à sa mise au tombeau. Cette Passion est le mystère de la Pâque du Christ allant vers la mort et offrant sa vie par amour pour le salut de l’humanité.

On apprend par un Missel du VIIe siècle, que des rameaux bénis étaient considérés comme un remède contre les maladies et les pièges du démon dans les habitations. Les branches de laurier étaient supposées chasser loin des demeures les mauvais démons et autres fléaux et maladies. Est-ce à dire que la piété populaire a conservé la mémoire de ces habitudes vieilles de quatorze siècles ? Il est certain qu’aujourd’hui encore, certains chrétiens prêtent à ces rameaux (comme aux cierges de la Chandeleur) la capacité de protéger de la foudre. Alors que d’autres chrétiens ont le désir de rapporter le buis bénit qu’ils accrochent dans leur maison pour honorer leur crucifix, d’autres les placent éventuellement dans leur étable pour conjurer les maladies ou les plantent en bordure des champs.

Une autre habitude fait porter ces rameaux sur les tombes des défunts. En effet,  le buis, petit arbrisseau toujours vert est depuis la plus haute Antiquité un symbole funéraire lorsqu’il était consacré à Hadès ou à Cybèle. Cette signification explique peut être que certains chrétiens plantent leurs rameaux de buis bénit sur les tombes. On peut y voir aussi le désir d’associer les défunts à la célébration du mystère pascal. Dans un monde déchristianisé, la protection supposée contre la foudre et autre maladie relèvent sans doute de la superstition. Peut-être est-ce pourtant cet aspect de dévotion populaire qui explique en partie une participation massive  pour la fête des Rameaux, alors qu’à Pâques, pourtant sommet de l’année liturgique, l’Église semble nettement moins remplie. Nous apprécions toute démonstration de croyance (n’engageant que nous !) puisqu’elle nous élève vers Dieu et que nous avons besoin de vieilles coutumes pour poursuivre notre route. Il est bien d’autres traditions qui sont nées avec le dimanche des Rameaux, mais nous ne pouvons toutes les évoquer et vous remercions de votre compréhension.

Alors n’hésitez pas à prendre un peu plus de rameaux que vous n’en avez besoin pour en distribuer à qui aurait pu oublier, ou n’aurait pu assister à cette cérémonie des rameaux… Que cette semaine si riche en émotions vous donne la force de continuer à toujours vivre dans l’amour de Dieu et de votre prochain.

Solange Strimon

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